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Exclusif – Wilfried Pene, le Français qui veut jouer en NFL :  « Je me lance un défi »

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PAR HUGO LE VAY, AUX ETATS-UNIS

À 24 ans et après un cursus complet à Virginia Tech aux États-Unis, le joueur français de football américain Wilfried Pene se présentera le 24 avril prochain à la Draft de la NFL. Un projet ambitieux, tant la ligue américaine de football apparait comme un rêve pour les joueurs du monde entier. Dans un entretien exclusif pour le Quotidien du Sport, Wilfried se livre sur cette folle expérience aux États-Unis, sa préparation pour la Draft, et sur le développement du football américain en France.

Le 8 janvier dernier, vous avez annoncé vous présenter à la Draft de la NFL, qui se tiendra du 24 au 26 avril prochain. Qu’est-ce que représente pour vous la NFL ?

La NFL, c’est un peu un rêve intouchable. Il n’y a jamais vraiment eu de joueurs français qui ont réussi à jouer en saison régulière ou même à être drafté. Ça représente donc un rêve ultime d’être l’un des premiers à pouvoir être drafté et peut-être même jouer. C’est pour ça que je dis que c’est un rêve intouchable.

« On m’a dit que je n’y arriverais pas, ça m’a donné cette rage »

Vous parlez de « rêve intouchable ». Pourquoi est-ce « intouchable » ?

Beaucoup de gens m’ont dit que je n’y arriverais pas. Ça m’a donné cette « rage », cette envie de leur prouver qu’ils ont tort. Quand je dis « intouchable », je me lance un défi. Parce que je veux montrer que ce n’est pas si intouchable que ça. D’ailleurs, je ne suis pas le seul à l’avoir fait. Il y a Junior Aho qui joue chez les Falcons d’Atlanta. Il y a aussi eu Anthony Mahoungou. Quelques Français ont touché la NFL, mais avoir un véritable impact dans la ligue, ça n’a pas été encore fait. Ça commence à venir.

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Vous êtes de retour aux États-Unis pour justement préparer la Draft. Comment se passe cette préparation, à l’approche des Pro Days (processus de test des jeunes joueurs, qui ont la possibilité de se montrer devant les recruteurs des différentes équipes de NFL) au mois de mars ?

Ma préparation se passe bien. En ce moment, je mange beaucoup, mais tout est calculé et calibré. Quand on se prépare, c’est toute la journée. Le matin, je m’étire et bosse le cardio. C’est l’après-midi que vient le gros du travail, avec mon coach à Virginia Tech. On s’entraine ensemble quatre à cinq fois par semaine. Je veux être prêt pour les Pro Days le 26 mars, et me mettre en valeur au maximum pour tous les recruteurs à l’approche de la Draft.

Pourquoi avez-vous choisi de retourner à Virginia Tech avec votre coach pour finir votre préparation ?

Parce que si tu commences à signer avec un agent, et que tu vas te préparer dans les grandes salles et centres où beaucoup d’athlètes vont s’entrainer, tu dois repayer ton agent. Donc sur tes premiers contrats, tu perds beaucoup d’argent. Et souvent, les agents ont beaucoup d’athlètes, donc ils priorisent c’est qui ont le plus de chance de signer de gros contrats. C’est le business. Donc je ne sais pas s’ils m’auraient traité comme je veux.

« Une équipe universitaire qui joue devant 70 000 personnes »

Vous êtes arrivé en 2020 à Virginia Tech. Que retenez-vous de cette expérience ? Quel est votre plus beau souvenir ?

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Mon plus beau souvenir restera ma première entrée dans le stade. Tu as la musique, les fans qui sautent, tu sens le sol trembler. C’était fou de voir 70 000 personnes à chaque match. Cette université est connue pour ça. Qu’on fasse une bonne ou une mauvaise saison, le stade est toujours plein. En tant que Français, c’est incroyable, je n’avais jamais été habitué à jouer devant autant de monde. C’est plus de gens que dans un stade de Ligue 1, mais à l’université !

Vous êtes originaire de Tours, où vous découvrez le football américain. Vous êtes ensuite parti au Pôle France à Amiens, avant de décoller pour les États-Unis pour finir le lycée. Était-ce une évidence de partir vous exiler aux États-Unis ?

Quand j’étais petit, j’avais entendu qu’il y avait une équipe de France, que j’ai intégrée très vite. Les États-Unis, c’était bien, mais ce n’était pas mon objectif. Quand j’ai intégré le Pôle France à Amiens, je voyais des gens qui partaient beaucoup au Canada. Je me suis alors dit que j’aimerais aussi faire ça, mais aux États-Unis. Je suis vite entré en contact avec un lycée, qui était d’accord pour me payer tous les frais de scolarité. Il ne me manquait plus qu’à payer les frais pour vivre dans une famille d’accueil. C’était à peu près 750 ou 800 dollars par mois. Sauf que ma mère ne pouvait pas payer cette somme. J’ai donc un peu laissé tomber le rêve, jusqu’à ce qu’un de mes coéquipiers au Pôle dise qu’aucun Français n’avait le niveau pour jouer là-bas. Ça m’a remotivé, et grâce au destin et à l’aide de certains amis, j’ai pu partir juste avant ma Terminale. Tout s’est enchainé.

« On ne montre pas assez que les Français réussissent aux Etats-Unis »

Même si le football américain gagne en popularité en France, la pratique de ce sport ne semble pas vraiment décoller. Comment l’expliquez-vous ?

Déjà, il manque un joueur français majeur en NFL. Il faut un visage, pour amener plus de visibilité. Un peu comme Tony Parker avec le basket. Il faudrait aussi que les fédérations soient plus soudées, qu’elles aident les jeunes et les mettent en valeur. Par exemple, je pars à la Draft de la NFL. Je reçois du soutien, mais de la part des grosses organisations, c’est assez étouffé. On devrait plus en parler ! Tout le monde a parlé de Junior Aho lorsqu’il a signé à Atlanta, mais avant, pendant sa préparation, on n’en parlait pas. On ne montre pas assez que des Français réussissent aux États-Unis.

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Justement, un événement pourrait peut-être aider en ce sens. Le Flag Football, un sport dérivé du football américain, est au programme des Jeux Olympiques de Los Angeles en 2028. Est-ce dans un coin de votre tête ?

En vérité, c’est un tout autre sport. J’y ai joué à Tours, j’aimais bien. Si ma carrière dans le football se termine d’ici les Jeux Olympiques, pourquoi pas. Mais encore une fois c’est un autre sport. Je ne peux pas me dire que parce que je fais du football à haut niveau, je peux faire du flag football. Des gens s’entrainent dur toute l’année en flag football, je ne peux pas arriver et les dénigrer en débarquant seulement avec mon passé de joueur de football. Mais après pourquoi pas, dans le flag football, ou d’autres sports que j’ai déjà en tête d’ailleurs !

Vous dites « si ma carrière s’arrête avant les JO ». La fin de carrière, et « l’après », vous y pensez, vous qui n’avez que 24 ans ?

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Il faut toujours y penser. Les têtes brûlées ne le feront pas, mais ils ont tort. J’ai toujours été assez réfléchi dans tout ce que je faisais. Même quand je suis arrivé au lycée. Je me disais, « si ça marche tant mieux, sinon j’aurais quand même appris l’anglais ». Pareil pour l’université. Même si le football ne fonctionne pas, j’ai obtenu un diplôme, l’équivalent d’un Bac+3. C’est une fierté pour moi. Et puis j’ai des plans pour après, je réfléchis à des business, à des investissements. La NFL, c’est un plus, c’est le point culminant d’un parcours qui aurait été génial.



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