jeudi 28 mars 2024

Françoise Durr : « Mes qualités étaient plus adaptées à Roland-Garros »

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Elle n’a gagné qu’un titre de Grand Chelem, mais c’était le bon puisqu’elle a triomphé à domicile, à Paris. Dix-neuf ans après Nelly Landry, Françoise Durr remportait Roland-Garros en 1967. Et aujourd’hui, même si beaucoup de temps a passé, elle en parle encore avec beaucoup d’émotion.

Quand vous repensez à votre finale de 1967, quel mot vous vient immédiatement à l’esprit ?

Le soulagement. J’en garde encore un souvenir incroyable de cette finale contre Leslie Turner (4-6, 6-3, 6-4, Ndlr). C’était un peu la Chris Evert de l’époque, elle renvoyait tout du fond du court, revers croisés, revers courts, elle variait beaucoup son jeu. Sur la finale, j’avais donc décidé de l’agresser en montant au filet.

Pourtant, dans le troisième set, vous êtes breakée. Comment parvenez-vous à renverser la situation ?

J’étais menée 4-2 et 30-0 quand m’est revenue à l’esprit les paroles de mon entraîneur : « C’est quand même trop bête, tu es en finale d’un Grand Chelem, ça ne se renouvellera peut-être plus jamais, tu dois t’accrocher coûte que coûte. » Ça m’a boosté et j’ai enchainé quatre jeux pour l’emporter 6-4. Je suis contente d’avoir pensé à cette phrase car je n’ai plus disputé de finale de Grand Chelem par la suite et c’était donc effectivement une expérience qui ne s’est pas renouvelée.

Quel a été votre meilleur match du tournoi ?

Le quart de finale face à Maria Bueno (5-7, 61, 6-4, Ndlr), c’était un match très difficile. J’étais assez relaxe, quinze jours avant j’avais disputé le championnat de Paris et pour la première fois de ma carrière j’avais battu mon idole Maria Bueno (sept victoires enGrand Chelem). Ce succès m’a donné confiance et quand je l’ai retrouvée en quarts de finale, je savais que je pouvais la battre.

Mais en fait je n’ai pas eu un tournoi facile du tout. J’ai eu du mal tout le long de la compétition. Au 2ème tour, j’avais difficilement gagné face à une jeune américaine (6-3, 5-7, 6-1 contre Defina, Ndlr). Après Bueno, j’ai battu Kerry Melville (8-6, 6-3, Ndlr), une Australienne qui était dans les dix meilleures. J’étais contente car en quarts de finale elle avait battu ma bête noire, Ann Jones, qui était aussi la tenante du titre. Je ne la remercierai jamais assez d’avoir battu ma bête noire. Et en finale, j’ai donc gagné en 3 sets.

« Je ne remercierai jamais assez Melville d’avoir battu ma bête noire en quarts »

Qu’a changé cette victoire pour vous ?

A l’époque, on n’était pas trop médiatisé. La presse sportive suivait le tennis féminin comme elle suit aujourd’hui le sport féminin, avec un peu d’indifférence. Les gens me félicitaient, mais il n’y avait pas une grosse

euphorie non plus. Sur le plan personnel, cette victoire m’a offert une légitimité sur le circuit, une reconnaissance aussi et j’ai pris confiance, c’est indéniable.

Comment expliquez-vous que vous n’ayez gagné que Roland-Garros ?
J’étais bien cette année-là. Tous les autres Grands Chelems se jouaient sur herbe et je n’avais pas un bon service. Je retournais bien, mais mon service était faible, mes qualités étaient donc plus adaptées à RolandGarros.

« Cette phrase qui a tout changé en finale… »

Comment avez-vous vécu par la suite les bonnes performances françaises à Roland-Garros ?

J’étais contente que d’autres Français brillent. On était très proches entre joueurs, il y avait beaucoup moins de personnes qu’aujourd’hui autour des joueurs et on se soutenait sur les tournois. Je me souviens très bien de la finale de Patrick (Proisy) en 1972. Il jouait bien, il avait un beau jeu, mais il avait un sacré client en face avec Andres Gimeno. Ce dernier était un peu plus aguerri, c’est ce qui a fait la différence. Les victoires de Mary (Pierce) et de Yannick (Noah) ont aussi été de grands moments de joie.

Une Française peut-elle gagner Roland Garros cette année ?

L’avantage, chez les femmes, c’est que c’est très ouvert alors que chez les hommes le grand favori est Nadal. La clé de cette édition résidera dans la forme qu’aura Serena Williams. C’est un peu elle qui est le baromètre d’un tournoi.

Si elle est en forme et motivée, elle est quasiment imbattable. Sinon les grandes favorites seront comme souvent Halep, Wosniacki, Muguruza et peut-être Caroline Garcia. Caroline est encore un peu irrégulière je trouve sur un tournoi de 15 jours où il ne faut pas connaître beaucoup de relâchements. Mais j’espère que Caroline ou d’autres Françaises feront un bon tournoi et nous rejoindra dans la légende avec Mary Pierce.

Pratiquez-vous toujours le tennis ?

Oui, mais c’est de plus en plus pathétique, je me traine sur un court. Ce n’est vraiment pas beau à voir. Quand on a connu le plus haut niveau, c’est difficile de jouer comme ça, mais si je ne pratique pas ça me manque trop.

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