Une fois de plus rattrapé par une réalité économique difficile, le handball français n’a pas pu s’offrir le luxe de débuter la saison avec deux binômes d’arbitres professionnels. Le projet était pourtant bien avancé. A défaut, et en attendant l’arrivée de la vidéo, joueurs, entraîneurs et arbitres n’ont pas d’autres choix que de… collaborer.
Au-delà d’un handball français qui y voyait un progrès notable, le signe que les lignes bougeaient enfin, c’est toute l’Europe du handball, ou presque, qui attendait, cette saison avec impatience, l’introduction d’un binôme d’arbitres professionnels en StarLigue et en ProLigue.
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« Beaucoup de ligues européennes réfléchissent à la professionnalisation de l’arbitrage, nous dit Olivier Buy, le président de la commission nationale des arbitres. Mais, avant de se lancer, ils voulaient voir ce que donnait notre initiative, les pays nordiques notamment. » Eux aussi devront donc attendre. Attendre que les clubs français, sur lesquels devait reposer le financement de ces deux binômes (à hauteur de quelques milliers d’euros par an chacun), soient financièrement plus forts.
C’est quoi le problème avec l’arbitrage français ?
« Ces deux paires d’arbitres professionnels n’allaient de toute façon pas changer le système, note Alain Poncet, le président de l’UCPH (Union des Clubs Professionnels de Handball). Il est tout aussi important de poursuivre le travail entamé avec les arbitres depuis deux ou trois ans sur la base d’un suivi plus régulier, d’une meilleure formation ou de l’introduction de la vidéo pour un plan plus global destiné à porter ses fruits dans quelques années. Car c’est un travail de fond qui demande du temps. »
Les déçus, les impatients, devront se contenter de l’arrivée, en 2024, des buzzers sur toutes les tables de marque, ainsi que des zones de couleurs… Mieux que rien, mais pas suffisant pour espérer faire franchir un vrai palier à un arbitrage français qui, « de manière générale, n’est pas au niveau de la progression des clubs français et d’un des championnats les plus relevés d’Europe, souligne Jérôme Chauvet, l’entraîneur de Nîmes. Depuis la création de la LNH et du professionnalisme, le fossé ne cesse de se creuser. En même temps, il est difficile de reprocher des choses à des arbitres qui doivent faire avec des moyens trop limités. »
C’est pourtant avec ces moyens là qu’il va falloir faire et cesser de regretter que la conjoncture ne permette pas d’avoir plus d’ambition. Le salut passe peut-être, et d’abord, par un rapprochement entre deux sphères qui se sont trop longtemps opposées. « Dans cette logique de rapprochement, depuis le mois de septembre, je suis très optimiste, renchérit Alain Poncet, car une vraie prise de conscience a eu lieu sur la nécessité de poursuivre la collaboration. »
« La professionnalisation, on va y arriver un jour »
L’heure n’est plus aux polémiques stériles entre les différentes composantes du handball français, plutôt à l’union sacrée. « J’ai fait partie d’une génération qui a été la cible d’un rapprochement, témoigne Jérôme Chauvet. J’ai été tenté de prendre le chemin de l’arbitrage. Ce que j’aurais fait si j’avais pu trouver mon binôme. Mais, en devenant entraîneur, je suis peut-être plus ouvert. Je sais que nous avons beaucoup de choses à nous apporter, à l’instar de nos amis rugbymen qui ont désormais intégré les arbitres jusque dans leur staff. » Alain Poncet pousse la réflexion un peu plus loin en s’interrogeant :
« Pourquoi ne parvient-on pas à former des arbitres dans nos centres de formation, à orienter d’anciens joueurs vers l’arbitrage ? » L’enjeu est pourtant de taille dans un sport où l’influence de l’arbitre est grande, où ses décisions ont un vrai impact sur le jeu et son évolution.
« Je vous donne un exemple, insiste l’entraîneur nîmois. Des secteurs de jeu sont de moins en moins exploités car il est devenu difficile d’attaquer sur les extérieurs par peur de se faire sanctionner. Or, avec une collaboration plus fine avec les arbitres, je suis certain qu’on pourrait explorer ces zones extérieures ce qui ouvrirait des espaces au cœur du jeu pour plus de variété offensive et donc plus de spectacle ! »
« La professionnalisation, on va y arriver un jour » lance en cœur le duo Poncet-Buy, qui va peut-être passer par une période de transition semi-professionnelle », précise le premier, avant de conclure : « Il ne servirait à rien de mettre le toit avant d’avoir des fondations solides. »
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