vendredi 19 avril 2024

La chronique de Noël Tosi : l’angoisse de l’entraineur mal classé

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Entraîneur très expérimenté, qui a baroudé sur plusieurs continents, dirigé une douzaine de clubs et été sélectionneur en Afrique, Noël Tosi* aborde un problème que tout coach a connu (ou connaitra) dans sa carrière : l’angoisse de l’entraîneur mal classé.

Voilà un sujet qui devrait attirer votre attention !
 En effet, que se passe t-il dans la tête du coach qui n’arrive pas à gagner ? 
Comment arrêter cette spirale ?
 Y a t-il un remède miracle ? 
Voilà des questions qui nous ont tous hantés.

Tous les coachs du monde sont passés par là. Celui qui vous raconte qu’il n’a jamais connu ces états d’âmes n’existe pas. Notre équipe est sur une série positive de plusieurs victoires, et patatra ! Tout s’arrête et match après match on descend progressivement vers les bas fonds du classement.

Que pouvez-vous faire ?

L’entourage du club ne vous dit plus bonjour de la même façon, les joueurs vous envoient des signes. Le regard des autres a changé, mais VOUS ? Que pouvez vous faire ?

D’aucuns vous diront : « Ne changez rien, restez vous même et mourez avec vos idées et vos convictions.» D’autres vous diront : « Il faut tout changer ». Zidane et Bettoni avaient décidé de tout changer au Real suite à une série de très mauvais résultats. Le travail, la méthode, le discours et le redressement avait été remarquable…

Je serai plus nuancé et je donnerai dans ces lignes quelques erreurs à ne pas faire. La première, c’est de ne pas montrer son stress sur le banc de touche pendant le match. Pour la simple et bonne raison qu’il y a des remplaçants sur le banc et s’ils vous sentent stressé sur chaque action du genre, « là on va le prendre le but ! Je suis sur que ça va mal se passer, ça je l’avais dit ! »… vous pouvez être sûr que ceux qui vous auront entendu, vont répéter ça à leur coéquipiers. « Le coach, il a 100 De fièvre. »

De même que si vous portez un jugement sur un des joueurs « Lui il commence à m ‘ emmer… ! » vous pouvez être sur que ce sera répété et même déformé. Mais attention, si vous faites la même remarque alors que vous êtes premier avec 10 points d’avance, on dira : « Le coach est un perfectionniste, il est très rigoureux ! »

Mais revenons en à nos coaches en difficultés et en manque de résultats.
 Le football est un des seuls sport au monde où tout s’explique. Imaginons que vous soyez ailier gauche de mon équipe.

Si vous n’êtes pas performant, vous pouvez expliquer que c’est par ce que vous ne jouez pas à votre place.
 C’est par ce que le ballon va toujours à droite et vous ne pouvez pas vous exprimer.

Enfin, c’est tactiquement que ça défaille, et ça bien sûr, comme tout le reste, c’est la faute… au Coach !

Dans tous les moments difficiles de ma carrière (et dieu sait s’il y en a eu !), lorsque j’ai été en difficultés avec les résultats de mon équipe. La seule chose qu’il faut absolument faire c’est de mettre chaque joueur à son poste, les droitiers à droite, les axiaux dans l’axe, les gauchers à gauche. En aucun cas il faut réinventer le football dans ces moments là. Il faut faire simple, une place pour chacun et chacun à sa place.

« Le regard des autres change ? C’est vous qui le croyez…  »

Encore une fois parlons de l’arbitrage, plus le coach contestera l’arbitrage sur le banc, plus les joueurs feront de même, et votre équipe sera moins performante en se cachant derrière des excuses.
 Le plus difficile à gérer, ce sont vos rapports avec l’entourage du club.


Le regard de tout le monde change ?
 Tout au moins c’est ce que vous croyez, car vous êtes en difficultés, donc fragile.
 Vous avez l’impression que tout le monde vous en veut, et qu’on va vous virer.

Rassurez vous ce n’est qu’une impression due à votre mal être intérieur, et ce n’est pas toujours le cas.

D’ailleurs après votre première victoire, vous aurez l’impression que tout va mieux, c’est une sensation humaine, si vous êtes passionné de football.


Là ou vous devez vous faire un peu plus de souci c’est lorsque vous allez lire dans la presse que, malgré les mauvais résultats, votre président vous renouvelle sa confiance. Là vous en avez au maximum pour quinze jours (s’il n’y a pas de résultats derrière cette déclaration).

En effet si votre président vous renouvèle sa confiance c’est qu’à un moment , il l’avait perdu. Commencez à faire vos valises.

« Les coups de pieds arrêtés, c’est de la chirurgie »

Reste le plus important. Souvent les mauvais résultats viennent d’une inefficacité offensive . ( Je vous rassure la défense aussi !)
 Blessures ou peu d’attaquants dans l’effectif… C’est un secteur de jeu très fragile…

Là vous n’avez qu’une façon et une seule de vous en sortir : « Les coups de pieds arrêtés ».
 C’est un des rares moments ou vous pouvez faire monter six joueurs dans la défense adverse. Un entrainement par semaine sur les coups arrêtés ne suffira pas, deux ça sera de l’entretien, mais à partir de 3 entrainements sur les phases arrêtées, vous commencerez à être très performants dans ce domaine.

Votre objectif, avec vos stratégies, sera de faire défendre l’adversaire comme vous le souhaitez. Les coups arrêtés, c’est de la chirurgie qui peret de souder une équipe qui doute et qui est en grande difficulté.

Ah oui, dernière des choses :  si vous voulez être sur de descendre de division et de vous faire remercier, « invectivez la presse, lors de chacune de vos interventions « . Et là vous serez sûr de ne pas manger les papillotes à Noel et vous faire sonner les cloches pour pâques.

*Premier technicien français à avoir entraîné aux Etats-Unis, Noël Tosi a commencé sa carrière sur un banc à l’âge de 27 ans. Passé par Grenoble, Nîmes, Gueugnon, Arles-Avignon, Angers et Cherbourg (entre autres) en France, il a aussi été sélectionneur du Congo et de la Mauritanie.

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