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Avant de rejoindre sa nouvelle équipe, Lenny Martinez est revenu sur les raisons qui l’ont poussé à quitter Groupama-FDJ et sur ses ambitions pour 2025.
Qu’avez-vous envie de retenir de vos années chez Groupama-FDJ ?
C’est là où tout a commencé ! Ce fut un beau passage de ma vie au sein d’une équipe qui a su m’accompagner depuis le début. Pour ça, je leur suis reconnaissant, je leur dois à tous le coureur que je suis devenu. Et je précise que j’ai gardé un bon contact avec tout le monde. Je retiens le suivi quotidien depuis mon arrivée à Besançon, dans la Conti, jusqu’à ces deux dernières années en World Tour, pour franchir tous les échelons. Lorsque je me projette vers l’avenir, je pense à toutes ces années. Et c’est sympa.
Avec le recul, vous attendiez-vous à ce que ça aille aussi vite pour vous ?
Je ne peux pas dire que j’ai été surpris de progresser car j’ai toujours pensé que j’avais des capacités, mais je ne m’attendais pas à être aussi performant sur les courses de World Tour, être en position d’en gagner certaines de très difficiles.
À lireCyclisme : bientôt un maillot qui change de couleurs ?Une victoire vous a-t-elle marqué plus qu’une autre ?
(après un moment de réflexion) Le Trophée Laigueglia (le 28 février 2024, Ndlr) car, à la base, le parcours n’était pas fait pour moi. En plus, je suis allé le chercher au bout du suspense avec deux coureurs d’UAE à mes trousses (Ayuso et Christen) alors que j’étais déjà à fond. La difficulté a rajouté au plaisir de gagner.
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« Pendant deux ans, il a fallu que je m’imprègne de David Gaudu… »
A quoi, à qui devez-vous ces victoires précoces (6 en deux ans) ?
A l’équipe, sans elle, rien n’est possible, à la qualité des entraînements, à chaque membre du staff car chacun a sa part dans chaque victoire, et également à une génétique qui s’avère intéressante. Il faut croire que je suis né avec un bon physique et des capacités qui me permettent de réaliser ce que je réalise sur un vélo.
Depuis vos débuts, avez-vous été traversé par des moments de doute ?
À lireJonas Vingegaard a rendez-vous sur le Mont VentouxIl y en a toujours. Lorsqu’ils arrivent, je me réfugie dans tout ce qui va bien, malgré tout. J’essaie de me souvenir des bons moments, même s’ils datent, et je me dis que si j’ai été capable d’évoluer à un bon niveau, il n’y a aucune raison pour que je ne le retrouve pas. Et, généralement, le problème est réglé, je ne suis pas du style à trop me prendre la tête. Mais le cyclisme n’est pas une science exacte. Parfois, vous vous sentez très fort à l’entraînement, et ça ne donne rien en compétition. Parfois, c’est l’inverse. Mais ça fait partie du jeu, et ces petites claques peuvent être salutaires.
Y-a-t-il un coéquipier qui s’est avéré plus important que les autres dans votre processus de formation ?
(sans hésiter) David Gaudu ! Lorsque je suis arrivé dans le groupe, j’ai beaucoup appris grâce à lui car, à mon niveau, il a fallu que je m’imprègne de lui, de sa manière de se placer, d’aborder les courses, de se préparer. L’observer pendant deux ans, être à son service m’a bien fait évoluer.
Lenny Martinez au bout de son aventure avec la Groupama-FDJ
Aujourd’hui que vous quittez votre équipe formatrice, avez-vous l’impression d’avoir suffisamment appris pour voler de vos propres ailes ?
J’ai encore tellement à apprendre, à mieux gérer tous les petits détails qui font la différence. Stratégiquement, les grands leaders savent ce qu’ils vont faire au départ de chaque course et s’en tiennent généralement à leur tactique, ou sont capables d’en changer en fonction des circonstances. Pour le moment, je fonctionne un peu plus à l’instinct. Je dois une grande part de mes victoires à mon instinct de la course, à ce moment où je sens qu’il faut que je remette une attaque parce que je le sens comme ça.
À lireDans 8 jours Paris-Roubaix, la course crainte, détestée, fantasmée…Votre évolution passe-t-elle par moins d’instinct et plus de stratégie ?
Il est clair que face à des coureurs comme Pogacar, Vingegaard ou Evenepoel, vous ne pouvez pas compter uniquement sur votre instinct. Face à eux, vous subissez souvent, vous êtes sur un fil pour essayer de terminer le plus près d’eux. Donc il faut évidemment autre chose en plus, une équipe prête à collaborer, éventuellement un schéma de course préétabli… Mais ça reste difficile.
En 2024, ça a été presque impossible… n’est-ce pas décourageant parfois ?
Non, au contraire, je prends beaucoup de plaisir à me confronter à des coureurs aussi forts. Je suis loin, très loin d’avoir leur niveau, mais pour le moment quand ils gagnent, je trouve ma satisfaction d’être dans le top 10 à partir du moment où j’ai donné le meilleur de moi-même, parce que sportivement ça vaut certaines victoires où ils ne sont pas. Ce n’est que comme ça que vous pouvez espérer profiter des circonstances pour les devancer un jour.
« Avec Buitrago et Tiberi, deux jeunes coureurs comme moi, nous aurons le potentiel pour faire mal en montagne »
Dans ce contexte, gagner le Tour de France peut-il être un objectif réaliste pour vous ?
Le Tour de France, c’est et ça restera toujours un rêve de gosse, un Graal à atteindre. J’ai conscience aujourd’hui que je suis très très loin d’avoir le niveau suffisant pour prétendre le gagner. Mais je vais tout faire pour me donner les moyens d’être en capacité de le gagner un jour. Et on verra bien où ça me mène.
Avez-vous longtemps hésité avant de quitter Groupama-FDJ ?
À lire30 secteurs pavés sur 259 km de course, bienvenue dans l’enfer de Paris-RoubaixIl y a eu beaucoup de réflexion et ça s’est fait en plusieurs étapes. Je ne doutais pas de mon envie de connaitre autre chose, de découvrir de nouvelles méthodes d’entraînement et une nouvelle approche du métier, à l’étranger en priorité. Dans ma tête, c’était clair. J’aime le changement et je voulais changer ! Une carrière est courte, il faut en profiter. Mais comme plusieurs équipes s’intéressaient à moi, j’ai longtemps hésité.
Qu’est-ce qui a fait la différence en faveur de Bahrain-Victorious ?
Un mélange de pas mal de choses. Groupama-FDJ me proposait aussi un beau projet, mais Bahrain-Victorious me voulait déjà depuis trois ans et j’ai senti cette année chez eux la volonté de répondre à mes attentes. Généralement, quand vous demandez quelque chose à une équipe, on vous dit : ok, on verra… Là, c’était oui tout de suite, sans hésitation. Avec Santiago Buitrago, qui a fait top 10 sur le Tour et la Vuelta, avec Antonio Tiberi, qui a fait top 5 sur le Giro, deux jeunes coureurs comme moi, le jour où on sera au top tous les trois, nous aurons le potentiel pour faire mal en montagne sur les grands Tours.
Lenny Martinez balaie les critiques sur l’argent
Que dites-vous à ceux qui vous ont reproché de privilégier l’aspect financier ?
J’ai lu beaucoup de conneries sur les réseaux sociaux. L’aspect financier n’est pas négligeable, mais il n’est pas non plus prioritaire car mon but n’est pas de faire deux ou trois ans et d’arrêter ensuite, mais d’exister dans la durée au plus haut niveau, sur les dix prochaines années, d’aller au-delà de 30 ans pourquoi pas et de progresser tout le temps. Pour ça, il faut un projet qui tienne la route et qui ne se limite pas à l’aspect financier.
À lireDans 15 jour le Giro : quelle sortie pour Romain Bardet ?Comment vivez-vous l’attente que votre montée en puissance suscite en France pour incarner un possible futur vainqueur du Tour ?
Je vis ça de manière positive, les gens ont de l’espoir. C’est bien. A leur place, je réagirais pareil. Je ne peux que répondre en donnant le maximum sur le vélo, leur dire que je vais faire de mon mieux.
Quelles seront vos priorités en 2025 ?
Une chose est sûre, je vais faire moins d’épreuves françaises, des « petites » classiques et plus de courses World Tour d’une semaine où il est plus difficile de gagner une étape, et où je pense pouvoir mieux me préparer pour les classements généraux des grands Tours. Le but est de franchir un cap en 2025 (il va faire Paris-Nice, le Dauphiné et le Tour de France, Ndlr).
A quoi ressemblerait une année 2025 où vous auriez franchi ce cap ?
À lireTour de France Femmes : Squiban exceptionnel, au tour de Ferrand-PrévotCela peut se mesurer moins en termes de victoires qu’en sensations d’entraînement, en datas, où je veux progresser. C’est important. Un préalable à plus de victoires en fait. Tant que j’aurai l’impression que je progresse, je me sentirai à ma place.
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