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Manager général de l’équipe féline FDJ-Suez, Stephen Delcourt a une grosse saison qui arrive avec le recrutement exceptionnel de Juliette Labous et de Demi Vollering. La FDJ-Suez se place maintenant dans les favoris pour remporter les grandes courses de l’année. Il revient sur les nouvelles ambitions de l’équipe, la nécessité d’envisager ce projet sur le long terme et l’essor du cyclisme féminin.
Quel regard vous portez sur l’évolution de cette équipe ?
Ça fait 20 ans, ça donne un coup de vieux, je fais que de dire qu’on aurait pu mourir 10 fois, sans l’essor du cyclisme féminin notamment grâce aux sponsors. On voulait du long terme. On a explosé sur les dernières années mais il ne faut pas oublier toutes les années d’avant où personne ne croyait en nous, on faisait un top 20, on sortait le champagne. Mais on a travaillé dur, et ça commence à ressembler à quelque chose mais on veut faire plus, et pas s’arrêter là.
« L’ego, elles sont obligées de l’avoir dans ce monde, elles n’ont pas envie qu’on leur dise quoi faire, elles veulent juste écrire l’histoire de leur sport »
Evita Muzic, Juliette Labous et Demi Vollering, est-ce qu’on peut dire que FDJ-Suez est la meilleure équipe du monde ?
À lire30 secteurs pavés sur 259 km de course, bienvenue dans l’enfer de Paris-RoubaixOn verra ça sur les courses, sur les grands tours, on sait ce qu’on doit viser mais il y en a d’autres. Oui on est l’une des meilleures équipes du monde. Il y a sept équipes qui ont fait un recrutement exceptionnel, ça va apporter une concurrence folle et il y a aussi Pauline Ferrand-Prévôt qui va prendre beaucoup de visibilité dans les médias et qui peut être très très forte. Moi j’ai les trois filles que je voulais sur le papier, elles sont exceptionnelles.
Comment on fait pour gérer leur ego et créer une alchimie ?
L’ego, elles sont obligées de l’avoir dans ce monde, elles n’ont pas envie qu’on leur dise quoi faire, elles veulent juste écrire l’histoire de leur sport, elles ont beaucoup d’ambitions. Pour l’instant elles n’ont pas encore couru toutes les trois ensemble mais la mayonnaise prend déjà super bien. On voit que Demi est très humble, elle a beaucoup de savoir-être, on a fait beaucoup d’exercice psychologique. Tous les voyants sont au vert et pareil pour le staff. Le premier dossard à trois sera spécial mais on ne doit surtout pas paniquer si ça ne fonctionne pas directement, le projet est à long terme.
À lireDans 15 jour le Giro : quelle sortie pour Romain Bardet ?Est-ce que tu as eu des doutes sur le fait de réunir trois leaders ensemble ?
Oui, douter c’est avancer, il y a encore beaucoup de doutes et maintenant je suis plus seul, j’ai un staff autour de moi qui m’accompagne. Elles vont lever les doutes toute seule.
Tu trouves que le cyclisme féminin explose et tu en parles beaucoup, c’est important pour toi ce développement ?
Pour moi on est encore un petit sport niche, il ne faut pas s’enflammer, on peut vite retourner où on était. Grâce au Tour de France, on a vu que le cyclisme féminin commence à rentrer dans les moeurs mais c’est tout. Des études montrent que les Français commencent à comprendre qu’il y a un tour de France femme mais impossible de connaître un nom, aucun. Le seul qui vient c’est encore Jeannie Longo. Il y a encore beaucoup de travail. L’histoire des 4 secondes sur le dernier tour avec Demi et cette dernière étape dans l’Alpe d’Huez, cela a beaucoup plu aux gens, mais il faut déjà penser aux performances. Laure Manaudou s’est fait connaître grâce à ses performances avant de devenir une égérie de la natation. Faut pas se relâcher.
« Laissez-nous 10 ans de Tour de France pour qu’on donne envie aux petites filles de faire du vélo »
Il vous manque le tour de France pour passer encore un cap ?
À lireTour de France Femmes : Squiban exceptionnel, au tour de Ferrand-PrévotOui parce qu’on l’a vu quand on a remporté d’autres courses, c’est bien mais ça reste dans le microcosme du vélo. Gagner le tour de France, ça va au-delà. Je l’ai vu quand on a lancé le partenariat avec Nike, ça a dépassé le vélo parce que Nike ça dépasse le vélo et le tour de France c’est la même chose et porter le maillot jaune que l’on n’a jamais porté, gagner des étapes et le tour ça fera passer un cap et il faut pouvoir ensuite répéter cette performance pour faire de ces trois cyclistes qui sont nos leaders aujourd’hui, des grands noms du sport et pas que du cyclisme féminin.
Est-ce que le tour de France c’est la priorité numéro une, plus que les autres grands tours ?
Oui mais si on veut faire un grand tour de France, il faut passer par le fait de gagner des étapes, gagner la Vuelta et gagner le Giro, c’est un passage obligatoire, c’est quasi impossible de rien faire et de rien gagner de la saison et gagner le tour de France par contre c’est possible de briller toute la saison et de rater le tour de France, ça arrive, donc il faut qu’on soit vigilants et c’est pour ça qu’on va essayer gérer au mieux le calendrier des filles, on voit beaucoup de grands noms ne pas faire tous les classiques. Quand on a dit à Demi qu’elle ne ferait pas le Tour des Flandres, ça l’a un peu choquée pendant quelques jours mais nous devons passer par là pour qu’elle arrive en bonne forme au bon moment.
Vous avez souvent dit que vous regrettiez le manque de concurrence en France, comment analysez-vous la situation pour les autres équipes françaises et le cyclisme français en général ?
À lireBernard Thévenet : « Bientôt une équipe chinoise sur le Tour de France ? »Les autres équipes travaillent bien mais nos vrais concurrents ce sont les équipes étrangères mais le cyclisme féminin français progresse bien avec Juliette et Evita qui sont dans le top 10. Laissez-nous 10 ans de Tour de France, qu’on donne envie aux petites filles de faire du vélo, c’est du long terme. C’était impensable avant pour les filles de vivre du vélo donc il faut être patient.