En fin de contrat dans un an, le champion du monde tricolore doit maintenant s’accrocher à de nouveaux rêves et de nouveaux objectifs. Mais peut-il faire du Tour de France son ambition en restant chez Deceuninck-Quick Step ?
En décrochant le maillot arc-en-ciel le 27 septembre, Julian Alaphilippe a écrit l’une des plus belles pages du sport français. A 28 ans, le Tricolore continue de repousser ses limites. Au point que tout le monde lui souhaite maintenant de viser le maillot jaune du Tour de France et de tenter sa chance pour la victoire finale. Seulement, le natif de Saint-Amand-Montrond n’a pas l’air décidé de franchir le pas. Il suffit de voir à quel point sa victoire sur les derniers championnats du monde sur route était au-delà de ses espérances.
“Ça a toujours été la course de mes rêves, j’ai toujours placé le Mondial au-dessus du reste, de toutes les autres courses que j’ai déjà pu gagner ou que je voulais gagner, comme les classiques, les Monuments ou même le maillot jaune du Tour, expliquait-il en toute sincérité. J’ai connu des émotions différentes à chaque fois, des moments incroyables, mais là tout est différent. C’est le rêve de ma carrière qui se réalise.” Il est vrai que pour se projeter et vouloir remporter un Grand Tour comme le Tour de France, il faut s’en donner les moyens et s’en convaincre.
Ancien coéquipier de Cadel Evans lors de sa victoire sur le Tour 2011, Amaël Moinard pense que Julian Alaphilippe possède lui seul la réponse sur l’orientation qu’il souhaite donner à sa carrière. “Quand on joue la gagne à chaque course et notamment tous les Monuments, c’est compliqué de jouer plus haut. Si on parle du classement général du Tour de France, en a-t-il envie ? Cela va-t-il être un objectif et changer sa préparation ? En est-il capable ? C’est peut-être surtout une attente médiatique plus qu’une volonté de lui-même.”
Et en restant chez Deceuninck-Quick Step pourra-t-il atteindre le nirvana d’une victoire sur le Tour de France avec une préparation spécifique ? “On parle du Tour de France, analyse Moinard. Il est déjà dans une équipe solide. Peut-être pas assez pour contrôler une course. Il se posera peut-être la question assez rapidement. Il aurait pu déjà remporter le Tour de France. A trois jours près… Maintenant, reste à savoir si son approche de l’évènement ou celle de son équipe sera différente. Dans toute sa préparation, il n’y aura pas de problème étant donné qu’il vit en Andorre, donc en altitude. Ce sera surtout la préparation de l’équipe qui l’entoure et qui l’accompagne qui devra être différente.” Dans son histoire, la formation belge n’a jamais remporté le moindre Grand Tour. Ses meilleurs résultats étant la deuxième place de Rigoberto Uran sur le Tour d’Italie en 2014 et d’Enric Mas sur la Vuelta en 2018. Deceuninck-Quick étant surtout une formation en quête de victoires d’étapes et de succès sur les courses d’un jour. Même, si cette saison, Sam Bennett a pu ramener le maillot vert sur les Champs-Élysées. A voir si la donne changera après le Giro qui a vu le Portugais Joao Almeida (22 ans) porter le rose quasiment toute l’épreuve et donc l’équipe de Patrick Lefevere devoir assumer le statut qui va avec.
De son propre avis, Julian Alaphilippe ne se sent pas “être capable un jour” de viser la victoire finale sur le Tour de France. Il est plus focalisé sur des courses d’un jour comme Liège-Bastogne-Liège ou encore le Tour de Lombardie. “Aujourd’hui, une chose est sûre : je ne suis pas du tout dans l’optique d’axer toute ma saison sur le Tour de France. Je ne me vois pas rester concentré pendant trois semaines, changer ma préparation au risque d’altérer mes qualités de puncheur. Si c’était le cas, je perdrais ce qui me fait gagner aujourd’hui.”
Alaphilippe sous contrat jusqu’en 2021
Un risque qu’il n’est pas prêt à assumer encore maintenant avec le titre de champion du monde. “Ce n’est toujours pas d’actualité. Ces derniers temps, mon objectif était de décrocher le maillot arc-en-ciel, je veux prendre maintenant le temps de comprendre ce qui m’arrive, c’est tellement difficile de décrire ce que je ressens en ce moment.” Il est encore trop tôt pour penser aux objectifs de Julian Alaphilippe à l’avenir. Surtout qu’il parait peu enclin à changer de stratégie.
Même si beaucoup aimeraient le voir tenter sa chance pour prendre la succession de Bernard Hinault, le dernier vainqueur du Tour en 1985, il a déjà démontré qu’il était un coureur capable des plus grands exploits. A croire que le coureur tricolore est loin d’a-voir encore livré toute sa légende sur son vélo. Il a déjà tutoyé les sommets à plusieurs reprises dans sa carrière et le titre mondial devrait lui fournir une nouvelle source de motivation pour se surpasser. Et si Alaphilippe n’avait pas fini de nous surprendre, chez la Deceuninck ou ailleurs (ce ne sont pas les offres qui vont manquer, en France ou à l’étranger) ? Le Tour de France ne demande qu’à pouvoir encore vibrer à ses exploits. Son cousin et entraîneur Franck Alaphilippe en est convaincu : “Peut-être que dans le futur Julian essaiera de gagner le Tour. Après, dire qu’il le gagnera, je ne peux l’affirmer. Mais qu’il essaie vraiment c’est possible. (…) Ce serait possible qu’il aille au bout, mais évidemment en fonction aussi des étapes proposées. Cela pourrait même se faire, pourquoi pas, avec son équipe actuelle. Ce n’est pas pour l’instant dans les projets. Mais cela pourrait le devenir…”