Mathieu Sauvajot*, membre de l’Observatoire du Sport, nous livre son analyse du fiasco du PSG à Madrid et donne des solutions.
Que diront-nous du PSG version 2021/2022 quand nous en parlerons dans quelques années ? Allons-nous vanter l’effectif galactique dont il disposait ? Se souvenir avec nostalgie du trio offensif Mbappé-Neymar-Messi ? Peu probable.
Paradoxalement, si cette année le PSG disposait du meilleur effectif de son histoire, du moins sur le papier, la défaite contre le Real Madrid restera dans tous les esprits comme un des plus grands échecs de l’ère qatarie.
Un changement de modèle est nécessaire
Bien entendu, qui dit échec, dit responsables. Certains chercheront du côté des joueurs, et accuseront Donnarumma, qui n’était vraisemblablement pas dans son match, d’autres diront, sans doute à raison, que Pochettino n’a jamais été en mesure de prendre le club en main, de lui insuffler une véritable identité de jeu, mais au final, le véritable problème se situe davantage du côté de la direction, et un changement de modèle est désormais nécessaire.
Racheté en 2011, avec pour objectif non dissimulé de devenir un grand d’Europe, le PSG partait avec une sérieuse longueur de retard sur ses concurrents. Particulièrement jeune (1970) pour un club de football, et disposant d’un palmarès très modeste, tant sur la scène nationale qu’internationale, le club parisien a dû donner la priorité au marketing, et développer son image à travers celle de ses joueurs.
Le recrutement de stars telles qu’Ibrahimovic, Neymar ou Messi n’a pas eu lieu uniquement dans une optique sportive, mais bien médiatique, dans la mesure où si l’on s’intéresse à leurs performances sur les réseaux sociaux, on constate qu’il s’agit de véritables brand players dont la notoriété est supérieure à celle de leurs clubs, où qu’ils évoluent.
Le PSG fait exactement l’inverse de Manchester City
Si cette stratégie s’est avérée efficace dans un premier temps – le PSG est désormais le 4ème club au monde comptant le plus d’abonnés – elle a ses limites. Cela implique une gestion particulièrement complexe, où l’ouvrier devient plus important que le manager, mais a également pour effet de devoir sacrifier le projet sportif, au moins durant la période de développement.
Toutefois, si l’on prend pour exemple Manchester City, on constate que la stratégie inverse a été adoptée. Le club mancunien dispose de très bons joueurs, mais d’aucune star, d’aucun candidat au ballon d’or. Sa renommée repose sur ses performances et non quelques brand players.
Toutefois, cette approche a été possible dans la mesure où les Citizens disposaient d’entrée d’un double avantage :
Premièrement, évoluer dans un championnat aux revenus conséquents (grâce aux droits de retransmission notamment), permettant ainsi des dépenses élevées tout en respectant le fair-play financier.
Deuxièmement, le fait de disposer d’un rival au sein de la même ville, Manchester United. La possibilité d’un derby de haut niveau a également contribué à développer naturellement l’image, et par conséquent les finances du club.
Après le marketing, le PSG doit se recentrer sur le sportif
Pour en revenir au club parisien, on peut désormais affirmer que les objectifs marketing ont été atteints, et qu’il est temps de se recentrer sur le sportif. Le développement du centre de Poissy va dans ce sens, dans la mesure où il accentue la volonté du club d’être en mesure de former de jeunes joueurs compétitifs, au lieu d’avoir besoin d’aller les chercher dans d’autres clubs, mais ce n’est qu’un élément parmi d’autres.
Il est dorénavant nécessaire de mettre en place une véritable identité de jeu, qui tend à manquer aux clubs suivant un modèle « galactique », mais également une continuité sportive et une réelle stabilité managériale.
*Titulaire d’un Master de la Sorbonne, spécialisé dans les questions relatives à l’Amérique latine, Mathieu Sauvajot a d’abord rédigé des articles traitant de la géopolitique et de l’économie de ce continent, avant de se tourner vers le domaine du sport. Désormais, il est membre de l’Observatoire du Sport Business.