samedi 25 janvier 2025

Cyclisme : les patrons des équipes françaises dévoilent leurs ambitions

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Frédéric Denat
Frédéric Denat
Journaliste

Six équipes françaises sont au départ de cette saison 2022, trois en World Tour (AG2R Citroën, Cofidis et Groupama-FDJ) et trois en Pro Tour (Arkéa Samsic, B&B Hotels p/b KTM et TotalEnergies). Leurs managers nous livrent leurs ambitions.

VINCENT LAVENU (AG2R CITROËN) : « Gagner un Monument »

« Après avoir réussi une belle année, avec une victoire dans les trois grands Tours (O’Connor sur le Tour, Vendrame au Giro et Champoussin dans la Vuelta), une 4ème place au général du Tour de France, une 3ème place au Championnat d’Europe, la victoire sur la Bretagne Classic (Cosnefroy), l’avènement de Godon (vainqueur de la Coupe de France), le maillot de meilleur grimpeur au Giro (Bouchard), notre huitième place au classement UCI démontre que nous avons été présents toute la saison sur tous les terrains, de la première course de l’année (victoire de Paret-Peintre à La Marseillaise) à la dernière (victoire de Dewulf dans les Boucles de l’Aulne).

Désormais, notre ambition pour 2022 est de faire au moins aussi bien. Nous avons le potentiel pour grappiller quelques places au classement des équipes autour de la 6ème ou 7ème place.

Cela voudrait dire que nous avons confirmé en remportant des courses significatives, notamment un Monument puisqu’il s’agissait d’un objectif de 2021 que nous reportons à 2022. Avec Jungels, qui retrouve son niveau physique, ou Van Avermaet, nous avons des garçons qui ont déjà montré qu’ils étaient capables de gagner. »

« Pogacar est installé pour un moment… »

« Pogacar me parait bien installé au sommet du cyclisme mondial pour un bon moment car il est au-dessus du lot. Je le vois donc gagner encore quelques Tours de France. Bernal l’a déjà fait, y a ajouté un Giro, serat-il capable de revenir sur le Tour en le gagnant… ?

Beaucoup d’autres jeunes coureurs arrivent avec l’envie de tout casser, et tous ne pourront pas gagner, certains ne seront que des étoiles filantes. Dans un peloton qui se rajeunit et où les équipes misent de plus en plus tôt sur des jeunes en pleine formation, nous n’avons pas cherché chez AG2R Citroën à changer notre méthode.

On reste sur un modèle de fonctionnement qui a fait ses preuves et qui repose d’abord sur un double projet sportif et universitaire avant de permettre aux meilleurs espoirs de s’exprimer avec les pros.

C’est comme ça que nous avons donné leur chance à des Bardet, Peters, Cosnefroy ou Paret-Peintre. C’est en remettant les compteurs à zéro comme l’ont fait leurs prédécesseurs que devront faire les Champoussin, les Raugel, Pareira ou ParetPeintre (Valentin).

Parce qu’il a déjà prouvé des choses, Champoussin sera peut-être plus exposé médiatiquement, mais on ne lui mettra pas de pression supplémentaire. On sait qu’il doit encore progresser, mais que son fond de jeu lui permet déjà d’avoir des prétentions dans beaucoup de domaines et de courses. »

MARC MADIOT (GROUPAMA FDJ) : « Avec Pinot et Gaudu… être dans le match pour la gagne »

« J’accorde évidemment beaucoup d’importance à toutes les courses, toutes les Classiques, les épreuves françaises, mais le Tour de France demeure, encore et toujours, notre priorité. Le Tour est la clé de tout dans le cyclisme actuel.

On doit donc tout faire pour y être visible et compétitif. Donc après avoir été 2ème, on aspire forcément à la première place, même si ça peut paraitre un peu prétentieux vu le niveau des prétendants. Mais quand vous avez un Pinot ou un Gaudu dans votre équipe, vous ne pouvez pas faire autrement que de viser la gagne, au moins espérer être dans le match le plus longtemps possible. »

« Etre performant sur le Tour »

« Je n’aime pas faire de pronostics, ni juger ce qui peut se passer dans d’autres équipes. Chacun fait avec ses moyens et ses ambitions. Nous continuons chez Groupama FDJ à construire notre projet avec un certain savoir-faire et une grande stabilité dans notre effectif.

Même si nous avions d’autres moyens financiers, il n’est pas certain qu’on fonctionne autrement. Le but est d’être armé pour être compétitif toute la saison, dans un maximum d’épreuves.

Que le Tour concentre autant d’attention, en raison de son énorme couverture médiatique, démontre quelque part la grande précarité de notre sport, dépendant d’une seule épreuve aussi belle soit-elle. Mais le vélo n’est pas le seul sport dans ce cas.

Dans le football, si le PSG ne gagne pas la Ligue des Champions, sa saison ne sera pas réussie même s’il gagne le championnat et la Coupe de France. Plus qu’un pronostic, si j’avais un voeu à faire pour 2022 ce serait d’être performant sur le Tour. »

EMMANUEL HUBERT (ARKÉA SAMSIC) : « La roue va finir par tourner
dans le bon sens »

« Notre recrutement intervient sur une base d’effectif très intéressante qui nous a permis de gagner à dix reprises et de s’installer parmi les meilleures équipes de Pro Tour, en tout cas celles qui gagnent.

Et encore, sans une certaine forme de malchance, on peut estimer que nos nombreuses 2èmes places (16), notamment celles de Nacer Bouhanni, pouvaient se transformer en succès, ce sera notre ambition première en 2022. Car la roue finira bien par tourner dans le bon sens pour Nacer.

On compte sur une de nos recrues principales, Hugo Hofstetter pour ça, mais aussi sur le retour rapide en meilleure forme de Warren (Barguil) après ses soucis de fin de saison. Le bilan de la saison passée, notre recrutement et notre potentiel peuvent nous laisser espérer gagner beaucoup plus que dix courses.

Cela va aussi dépendre de statut, du sort de Qhubeka NextHash. Si l’équipe venait à disparaitre, cela nous permettrait, dans la mesure où on a terminé deuxième de Pro Tour, d’être en pole pour bénéficier d’un calendrier plus favorable et d’une présence plus affirmée en World Tour. Pour la sérénité de notre programmation, pour le prestige et la motivation de nos coureurs, ça peut tout changer (Qhubeka n’a pas été enregistrée par l’UCI, donc Arkéa Samsic sera invitée sur les trois grands Tours notamment, Ndlr). »

« Seul Bernal peut battre Pogacar »

« A l’instar des Pogacar, Bernal, Van Aert, Van der Poel… les jeunes ont déjà beaucoup gagné et se demander s’ils peuvent continuer à gagner n’a pas beaucoup de sens car ils ont déjà, en peu de temps, tous construit de sacrés palmarès. Ils brillent partout, sur quasiment tous les terrains, et sont impressionnants.

Pour le Tour, il sera encore très compliqué de venir inquiéter Pogacar, le seul qui m’en parait capable est un Bernal à 100% de ses moyens. De notre côté, chez Arkéa Samsic, avec Bouhanni, Barguil et Quintana, nous avons un beau trio, complété par des jeunes qui ont gagné en maturité, comme Riou ou Louvel, avec Swift, Edet et le renfort de Hofstetter, nous avons pas mal d’éléments capables de gagner. Je suis confiant pour 2022. »

JEAN-RENÉ BERNAUDEAU (TOTALENERGIES) : « On attend deux victoires de prestige »

« Notre recrutement change beaucoup de choses pour nous et nous permet d’avoir davantage d’objectifs bien précis car l’arrivée de Peter Sagan, mais aussi de Bodnar dans le final, va nous amener, je l’espère, une nouvelle dynamique à un groupe déjà solide et qui méritait mieux la saison passée, notamment en ce qui concerne Turgis et BoassonHagen.

On attend clairement deux victoires de prestige dans les grandes classiques d’un jour. Dans le Tour de France, on jouera les victoires d’étapes. Peter me parle beaucoup d’une épreuve qui lui a beaucoup apporté et où il a à coeur de briller encore.

Il était bien au départ de Bretagne avant sa chute, il reviendra avec beaucoup de motivation et d’ambition en 2022 pour aller chercher un maximum d’étapes. »

« Pinot en a encore les moyens »

« Je ne me prononce pas sur les classements généraux, savoir qui va gagner le Tour ou les monuments, faire des pronostics ne m’intéresse pas… Par contre, je tiens à dire que j’ai beaucoup apprécié la saison passée le côté anti-conformiste des Van Aert, Van der Poel et Alaphilippe, leur façon de courir à l’instinct qui génère énormément d’émotions et de spectacle.

Peter (Sagan) a toujours été sur ce registre également et c’est aussi pour ça que je suis fier de l’avoir dans mon équipe. Côté Français, il faut être très prudent. Pour le moment, je français, Pinot, a le potentiel pour espérer être sur le podium du Tour, à condition qu’il soit à 100% de ses moyens.

Tous les autres sont un cran en dessous. Pour évoluer, à l’image de ce qu’a pu faire en son temps un Thomas Voeckler pour décomplexer la jeune considère qu’un seul coureur génération en lui disant : « Ce n’est pas impossible, vous pouvez le faire ! » j’ai envie qu’un Pinot joue le même rôle avec les jeunes d’aujourd’hui. Je sais qu’il en a encore les moyens. »

CÉDRIC VASSEUR (COFIDIS) : « Prêts à aller chercher la gagne ! »

« Parce que notre effectif a longtemps été composé de coureurs inexpérimentés au plus haut niveau, du fait de notre arrivée tardive dans le World Tour, notre recrutement a été ciblé sur des profils de coureurs habitués aux plus grandes épreuves.

Nous avons renforcé notre force de frappe et on espère bien exister davantage dans un maximum de courses, avec Coquard, Izagirre, Thomas, Bidard, Kreder, Renard, Cimolai… pour un programme qui permettra à Guillaume Martin et Ion Izagirre de se partager les tâches avant de se retrouver sur le Tour de France où on aura l’ambition, et les moyens, d’exister le plus souvent et le plus longtemps possible.

Nous avons des armes pour exister dans le contrela-montre de 13 km de Copenhague, les pavés du Nord, dans la transition pleine de turbulences avec du vent et des bordures, autant que quand la route va s’élever avec Martin et Izagirre. Notre volonté est de sécuriser très vite l’équipe qui fera le Tour, en espérant que chacun l’abordera à son meilleur niveau, ce qui n’est jamais une certitude.

Nous sommes prêts à aller chercher la gagne après être passés près avec Laporte et Herrada ces deux dernières années En terminant à la 14ème place du classement UCI, Cofidis a fait une bonne saison, d’une manière collective. Je reste persuadé que nous aurions pu faire mieux, et d’autant plus motivé à l’idée d’élever notre niveau en 2022. On poursuit notre trajectoire ascendante, une progression qui ne s’est pas interrompue en 2021. »

« On attend forcément beaucoup d’Evenepoel »

« Il est toujours difficile de faire des pronostics, mais il faut s’attendre à ce que Pogacar soit le grand favori pour le Tour, à la lutte avec Roglic. Van Aert et Van der Poel seront devant aussi…

Pour les confirmations, on devrait retrouver Vingegaard et on attend beaucoup d’Evenepoel comme chaque année, forcément. Pour les sprints, il y aura un beau match entre Merlier, Cavendish, s’il veut aller chercher le record d’Eddy Merckx, Nizzolo et, de notre côté, j’espère un retour au plus haut niveau de Coquard, ainsi que de Guillaume Martin dans un autre registre.

Pour les Classiques, beaucoup plus incertaines, derrière les favoris habituels, il y a beaucoup de possibilités avec Alaphilippe évidemment pour les Français, et Cosnefroy, une valeur sûre. Chez Cofidis, nous attendons la confirmation de Consonni, Izagirre ou Walscheid… des coureurs qui ne sont pas le top 50, mais qui ont largement le potentiel pour s’inviter parmi les meilleurs. »

JÉRÔME PINEAU (B&B HOTELS P/B KTM) « Gougeard pourrait être le Bonnamour de 2022 »

« Avec une équipe renouvelée par huit changements, nous repartons avec le même souci de progression, comme chaque année, avec un adn qui nous pousse à accompagner et faire émerger des jeunes talents. Si nous n’avons pas gagné autant qu’on l’aurait souhaité en 2021, notre régularité jusqu’au bout de la saison témoigne d’une vraie évolution de l’équipe.

Ce qui nous permet d’espérer répondre présent sur les grands rendez-vous en 2022 et surtout d’y être performants. Vu le contexte pandémique, sans faire partie des équipes World Tour, en dépendant des invitations.

Il est difficile d’avoir des objectifs très précis, mais il est évident qu’avec des jeunes aussi prometteurs que Boileau, Chevalier ou Bonnamour, lequel a envie de prendre des responsabilités et d’être investi d’un rôle de leader qu’il aura sur certaines courses, nous visons les épreuves de la Coupe de France, où on n’a pas été très brillants jusqu’à présent, Paris-Nice, le Dauphiné, les classiques bretonnes, les Ardennaises.

Nous serons également présents sur le front belge avec les classiques et semi-classiques Flandriennes qui tiennent particulièrement à coeur de Jordi Warlop. Je n’oublie pas Alexis Gougeard qui pourrait être le Bonnamour de 2022. »

« On pensait Bernal parti pour dominer… »

« La nouvelle génération est sans complexes et je ne vois pas pourquoi elle ne s’inscrirait pas dans le temps même si l’évolution du cyclisme tend à faire émerger de plus en plus de nouveaux talents de plus en plus tôt.

Alors qu’on pensait Bernal parti pour dominer son temps, Pogacar est arrivé, lui-même challengé par Vingegaard et d’autres qui frappent à la porte encore…

Rien n’est acquis pour personne, ce n’est qu’une question de travail et de remise en cause. En France, nous avons une belle génération dans le sillage de Champoussin qui promet beaucoup, Cosnefroy qui n’est pas si âgé, Gaudu qui a montré de belles choses… il faut être patient et faire confiance au travail de qualité réalisé par les équipes françaises. »

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