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Cyclisme : pourquoi les Français partent à l’étranger ?

Réfléchir à la meilleure manière d’empêcher nos meilleurs coureurs de rejoindre des équipes étrangères, c’est surtout se (ou leur) demander, ce qu’ils vont chercher ailleurs. Cette saison, ils sont 25 à avoir effectué ce choix, 15 en World Tour et 10 en Pro Team.

« Si Visma Lease a Bike s’intéresse demain à un de mes jeunes coureurs, je ne sais pas si je serai en capacité de m’aligner dessus… » S’il y a plusieurs raisons qui poussent un coureur français à quitter son pays pour exercer son métier, l’aspect économique apparait évidemment primordial qui place Marc Madiot dans l’incertitude. « Car, en raison des charges qui pèsent sur les salaires, il y a un écart énorme entre ce que nous coûte un coureur en France et ce qu’il coûte à une équipe étrangère, et je ne parle même pas des budgets illimités de certaines… C’est comme au foot ! »

Est-ce que cet incontestable déficit financier, qui pousse aujourd’hui les instances à réfléchir à l’instauration d’une sorte de budget cap à l’horizon 2026, est pour autant à l’origine de la fuite de nos talents ?

« Lorsque je suis parti chez RadioShack en 2012, je savais que j’allais gagner moins qu’en restant en France, nous dit Tony Galopin. Sauf qu’à 24 ans, j’avais envie de découvrir une nouvelle culture, apprendre l’anglais. Il s’agissait d’une opportunité, je l’ai saisie sans arrières pensées financières. » Le discours était à peu près le même concernant les envies d’ailleurs manifestées par Christophe Laporte ou Romain Bardet, deux de nos meilleurs éléments, vers Jumbo-Visma et DSM en 2021 et 2022.

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« Chacun fait en fonction de son parcours et de son caractère, poursuit Gallopin, mais partir à l’étranger pour un Français c’est surtout se confronter à l’inconnue, sortir de sa zone de confort, et espérer en tirer bénéfice pour sa progression. Il en est de même de certains coureurs étrangers qui viennent en France… »

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« Pour le moment, les meilleurs, ou ceux qui représentent l’avenir du cyclisme français, sont en France »

Ou de Français qui restent à l’étranger, à l’instar de Rémi Cavagna, passé de la Belgique (Soudal-Quick Step) à l’Espagne (Movistar) cette saison sans jamais avoir roulé pour une équipe française. Ou de Julian Alaphilippe que les managers français rêvent de se payer… sans en avoir forcément les moyens.

« La hiérarchie fait partie du sport, relativise Tony Gallopin, aujourd’hui dans le staff de Lotto Dstny. Sportivement, les meilleures équipes françaises n’ont rien à envier aux meilleures du World Tour. Depuis qu’il a quitté AG2R, Bardet n’est pas meilleur chez DSM, et je ne suis pas certain qu’elles seraient plus attractives dans un système de budgets plafonnés. »

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Après tout, le système actuel n’a pas empêché TotalEnergies de se payer Peter Sagan, Arkéa Samsic de recruter Nairo Quintana ou de rapatrier Florian Sénéchal de chez Soudal-Quick Step, ou Arnaud Démare de Groupama-FDJ, Decathlon AG2R La Mondiale de sortir Sam Bennett de BORA-hansgrohe tout en s’offrant Victor Lafay.

« Pour le moment, à l’exception de ceux qui sont partis, mais qui représentent plus le passé que l’avenir, les meilleurs ou ceux qui vont faire le cyclisme français de demain, sont en France » souligne, à raison, Gallopin. La question est donc de savoir maintenant si les leviers qui agitent les Grégoire, Martinez, Vauquelin, Champoussin, Madouas ou Penhoët seront les mêmes que ceux qui ont toujours maintenu Alaphilippe en dehors de l’Hexagone, ou ceux qui ont poussé Laporte, Bardet et Barguil à s’en extraire.

A condition qu’ils ne puissent pas rivaliser ou supplanter les stars du peloton, financièrement intouchables pour les équipes françaises, la question va rapidement se poser pour eux aussi.

Préfèreront-ils être leaders en France qu’équipiers à l’étranger ? Tel est aussi le sens de la réforme souhaitée par le président Lappartient qui estime « qu’on a tous intérêt à ce que le n°3 mondial ne soit pas équipier du n°1… » donc qu’un Grégoire ou un Martinez ne quitte pas un jour Groupama-FDJ pour se mettre au service de Pogacar ou d’Evenepoel comma Laporte l’a fait en réussissant tout de même à sortir de l’ombre de Vingegaard et de Van Aert.

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D’ici là, il n’y a plus qu’à espérer que dans le sillage de Decathlon, d’autres nouveaux partenaires offrent aux cinq équipes françaises professionnelles les moyens de conserver leurs meilleurs éléments. Rien n’est moins évident.



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