Les équipes professionnelles sont toujours à la recherche de la dernière pépite capable d’aller chercher les plus grandes victoires. A l’image de Evenepoel, Simmons ou Uijtdebroeks, la précocité ne fait plus peur pour recruter.
Encore inimaginable par le passé, les équipes professionnelles ne craignent plus d’offrir des contrats à des coureurs de plus en plus jeunes, voire encore adolescents. Le dernier exemple en date reste celui de Sente Sentjens. A 17 ans, le fils de l’ancien coureur néerlandais, Roy Sentjens (Rabobank, Silence-Lotto, Milram), vainqueur de Kuurne-Bruxelles-Kuurne, s’est engagé avec Alpecin-Deceuninck pour les deux prochaines années dès 2024 alors qu’il n’a pas encore 18 ans. Et au moment d’officialiser sa signature, Sente Sentjens avouait même que les contacts ne dataient pas d’hier.
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« Alpecin-Deceuninck avait déjà manifesté son intérêt pour moi il y a un peu plus d’un an, et lors d’une première conversation, j’avais immédiatement ressenti beaucoup de confiance. Il n’y avait donc plus beaucoup de doute. » Devenu l’un des meilleurs Juniors cette saison, le jeune coureur est déjà tourné vers 2024 et peaufine déjà sa préparation. Egalement suivi par Soudal-Quick Step, c’est finalement la formation de Mathieu van der Poel qui a su séduire le nouveau prodige néerlandais. De quoi laisser un goût amer à Patrick Lefevere.
Les grosses écuries misent beaucoup sur les jeunes
« C’est une tendance qui ne cesse de croître dans le cyclisme, la chasse aux meilleurs juniors, expliquait-il en avril dans la presse belge. Toutes les équipes participent, y compris nous. Tout le monde cherche le nouveau Tadej Pogacar, le nouveau Remco Evenepoel ou le nouveau Ayuso. Mais on parle d’enfants. » Agent de coureurs et notamment de Bryan Coquard, Philippe Raimbaud est un témoin privilégié de l’évolution des mentalités sur les Juniors qui arrivent de plus en plus tôt dans le monde du cyclisme professionnel.
« On semble être passé d’un sport de maturité à la recherche éfrennée de la précocité. On est passé d’une extrême à l’autre. Et on veut faire une règle à partir de coureurs d’exception. » Pour lui, il est évident que le talent de certains jeunes coureurs est venu bousculer la donne. Cependant, il espère que cela ne va pas éteindre des carrières dès le départ.
« Nous verrons dans quelques années si tout cela est bien sérieux et durable. Il y aura probablement des coureurs pour lesquels cela servira d’accélérateur, mais nous aurons sans doute aussi de plus en plus d’» ex-pros » d’à peine 22 ans… Les agents ne font que suivre le mouvement. Et beaucoup de jeunes juniors ont déjà un conseil auprès d’eux. »
« Les carrières seront de plus en plus courtes »
Coureur de la TotalEnergies, Alexis Vuillermoz avait tout de suite été aligné sur les plus grandes courses à ses débuts. Mais il avait 25 ans… « C’était atypique à mes débuts de voir un néo-pro aller sur les plus grandes courses. On pensait avoir une progression sur plusieurs années. Maintenant, c’est courant. »
Avant de confirmer que, dans le peloton, cette précocité fait parler et inquiète, même les plus grands coureurs. « Dans le peloton, on en parle. On en a discuté notamment avec Peter Sagan. Il le pense. Pour lui, les carrières des jeunes coureurs seront de plus en plus courtes à l’avenir. C’est une probabilité car on ne va pas se mentir. Une carrière, c’est usant physiquement. On voit qu’il y a de plus en plus de chutes. »
« Les corps sont traumatisés par le haut niveau. Puis il faut gérer la pression. Même si l’équipe ne la met pas, elle est induite par l’évènement, l’entourage et les médias. C’est usant de devoir toujours répondre aux attentes. Ce n’est pas toujours évident quand on est jeune. Une saison dure 10 mois. Et le répéter pendant plusieurs années, c’est compliqué voire impossible. »
Le cyclisme mieux organisé pour protéger les pépites
Jeune espoir du cyclisme portugais, André Domingues n’a que 19 ans quand il obtient son premier contrat professionnel dans l’équipe Continental Kelly-inoutbuild-UD Oliveirense. Rapidement recruté par Burgos-BH, en ProTour, à 20 ans, il estime cependant que l’évolution du sport et du vélo permet de protéger les jeunes coureurs.
« Je crois que les cyclistes peuvent et doivent monter en Protour juste après le niveau Juniors. Je trouve qu’aujourd’hui les athlètes sont accompagnés dès leur plus jeune âge par des professionnels spécialisés et compétents, mais aussi par les avancées scientifiques et technologiques. Les jeunes coureurs sont également naturellement avantagés par rapport aux générations passées et développent donc plus tôt des capacités et un haut niveau de performances qui leur permettent de passer au Protour et de sauter quelques étapes dans leurs carrières. »
Aux jeunes Français de l’équipe de France Juniors comme Paul Seixas, Arthur Blaise, Maxime Decomble ou encore Matys Grisel de montrer qu’ils sont aussi capables d’aller plus vite que la musique.