dimanche 19 janvier 2025

Droits télé, salary cap, partenariat… Après le Tour de France, les mots forts du président de Cofidis

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Arnaud Bertrande
Arnaud Bertrande
Rédacteur en chef — Pole Sport Lafont presse

Président de Cofidis Compétition, Thierry Vittu avait le sourire au sortir du Tour de France après les deux victoires d’étapes de Victor Lafay et Ion Izagirre. La malédiction est enfin brisée.

Deux victoires d’étapes sur le Tour de France, ça valait le coup d’attendre toutes ces années (l’équipe n’y avait plus gagné depuis les succès de Samuel Dumoulin et Sylvain Chavanel en 2008, Ndlr) !

Ce serait arrivé plus tôt, ça aurait été aussi bien ! (sourire) Mais oui, effectivement, ça fait plaisir de renouer avec la victoire sur le Tour de France. Les deux victoires de Victor Lafay et Ion Izagirre nous font énormément de bien. L’objectif au départ du Tour, c’était une victoire d’étape et un bon général. Les objectifs sont atteints voire dépassés.

Guillaume Martin est régulier, mais n’y a-t-il pas une petite déception car il ne gagne pas beaucoup ?

La stratégie avec Guillaume, est qu’il fasse un bon classement au général. Mais l’un n’empêche pas l’autre, il est toujours possible de gagner une étape et de faire un bon général. C’est quelqu’un de régulier, deux fois dans le top 10 du Tour (8ème en 2021, 10ème en 2023, Ndlr) deux fois meilleur Français, et on mise là-dessus.

Ces deux victoires prouvent qu’on peut être chez Cofidis et gagner !

Si Cofidis s’investit depuis 26 ans dans le cyclisme, ce n’est pas uniquement pour participer et briller sur les routes du Tour de France. On avait d’ailleurs déjà gagné à 11 reprises cette année avant ces victoires et on va continuer ! L’année dernière, on en avait gagné 19 et on était 10ème équipe mondiale sans avoir gagné sur le Tour. Il ne faut pas analyser les performances uniquement au travers du Tour de France. Si on est encore dans le cyclisme, c’est bien parce qu’on vise une présence tout au long de l’année, de janvier à octobre.

Sans succès sur le Tour depuis 2008 n’avez-vous jamais songé à un moment à arrêter votre investissement dans le cyclisme ?

Jamais ! L’investissement de Cofidis ne s’appuie pas uniquement sur la performance sportive. La marque est présente dans neuf pays en Europe et quand par exemple on participe au Tour de Pologne c’est hyper important pour Cofidis Pologne. C’est important aussi d’être présent en Slovaquie, en Espagne, au Portugal, en Italie, dans tous les pays où la marque est présente, même si, évidemment, une victoire sur le Tour de France a une résonnance mondiale.

« Il n’est pas question d’avoir un partenaire !»

La mode est au co-naming, même la Movistar va s’y mettre. Songez-vous à vous associer à un autre sponsor pour avoir plus de moyens ? 

On va finir par être le seul sponsor unique du peloton ! (sourire) Mais c’est une ligne rouge qu’on s’est fixée. On en a parlé, on a évoqué le principe et on y a répondu par la négative, c’est-à-dire que l’on souhaite rester sponsor et partenaire unique de notre équipe. Donc il n’est pas question, en tout cas pour le moment d’avoir un partenaire. On souhaite rester seul et ça nous réussit plutôt bien. On choisit plutôt la formule qui consiste à augmenter progressivement notre budget régulièrement pour continuer à rester le seul partenaire de notre équipe. On a un budget qui est plus petit que les autres, mais on fait avec. Et ça nous satisfait pleinement. D’ailleurs, vous voyez bien que des budgets plus importants que nous n’ont pas gagné deux étapes sur Tour cette année. Heureusement, il y a quand même toujours cette glorieuse incertitude du sport. 

« J’espère qu’on n’en viendra pas à faire payer le public… »

Un co-sponsor vous donnerait pourtant plus de moyens.

Il y a une inflation en termes de budgets. Ça commence à poser question. J’ai un peu peur que sur la durée on voit partir notamment des sponsors français et avec une grosse difficulté à faire rentrer des gros sponsors compte tenu du ticket d’entrée, qui est de plus en plus élevé. Quand on regarde l’évolution des budgets, ça ne fait que croître et c’est de plus en plus onéreux. A terme, ça peut poser des problèmes. Aujourd’hui, dans le cyclisme, on n’a pas de recettes si on compare par rapport à d’autres sports comme le foot. On ne touche rien sur la vente des coureurs. Il n’y a pas de droits télés. Ce n’est qu’un coût pour le sponsor, il n’y a pas de recettes. Il y a des retours derrière sinon on n’y serait pas, mais ça ne se traduit pas en termes financiers.

Je n’ai pas de solution miracle, mais c’est un sujet sur lequel il faut qu’on réfléchisse. Voir comment on peut améliorer le modèle économique pour faire en sorte d’attirer des sponsors, notamment des sponsors français, ou en tout cas des sponsors sur les équipes françaises, de réfléchir comment diminuer le coût du sponsoring pour un partenaire. Faire payer le public ? Si on devait en arriver là, personnellement, je le regretterais parce qu’une des particularités de ce sport, c’est que c’est gratuit et ça permet aux spectateurs et téléspectateurs d’assister à un spectacle de façon gratuite.

« On ne touche pas de droits télé (…) Le Tour de France est le 3ème événement cycliste le plus médiatisé au monde et nous on ne touche rien»

 Les salaires sont-ils trop élevés ?

Il y a une surenchère. Les agents font leur métier, mais ils contribuent aussi d’une certaine manière à ce que les salaires augmentent. On recrute de plus en plus jeunes et à des prix de plus en plus élevés. Peut-être faudrait-il imaginer un salary cap qui permette de limiter les budgets. Notre budget est de l’ordre de 15 millions d’euros. Il fait partie des plus bas. On doit se battre contre des équipes qui ont des budgets de 35 voire de 50 millions d’euros. Ces budgets sont trop éloignés les uns des autres et ça génère un cyclisme à deux vitesses. Une autre piste, ce sont les droits télés. Dans le foot, c’est une recette majeure pour les clubs. Nous, il n’y a pas de droits télés ! Le Tour de France est le 3ème événement cycliste le plus médiatisé au monde et nous on ne touche rien.

Victor Lafay est en fin de contrat. Sera-t-il encore chez Cofidis l’année prochaine alors qu’il est notamment courtisé par INEOS ?

On discute avec lui et avec son agent. C’est du 50-50. Il est en contact avec d’autres équipes et on lui a fait une belle proposition parce que notre volonté, c’est de le garder. Si Victor reste chez nous, il peut continuer à progresser. Il n’est pas arrivé au maximum de sa progression chez Cofidis. On peut encore l’aider à grandir. Après, ce n’est pas une question uniquement d’argent, il y a aussi le projet sportif.

N’avez-vous pas peur de revivre la même chose qu’avec Christophe Laporte qui explose chez Jumbo ? 

Christophe a fait un choix de carrière. Il souhaitait vivre une expérience à l’étranger. Mais il n’y a aucun souci. Il m’a d’ailleurs envoyé un mot très sympa au moment de la victoire de Victor Lafay pour féliciter Victor et toute l’équipe. C’est un bon mec. Il est à l’origine d’un mouvement chez certains coureurs français de se dire : je vais aller dans une équipe étrangère et je vais faire une belle carrière. Ça ne suffit pas. Il fait une belle carrière parce qu’il fait tous les efforts pour.

On a l’impression que, pour beaucoup, il est né chez Jumbo-Visma….

Il a fait 8 ans avec nous. On l’a eu comme stagiaire, il a fait toute sa première partie de carrière chez nous. Il a bien progressé, on l’a aidé à grandir. Mais il n’est pas né chez Jumbo, mais chez Cofidis et s’il n’était pas passé par Cofidis il ne serait pas là où il est chez Jumbo aujourd’hui.

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