vendredi 24 mars 2023

Faut-il boucler le Tour de France par un contre-la-montre ?

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La Vuelta et le Giro en avaient eu l’idée récemment, le Tour de France ne l’avait plus fait depuis les fameuses huit secondes fatales à Fignon en 1989, l’idée d’une dernière étape sous la forme d’un contre-la-montre redeviendra d’actualité sur la Grande Boucle en 2024, entre Monaco et Nice. Bonne ou mauvaise idée ?

A défaut d’organiser la traditionnelle étape finale sur les Champs-Elysées en raison des JO sur Paris, les organisateurs du Tour en ont profité pour en terminer, provisoirement, avec le principe d’une dernière étape promise aux sprinteurs et que le scénario invariable finissait par rendre trop prévisible. Plus que jamais en quête de spectacle, de rebondissements, de suspense, soucieux d’offrir aux coureurs la possibilité de jouer la gagne jusqu’au bout, les hommes de Christian Prudhomme leur ont offert un final potentiellement explosif en forme de dernier effort solitaire sur la promenade des Anglais.

Les JO de Paris changent la configuration du Tour

« Et si la gagne se joue pour neuf secondes, on ne leur en voudra pas ! » glisse malicieusement l’ancien journaliste. Car le but est bien là, maintenir l’intérêt jusqu’au dernier kilomètre. Cyrille Guimard n’est pas fâché par cette perspective, lui qui a souvent regretté l’inanité des dernières étapes.

« Ce chrono pour terminer est une bonne idée à condition qu’il puisse vraiment changer les choses au classement général. Si c’est pour permettre aux spectateurs de voir les coureurs un par un sur une dizaine de kilomètres seulement, ça ne vaut pas le coup. Il faudrait que ce contre-la-montre fasse au moins une cinquantaine de kilomètres et ait suffisamment de dénivelé. A Nice, la topologie s’y prête bien. »

Plus sceptique, le jeune retraité, Pierre Rolland, est séduit par cette initiative même s’il « a du mal à croire que tout pourrait basculer car, en troisième semaine, les écarts sont moindres. » Et pourtant. En 1989, personne n’aurait pensé LeMond capable de reprendre 50 secondes à Fignon sur 24,5 km sans difficulté majeure. Il lui en reprit 58…

Ce jour-là, Charly Mottet avait réalisé le 8ème chrono (à 1 min 16 s de LeMond) pour consolider sa 6ème place au général. « Au départ, on n’imaginait pas que Fignon puisse perdre le Tour sur ce chrono final même s’il avait déjà cédé près d’une minute dans le premier au début du Tour, mais sur 75 km. Là, sur une distance aussi courte il a perdu autant ! On ne le savait pas, mais il était un peu blessé à la selle, ça a suffi pour lui faire perdre ces huit secondes ; En plus, il n’avait pas de casque, et avait une queue de cheval. Tout compte quand vous perdez de si peu… »

Mottet : « Plus une affaire d’état de fraîcheur que de spécialistes »

Pour l’ancien coéquipier d’Hinault et Fignon, cet épisode entré dans la légende du Tour illustre bien la dimension dramaturgique d’un chrono final : « C’est une bonne idée s’il est potentiellement décisif. Selon moi, c’est plus une affaire d’état de fraîcheur que de spécialistes. Surtout que nous avons affaire en ce moment à des coureurs de plus en plus complets. »

Avant de connaître la distance et le parcours de cette dernière étape du 21 juillet 2024 qui partira de Monaco et arrivera à Nice, qui fera « au moins 30 km et aura du dénivelé », pour reprendre les propos de Christian Prudhomme, il n’est pas inutile de préciser qu’elle sera aussi précédée d’une avant-dernière montagneuse pour un dernier week-end que les organisateurs souhaitent en « feu d’artifice ».

Le contre la montre dans toutes les têtes

Après trois semaines de course, avec des organismes entamés, tous les éléments semblent réu-nis pour rendre inoubliable ce final. « J’aurais quand même préféré une avant-dernière étape vraiment très difficile, l’arrière-pays niçois ou les Alpes toutes proches s’y prêtent bien, avant une dernière étape que j’aime bien lorsqu’elle est faite pour que les spectateurs aient le temps de profiter des coureurs, nous dit l’ancien pro de chez Miko-Mercier, Joël Gallopin, papa de Tony (Trek-Segafredo). Malgré ça, ce dernier chrono, et à condition qu’il soit vraiment sélectif, peut changer à lui tout seul la configuration de ce Tour. En fonction du classement, on pourrait voir Evenepoel temporiser en montagne, et au contraire Pogacar vouloir tout faire exploser avant pour se mettre à l’abri. »

Qu’elle que soit la nature de ce chrono, il ne sera pas sans conséquences sur l’état d’esprit des favoris. Même s’ils n’étaient pas nés, le scénario de 1989 a été suffisamment fou et inattendu pour rendre le porteur du maillot jaune du 21 juillet en début d’après-midi aussi prudent que son, ou ses, outsider(s), ambitieux. Si tel est le cas, les organisateurs auront réussi leur coup…

Tom Boissy

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