En atteignant enfin la finale de la Ligue des Champions, les propriétaires du PSG espéraient voir leur image s’améliorer aux yeux de l’étranger. Notre tour d’Europe confirme que la défaite face au Bayern n’a eu que peu d’impact dans leur quête de légitimité. Le chemin est encore long.
En Allemagne, si le PSG signifie beaucoup plus qu’en Angleterre, c’est aussi en raison de la présence de Thomas Tuchel sur le banc, de Draxler et Kehrer aujourd’hui, de Trapp hier. Cela ne rend pas le club plus populaire ou aimé pour autant. Régulièrement, les prises de positions éditoriales des grands journaux sportifs n’épargnent pas un club qui, pour la plupart des médias outre-Rhin, casse le marché et est un des principaux responsables de l’inflation en matière de transferts. Il y a un an, en marge de l’ouverture, en Rhénanie du Nord-Westphalie, d’une académie PSG, le quotidien sportif Bild n’hésitait pas à s’en prendre à la politique sportive du club français, à l’attitude de l’ancien coach de Dortmund. « Tuchel veut voler nos talents. D’abord, ils ont chassé nos stars avec leurs millions en provenance des cheikhs, maintenant ils volent nos pépites ! » Pour beaucoup de supporteurs et observateurs germaniques, la finale de Lisbonne symbolisait deux conceptions diamétralement opposées, entre le club bavarois assis sur des fondations solides et une tradition très établie, entre équilibre budgétaire et ambition sportive, et le club parisien, symbole de tous les excès du football moderne. « Ici, tout le monde déteste le PSG, confirme le journaliste Lukas Hörster (Fussball Transfers), parce qu’ils associent le PSG au Qatar et à l’argent facile, celui qui permet d’acheter de grands joueurs comme Neymar que les Allemands n’aiment clairement pas parce qu’il est tout le temps en train d’essayer de dribbler ou de plonger. »
« Le PSG est une sorte de petite succursale du foot italien »
La victoire des Bavarois a donc été triplement appréciée de l’autre côté du Rhin, d’abord parce qu’elle permettait au Bayern de redevenir roi d’Europe, ensuite parce qu’elle freinait l’ascension d’un club « qui est tout de même apprécié chez les plus jeunes qui sont moins sensibles à l’origine des fonds du PSG, plus séduits par les stars que sont Mbappé ou Neymar. » Pour illustrer ce décalage, le réputé site 11freunde a refusé de couvrir la demi-finale Leipzig-PSG en raison du profil « trop marketing » des deux clubs, le premier sous l’égide de Red Bull, le second sous bannière QSI. Trop dépendante de son étoile la plus brillante, l’image du PSG reste négative dans tous les pays de grande tradition footballistique qui voient s’élever une nouvelle concurrence qu’ils ne considèrent pas forcément des plus loyales. C’est avec un fort sentiment d’injustice que les Italiens ont vécu la cruelle élimination de leur Atalanta Bergame en quarts de finale face à un club « qui a encore cette image de nouveau riche, de parvenu, précise depuis Rome l’ancien consultant Canal+ Lorenzo Fanfani. Mais comme le club est devenu avec le temps une sorte de petite succursale du foot italien, grâce à Leonardo, avec Buffon, Verratti, Thiago Silva ou Kean et Florenzi cette saison, le sentiment évolue petit à petit. A force d’insister, les supporteurs commencent à respecter tous les efforts et un pont s’est établi entre Paris et l’Italie. A l’image des relations entre les deux pays, c’est un peu « je t’aime moi non plus » ! Personne n’aurait crié au scandale si le PSG avait battu le Bayern, mais avec le sentiment que le PSG repose sur ses individualités avant tout. A la différence d’un club comme Manchester City, qui était perçu de la même manière avant que Guardiola lui donne une vraie identité de jeu. Aujourd’hui, plus personne ne parle des origines des moyens financiers de City. Pour se faire apprécier, le PSG doit accepter le processus sportif, parfois long, et gagner le respect sur le terrain grâce à son jeu collectif et pas seulement ses stars. »
« Le PSG a les moyens d’acheter les meilleurs joueurs »
En Espagne, « si le PSG est très suivi en raison de la présence de Neymar, mais aussi de Sarabia, de Bernat… c’est plus pour savoir quels joueurs ils peuvent recruter chez nous qu’autre chose, analyse Pablo Planas, responsable de la rubrique foot d’El Mundo Deportivo, quotidien sportif catalan. La finale de Lisbonne a moins changé son image que les deux transferts de 2017 quand Mbappé et Neymar ont battu tous les records. Pour arriver jusqu’en finale, ils n’ont pas fait d’exploit, donc sportivement ça n’a rien changé. Les socios ont plus de crainte que de respect vis-à-vis du PSG car ils savent que le club a les moyens d’acheter les meilleurs joueurs de la planète… pas encore de gagner la Ligue des Champions. » Qu’ils soient Catalans ou Madrilènes, les socios adorent détester un club parisien qui, sur le terrain, ne leur fait encore pas trop d’ombre. « Parce qu’il a été joué dans des conditions tout à fait exceptionnelles en raison de la Covid-19, le Final 8 de Lisbonne ne constitue pas une preuve que le club a franchi un palier. A la limite, s’ils avaient gagné le Bayern… mais là, ils ont clairement montré un réel manque d’expérience. »
Les socios du Barça ou du Real aiment toujours autant le détester
Comme si, pour être accepté parmi les grands d’Europe, au-delà de tout, une seule chose comptait : la victoire finale. Supporteur anglais de Newcastle, marié à une Française et résidant sur Paris, William Edwards, traducteur de profession, est un grand nostalgique des années Ginola des deux côtés de la Manche. Il compare le PSG d’aujourd’hui « à Manchester City ou Chelsea, une belle équipe, mais avec des joueurs qui donnent souvent l’impression de passer avant les intérêts du club. Et, au final, c’est ce manque de solidarité qui leur fait défaut et qui les empêche de gagner des équipes historiques comme le Bayern ou Manchester United. » Et notre témoin british d’estimer que pour franchir le dernier palier de la reconnaissance internationale, « le glamour d’un Neymar sera moins utile qu’un collectif qui s’est construit dans le temps. » Plus jalousé que vraiment respecté, le PSG n’a pas forcément amélioré son image en atteignant la finale de la Ligue des Champions pour la première fois de son histoire. Même si tous savent qu’un jour il finira par atteindre son but…