jeudi 28 mars 2024

Guy Roux : « Quand j’éternue, on se demande si je ne suis pas mourant »

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Jean-Marc Azzola
Jean-Marc Azzola
Journaliste

A 84 ans (le 18 octobre), le mythique entraîneur d’Auxerre (1964-2000), Guy Roux se confie alors que son club de cœur retrouve l’élite après dix saisons en 2ème Division.

Que devenez-vous ? 

Je suis consultant à Europe 1. J’effectue aussi un billet pour l’Yonne Républicaine tous les mardis. C’est un sujet libre sur le sport à condition que je ne parle pas de l’équipe professionnelle d’Auxerre. Ils ont trois chroniqueurs salariés de qualité. Je ne vais pas marcher sur leurs plates-bandes. Pour ce billet, ils ne me paient pas. Ils donnent l’argent à la Ligue contre le cancer.

Il y a aussi « Guy Roux une histoire de France »… 

C’est un film. Lionel Rosso, mon responsable chroniqueur d’Europe 1, dont le fils est membre d’une société de cinéma, m’ont demandé si j’acceptais de tourner un film touchant à ma carrière. J’ai accepté. Ils ont commencé par réaliser un petit film qui avait une ambition limitée bien que de qualité. Amazon a eu connaissance de ce film. Ils ont dit : “Vendez les droits et on fera un véritable film avec un metteur en scène, une équipe complète de cinéma”. Ils ont repris les images du premier film long d’une vingtaine de minutes. Ils ont transformé cela en un film d’une heure et demi.

« Parler de l’équipe d’Auxerre est trop délicat pour moi. Le moindre mot est analysé »

Etes-vous inquiet par le début de saison d’Auxerre ? 

Je ne participe pas pour ne pas gêner (sourire). Je n’en parle pas. J’habite la ville. Je suis membre du conseil d’administration de l’association et non du club professionnel. L’association compte 450 jeunes joueurs entre 6 et 18 ans. Il y a aussi 35 éducateurs dont 3 professionnels comme Fabien Cool, notre ancien gardien. Concernant l’équipe professionnelle, je demeure un spectateur attentif (sic), mais je ne m’exprime pas dessus. Auxerre est une petite ville. J’ai fait ce que j’ai fait. Tout le monde me connaît. Quand j’éternue, tout le monde se demande si je suis mourant… Parler de l’équipe d’Auxerre est trop délicat pour moi. Le moindre mot est analysé. Si je n’ai pas le mot juste, je vais mettre la pagaille (sourire).

De quoi êtes-vous le plus fier dans votre parcours d’entraîneur ? 

Je suis fier de tout ! Du moindre match gagné en Division d’Honneur. Il y a eu 894 matches de première division, 100 matches de Coupe d’Europe, 200 de Coupe de France. Mais avant cela il y a eu aussi six ans de deuxième division, quatre ans de CFA et dix ans de DH. Cela fait environ 2000 matches. Je suis vraiment fier de tout cela.

Quand vous prenez en main cette équipe de patronage à la base, auriez-vous pensé aller aussi loin ? 

Non, bien entendu. Mais le professionnalisme était différent aussi. Tout en ressemblant un peu à l’actuel aussi. Il appartenait en général à un homme, à un chef d’entreprise. Avec l’argent de l’entreprise, le club tournait brillamment ou pas. Parfois il y avait même faillite et disparaissait pour être remplacé par un voisin. De nos jours également les clubs ne sont plus associatifs. Il y a une entité commerciale. Pour Auxerre, c’est une société chinoise dirigée par Monsieur Zhou. On a cette chance que cet homme soit de qualité et moral. Son entreprise dont il est l’actionnaire majoritaire est prospère. C’est une personne raisonnable. On n’a rien à voir avec les grands clubs. On n’achète pas trop de joueurs. On prend ceux que les autres laissent.

« J’aurais bien aimé entrainer Neymar »

Cela aurait donné quoi Guy Roux s’occupant de Neymar ? 

J’aurais bien aimé. A mon avis, c’est moins difficile que Cantona. Mais c’est un peu le même genre. Un talent fou. Je me dis aussi concernant Neymar qu’il a un fond moral assez solide avec une culture judéo-chrétienne comme moi. Et donc qui respecte certains principes. Bien entendu, il peut y avoir des caprices, mais ça c’est la jeunesse…

Le métier d’entraîneur est-il devenu plus dur aujourd’hui ?

 Cela dépend. La responsabilité reste la même. Pour faire le même travail que moi à partir d’août 1961, pendant 25 ans, j’ai été tout seul. A la fois pour diriger l’équipe, mais aussi pour gonfler les ballons, trouver les moyens, pour organiser les déplacements, superviser l’état du terrain… J’avais parfois un jardinier plus ou moins payé, à moitié bénévole. J’avais un président bénévole qui tenait les comptes. Les entraîneurs actuels forment une équipe en général avec cinq autres personnes.

Ils sont donc six. Les entraîneurs d’aujourd’hui s’occupent seulement de l’équipe première. Une deuxième structure se charge de l’équipe B, puis une autre s’occupe des jeunes. Je suis monté de DH en CFA en 1970 avec les gamins que j’avais recrutés à 11, 12 ans en 1961. Sans oublier que leur parcours avait été gêné par la guerre d’Algérie. Je formais ces gamins de 11 ans le jeudi. Ce sont ces rescapés qui m’avaient fait monter en CFA.

« On m’a proposé deux fois l’Equipe de France »

Auriez-vous pris autant de plaisir à entraîner l’actuel PSG ? 

Le PSG, on me l’a proposé deux fois. Je n’y suis pas allé. C’était à l’époque d’Artur Jorge. Je me souviens d’avoir mangé avec un Monsieur qui est devenu le maire de Cannes (Bernard Brochand, Ndlr). J’aurais certes été content d’entraîner le PSG, mais le seul souci aurait été que je ne l’aurais pas fait très longtemps… Et qu’aurais-je fait ensuite ? C’est comme avec l’équipe de France. On me l’a proposée deux fois. Là encore j’aurais fait quoi ensuite ?

Appréciez-vous l’approche et la vision du football d’un entraîneur actuel ? 

Il y a Bruno Génésio (entraîneur de Rennes, Ndlr). D’ailleurs, il a mis une énorme pâtée à mon équipe (5-0, 7ème j., Ndlr). Je trouve même que Lyon a fait une grave erreur de ne pas le garder.

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