Président de la nouvelle Ligue Féminine de Football Professionnel, Jean-Michel Aulas est de retour par la grande porte.
Cette Ligue Féminine de Football Professionnel, c’est un peu comme votre bébé, non ?
C’est le bébé de la Fédération. Je suis là pour le faire grandir. Je suis celui qui organise le développement des clubs. C’est un retour à tout ce que le football professionnel m’a apporté, en particulier le football masculin, mais aussi le football féminin. Revenir à la Fédération pour créer une structure qui permettra à tous les clubs de développer le football féminin professionnel, c’est une ambition qui me tient à cœur. Il y a aussi beaucoup d’émotion, car nous savons que nous prenons un chemin similaire à celui que nous avons suivi en 2004 avec l’Olympique Lyonnais, lorsque nous avons repris le club du FCL.
C’est un démarrage ambitieux si l’on regarde ce qui s’est passé dans le football masculin au début des années 2000, notamment en Angleterre. Le football professionnel anglais s’est considérablement développé en essayant de maximiser les ressources médiatiques et télévisuelles, en établissant des relations avec de grandes entreprises et des distributeurs. Nous avons de grandes chances de réussir ce que les Anglais ont accompli chez les hommes dans les années 2000 : disposer de ressources propres et d’un championnat parmi les meilleurs.
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L’idée étant de fournir un spectacle de haut niveau.
Oui, tout à fait. Non seulement Paris et Lyon viennent de disputer une demi-finale de la Ligue des Champions (Lyon a été battue en finale 2-0 par Barcelone, Ndlr), mais aucune autre nation européenne n’a réussi à placer deux clubs dans cette phase de la compétition cette saison. En début de saison, le Paris FC a également surpris en se qualifiant pour la Ligue des Champions. Aucune autre nation n’a autant de très bonnes équipes et de très bonnes joueuses.
L’équipe de France féminine est en train de faire un retour remarquable. Donc, avec la France, nous avons tous les moyens de proposer un football moderne qui incite à investir. J’ai récemment rencontré la joueuse américaine Lindsey Horan, capitaine de l’équipe nationale, qui a déclaré avoir trouvé en France non seulement des conditions de jeu idéales, mais aussi un environnement social adapté.
Notre objectif est bien sûr d’attirer en France les meilleures joueuses européennes, mais aussi de développer nos centres de formation pour avoir les meilleurs joueurs et joueuses du monde. Comme nous l’avons fait avec Clairefontaine pour les hommes, nous voulons établir les meilleurs centres de formation pour les femmes. Avec les meilleures joueuses européennes et mondiales, nous visons à avoir l’un des meilleurs championnats au monde.
« Développer nos centres de formation pour avoir les meilleurs joueurs et joueuses du monde »
Vous avez parlé de l’importance de créer un écosystème pour générer des revenus et une économie autour du football féminin. Pouvez-vous nous en dire plus ?
C’est bien d’avoir les médias qui s’intéressent à la Fédération et à son projet, mais c’est encore mieux d’avoir ses propres ressources. Cela réduit notre dépendance aux investissements fédéraux, aussi bien faits soient-ils. Aujourd’hui, cet écosystème repose sur plusieurs piliers essentiels.
Il s’agit d’avoir l’un des meilleurs championnats au niveau professionnel, avec des centres de formation qui alimentent non seulement notre championnat, mais aussi les autres. Nous devons attirer l’attention des grandes entreprises qui réfléchissent à leur image dans le domaine du sport féminin et du football féminin en particulier.
Cela devient une monnaie d’échange avec ces grandes entreprises. Nous devons également créer les conditions pour avoir les droits télévisuels, que ce soit en France ou à l’étranger, en vendant les images de notre propre championnat. C’est ainsi que nous pourrons être complètement indépendants demain. Nous avons élaboré un plan sur cinq ans, avec un investissement estimé entre 50 et 70 millions d’euros. Au bout de ces cinq ans, les ressources propres du football féminin financeront entièrement le coût de notre championnat.
Et à ce moment-là, la Ligue pourrait être indépendante ?
Elle l’est, elle reste au sein de la Fédération, conformément au code du sport. Il est important d’aider au démarrage de cette ligue professionnelle dans le cadre fédéral. Je ne suis pas sûr d’être partisan d’une ligue complètement autonome, car nous sommes dans un écosystème où nous visons à doubler le nombre de licenciés, à créer des centres de formation, à protéger les joueuses, à favoriser leur progression et à promouvoir le talent en France. L’idée est d’avoir une équipe de France, un championnat professionnel et une formation regroupée au sein de la Fédération.