Quand une légende du football français parle, on l’écoute. Ça tombe bien, icône des Verts de la grande époque, Jean-Michel Larqué n’a pas sa langue dans sa poche.
Vous avez été désigné pour porter la flamme olympique, c’est une grande fierté…
Je suis très ému, très flatté, très honoré… Je n’imaginais pas ça comme ça. J’entendais parler des porteurs de flamme, je voyais ça de loin, et puis le jour où ça m’est tombé dessus, j’ai trouvé ça très honorant. C’est une grande joie d’avoir été retenu pour porter la flamme olympique.
Le fait que ce soit le département de la Loire qui a proposé votre nom, ce n’est pas anodin…
Il y a forcément un rapport direct avec ce que j’ai vécu dans ce département (sourire)…
C’est un immense hommage à votre carrière chez les Verts…
Mais pas uniquement MA carrière. Je prends ça aussi comme un hommage à toute une équipe qui a fait un peu vibrer la France. C’était un moment spécial pour les Français, sevrés de football, qui ont suivi cette équipe, montée de bric et de broc et qui a fait des exploits en Coupe d’Europe.
« En France, on n’a pas de culture de club »
Ça tranche un peu avec cette « indifférence » que vous dénoncez régulièrement, des clubs pour les anciens, à commencer par les anciens Verts…
En France, on n’a pas cette culture de club. Je vais vous raconter une anecdote. Quand je suis arrivé à Saint-Etienne, je connaissais les anciens. Je suis allé vers eux et je les ai salué avec beaucoup de respect. Quand nous sommes allés à Saint-Etienne pour l’hommage fait à Salif Keita, puis ensuite à Georges Bereta, nous étions sur le bord de la pelouse au moment où l’équipe de Ligue 2 s’échauffait. Il y a un seul joueur qui est venu saluer Curkovic, Piazza, Rocheteau et compagnie, un joueur ! Tous les autres ne savent pas qui on est. Ils sont d’une inculture abyssale !
Il y a aussi un manque de respect…
Je ne sais même pas si c’est du respect. A Saint-Etienne, on avait l’habitude d’appeler cela des « Badabeux ». Ils sont là… (il reste sans voix) Pour ensuite faire un match minable contre Valenciennes. Tout cela me laisse à penser que leur culture football est à peu près proportionnelle à leur talent de footballeur.
Vous avez été le seul à être choqué ?
Non… Tout le monde m’en a parlé. Les autres étaient même en colère d’avoir été ignorés et j’ai dû les calmer, en leur disant que ce n’était pas de la mauvaise volonté. Et c’est encore plus grave.
Cet évènement montre aussi que la passion pour le foot, disparait de plus en plus chez les footballeurs.
Vous savez, j’ai toujours en tête ce joueur, que je ne citerais pas, qui a dit : « Si je n’étais pas devenu footballeur professionnel, j’aurais arrêté le football ». Je ne comprends pas ça ! Moi j’ai joué au football avant d’être professionnel et j’ai continué à jouer au foot après, sur des terrains de campagne, parce que j’aime le football. Quand j’entends une pareille ineptie, ça me dépasse !
Revenons à Saint-Etienne. Ce qui se passe depuis que le club est en Ligue 2 (le club est descendu au terme de la saison 2021/2022), c’est un incroyable gâchis…
J’ai été directeur général du club en 1993 et nous avions terminé 10ème. En Ligue 1 bien sûr, et avec dans l’équipe, des joueurs qui représentaient un actif, comme Grégory Coupet, Laurent Blanc, Lubomir Moravcik, Jean-Pierre Cyprien… C’est quelque chose qui les satisferait largement aujourd’hui. Certes, on était dixième, mais cette équipe avait de la valeur. Là, non seulement la situation sportive est mauvaise, mais il n’y a rien. C’est le néant complet !
On ne sent pas une équipe capable de remonter…
C’est le néant ! Ils sont en milieu de tableau, avec déjà 5 défaites à domicile. 5 défaites à domicile !
« Non seulement la situation sportive est mauvaise, mais il n’y a rien. C’est le néant complet ! »
Ça doit vous rendre fou, vous qui détenez toujours un record avec les Verts, de 19 victoires en 19 matchs à domicile au cours de la même saison !
Comme dirait Thierry (Roland, ndlr), entre cette époque et l’équipe d’aujourd’hui, c’est la ligne droite de Longchamp.
Quand on compare les deux équipes, l’énorme différence, c’est qu’à l’époque, la grande majorité des joueur sortait du Centre de Formation…
C’est pas difficile, sur les 15 joueurs qui étaient sur la feuille de match, il y en avait 12 qui sortaient du Centre de Formation.
Aujourd’hui, Saint-Etienne ne forme plus de bons joueurs ?
Ce qui est paradoxale, c’est que, chez les jeunes, Saint-Etienne a plutôt des bons résultats (Saint-Etienne a notamment gagné la Coupe Gambardella en 2019, ndlr), dont c’est après qu’il se passe quelque chose qui ne va pas.
Aujourd’hui, on a coutume de dire que la situation du club est due aux présidents Romeyer et Caïazzo qui ne veulent pas vendre…
(Il coupe) Mais y a pas d’acheteur !
Peut-être aussi que les propriétaires mettent la barre trop haut pour vendre ?
Il y a peut-être un peu de ça, mais surtout, aujourd’hui, le club est sur-dimensionné pour un club de Ligue 2. Rendez-vous compte : à Saint-Etienne, il y a 300 salaires à sortir chaque mois. A Brest, en Ligue 1, ils sont à 117. Les investisseurs, si c’est pour aller aux Prud’hommes pour 150 suppressions d’emplois, ça les refroidi.