Fils unique d’une famille de viticulteurs modestes vivant dans la montagne, avant bras amputé et ne sachant pas nager… Personne n’aurait pu imaginer un jour voir Jingkun Xu s’engager dans la course la plus difficile du monde.
Connu pour être un « bâtisseur de rêve », au point qu’il consacre sa vie à partager sa philosophie, « Dream il Believe it and Build it » (Rêvez, croyez et construisez), le navigateur de 35 ans, né dans la province du Shandong, dans le nord est de la Chine, a découvert la voile dans l’équipe paralympique chinoise.
Six ans avant les Jeux Paralympiques de Sydney, la Chine lui propose tout simplement d’intégrer un plan de formation pour son équipe nationale. Bien qu’à l’époque, il ne sait pas nager, il décide de tenter l’expérience. Sur un « Sonar » (voilier d’environ 7 m de long à 3 équipiers), son olympiade sera un échec (il termine 10ème sur 14), ce qui pèse dans la décision de la Chine de dissoudre l’équipe paralympique de voile, au lendemain de la compétition.
Le déclic Ellen MacArthur
Jingkun Xu ne le sait pas encore, mais, à l’aube de ses 19 ans, une vocation est en train de naitre. Reste à définir comment elle va se matérialiser. C’est en s’intéressant au parcours dEllen MacArthur, que sa passion va se préciser. A travers l’histoire de la navigatrice britannique, qui fait escale en Chine à l’occasion de son tour du monde, il prend conscience que la voile au large est beaucoup plus qu’une compétition, mais bien une philosophie.
A partir de 2010, son objectif est clair : devenir navigateur au large et participer au Vendée Globe. Il se forme pour devenir moniteur, puis quatre ans plus tard, quitte la Chine pour s’installer en Bretagne (où il débarque sans parler un mot de français) et passer encore un palier vers son rêve. En 2015, c’est la Mini transat, puis en 2017, accompagnée de son épouse, il se lance dans un tour du monde, en catamaran (sans pilote automatique, ce qui rend la navigation encore plus compliquée). Un tournant dans sa vie, qui va le faire grandir encore plus vite.
Jingkun Xu revient en Chine où il est désormais reconnu comme un grand marin. Il crée une école de voile. Le destin s’accélère en 2021, quand il parvient à réunir les fonds pour acheter l’Imoca d’Alain Rouan qui vient de faire le Vendée Globe (en se classant 17ème), aidée par la ville d’Haikou. Il baptise son bateau China Dream Haikou, qui devient Singchain Team Haikou quand, en octobre 2023, la société de Singapour, spécialisée dans les investissements dans le domaine du Web devient son principal partenaire.
Sa rencontre avec le navigateur britannique Mike Golding, va aussi lui faire franchir un pallier. Ensemble, les deux hommes font la Transat Jacques-Vabre, course durant laquelle il apprend beaucoup. Puis, après viendront deux courses en solitaires (dont la New-York-Vendée-Les Sables-d’Olonne, qui validera sa participation au Vendée Globe).
18 ans pour un objectif : participer au Vendée Globe
A bord de son Imoca, Jingkun Xu a emmené de la lecture. Dans sa libraire se trouve en bonne place Humble Rêveur, le livre qu’il a publié en 2021 et qui raconte l’histoire d’un enfant manchot d’un petit village de montagne devenu un skipper reconnu dans le monde entier, qui fait le tour du monde.
Trois ans après, il est en train d’écrire l’une des plus belles pages de son incroyable vie. Quand on lui demande où il puise la force et le courage de participer à l’une des courses les plus difficiles du monde, il a la réponse : « Le courage vient probablement de deux aspects. D’une part, pour participer au Vendée Globe, j’ai passé 18 ans à préparer et acquérir les compétences nécessaires pour une course en solitaire autour du monde sans escale », explique le marin chinois sur le site officiel du Vendée Globe. « D’autre part, sur le chemin de cette préparation, j’ai reçu la confiance et l’aide de beaucoup de gens. Leur soutien m’a donné beaucoup de courage et de force ». « Rêvez, croyez et construisez » : une maxime qui lui va tellement bien.
- Au pointage de 15h, ce dimanche 8 décembre, Jingkun Xu est 37ème, à 3850,63 milles nautiques du leader, Charlie Dali.