Julien Simon aura 39 ans en fin d’année lorsqu’il mettra pied à terre pour la dernière fois. Avant, le coureur de TotalEnergies entend profiter à fond de tous les moments que lui réserve la 17ème saison de sa carrière.
Le fait de savoir que vous mettrez un terme à votre carrière en fin de saison change-t-il votre état d’esprit au moment de prendre le départ de vos dernières courses ?
J’aborde les courses avec autant de motivation et de professionnalisme que d’habitude, mais certainement avec un peu moins de pression, surtout avec la volonté d’en profiter au maximum, d’être davantage dans le plaisir. Je savoure tout, les veilles de courses, les jours de courses, les lendemains de courses. J’en profite.
Pourquoi avoir programmé la fin de votre carrière cette année ?
Déjà, avant 2022, qui fut une de mes meilleures années de coureur, j’avais réfléchi à cette perspective. Après un Tour de France 2021 difficile, je m’étais donné une saison supplémentaire… avant de faire de bons résultats en 2022 et de repousser l’échéance à 2024.
Deux ans de plus, c’est déjà pas mal et je pense que c’est le bon moment. Tout est acté dans ma tête depuis 2022. Il faut savoir s’arrêter. Je voulais choisir ce moment, ne pas le subir, ne pas attendre d’être poussé dehors. Mes enfants grandissent, j’ai déjà beaucoup donné au vélo, j’aurais 39 ans en fin d’année (le 4 octobre, Ndlr), ça commence à faire.
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Julien Simon choisit son moment pour partir
En près de 20 ans de carrière, quelle évolution du cyclisme avez-vous eu le plus de mal à suivre ?
Je ne me suis jamais beaucoup occupé du matériel, sauf ces dernières années tellement il s’est amélioré dans de telles proportions qu’on ne peut plus y couper si on veut rivaliser. Je m’y suis donc mis. J’ai plus de mal avec la rigueur alimentaire qui devient extrême dans le peloton. On pèse tous ce qu’on mange, tout est calculé, et franchement, je n’ai plus envie de ça.
Qu’en est-il de l’état d’esprit du peloton ?
Là aussi, que de changements… Avec d’autres, j’ai l’impression que les nouvelles générations savent et connaissent tout à seulement 20 ans. Il y a clairement moins de respect. Sinon, le niveau du peloton est devenu très dense. Sur une course de 120 coureurs, il y a 15 ans, on savait qu’une trentaine seulement pouvait gagner. Aujourd’hui, c’est au moins le double.
Des quatre équipes pros que vous avez connues (Crédit Agricole, Sojasun, Cofidis et Total Enegiees), à laquelle vous êtes-vous le plus identifié ?
Entre 2009 et 2013, nous avions chez Sojasun une équipe à la fois compétitive et familiale. A tous les niveaux, ce furent mes meilleures années. Il ne serait plus possible de reproduire cet équilibre aujourd’hui.
« On pèse tous ce qu’on mange, tout est calculé, et franchement, je n’ai plus envie de ça »
Quelle a été votre plus belle victoire ?
Forcément, celle obtenue en World Tour, lors du Tour de Catalogne (deux victoires d’étapes en 2012, Ndlr), parce que c’était quand même une épreuve relevée et que personne ne s’y attendait.
Des regrets ?
J’ai mis beaucoup de temps à digérer ma deuxième place aux championnats de France en 2019. J’avais tout fait comme il faut, j’avais les jambes, j’aurais dû gagner si, dans le final, on s’était bien entendu avec mon coéquipier (Damien Touzé, 3ème, Barguil, avec le même temps, Ndlr). C’est le grand échec de ma carrière alors qu’il s’agissait d’un de mes rêves. Le soir, je me revoie encore en train de pleurer…
Je regrette aussi de ne pas avoir pu endosser le maillot jaune sur le Tour alors que j’en ai eu la possibilité en 2013 en Corse (2ème au général après la 3ème étape à 1 seconde de Bakelants, Ndlr). Le maillot jaune, c’était mon autre rêve…
« Je regrette de ne pas avoir endossé le maillot jaune en 2013 »
Alors que vous ne disputerez certainement pas de grands Tours ni de courses World Tour, quels sont vos objectifs cette année ?
Si je ne suis pas bien, je me mets au service des autres, si j’ai les jambes, je vais au bout pour essayer de gagner. Hors de question que je finisse dix minutes derrière à toutes les courses, ce serait un échec. Jusqu’au bout, je ne veux pas subir, mais être acteur de mes derniers moments de cycliste professionnel. Et si je gagne, ce sera la cerise sur le gâteau. Les grands Tours demandent trop de préparation en altitude, et j’ai déjà donné (rires), je vais me concentrer sur la Coupe de France.
Et après, savez-vous de quoi sera faite votre reconversion ?
Non, je n’en ai aucune idée. Je commence à y réfléchir sérieusement sans savoir si je veux, ou pas, rester dans le vélo.