A quelques heures du grand départ de la 110e édition du Tour de France, le manager général de la formation Groupama-FDJ est revenu sur les ambitions de son équipe. Il évoque son capitaine David Gaudu, mais aussi ces coleaders : Thibaut Pinot et Valentin Madouas.
Quelles ambitions fixez-vous à vos coureurs sur ce Tour de France ? La victoire ? La 3ème place parce que les deux premières places sont condamnées ? Comment voyez-vous ce Tour ?
Déjà, il n’y a jamais rien de condamné de manière définitive, surtout avant le départ d’une épreuve, quelle qu’elle soit, quels qu’en soient les participants. Notre objectif est le même que l’an dernier : faire un bon Tour de France. L’idée est d’être sur le podium ou le plus près possible et d’être acteur et actif dans une course de mouvement. Avec l’équipe que nous avons cette année, nous pouvons nous y inscrire et nous ferons le bilan à la sortie, mais je pense qu’on a les bons ingrédients pour aller chercher des résultats : victoire d’étape, classement général ou même, comme l’an passé, un bon classement par équipes. Notre équipe est taillée pour le parcours de ce Tour de France et j’ai des garçons qui ont envie d’en découdre, qui sont dans un bon état d’esprit et qui vont le démontrer jour après jour.
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Le début de Tour de France est particulièrement difficile avec des difficultés qui arrivent très vite. Cela change-t-il l’approche ?
L’approche est toujours la même. On va être sous pression dès le premier jour. L’an dernier, c’était sur un autre terrain et un autre style de course, mais on était sous une pression extrême, notamment avec le vent, le fameux pont, les pavés et le bord de mer à Calais. Là, on est dans un Pays-Basque tortueux et difficile à souhait. La pression de début de Tour sera présente, mais c’est le cas sur chaque Tour de France. Chaque année, on a une entrée en matière tendue et nerveuse, quel que soit le profil proposé. Il faudra être prêt et être dans le match dès le premier kilomètre de la première étape.
Du point de vue de la stratégie, cela sera-t-il un petit peu moins tout pour David ? C’est notamment la piste que vous aviez dessinée au moment des sélections avec des cartes pour Thibaut Pinot et Valentin Madouas.
Ce Tour est très montagneux. Il va forcément ouvrir des perspectives et des portes. Un bon nombre d’équipes va fonctionner sur plusieurs têtes, même UAE a fait état de préserver deux coureurs pour le classement général (Tadej Pogacar et Adam Yates, Ndlr). On est dans une situation avec plusieurs cartes dans notre jeu et on essayera de faire bouger nos cartes pour aller chercher le meilleur résultat possible. Des équipes comme INEOS sont en mesure de beaucoup plus bouger dans la course que par le passé. Le parcours s’y prête, donc on aura tout intérêt à être vigilant, à ouvrir les yeux et à profiter, nous aussi, de ces situations avec des coureurs comme Thibaut (Pinot) ou Valentin (Madouas) qui peuvent jouer un rôle intéressant en montagne. Notre angle d’attaque du Tour, c’est David (Gaudu), mais il faut qu’on utilise nos qualités, nos moyens et nos forces. Ce qu’on a pu réaliser l’année dernière et sur le Giro de cette année, nous permet de penser que l’on est capables d’agir et de réagir par rapport à des situations de course de mouvement.
« A l’avenir, Valentin Madouas sera forcément leader sur un grand Tour »
Après ce maillot de champion de France, Valentin Madouas aura-t-il, un jour, un rôle différent dans l’équipe ?
Valentin a terminé 13ème de son premier grand Tour, c’était le Giro l’an dernier. L’an dernier, il a quand même terminé 10ème du Tour tout en étant équipé. Ça ouvre quand même des perspectives. A l’avenir, il sera forcément leader sur un grand Tour. Lequel en premier ? Je n’en sais rien, mais il sera forcément à un moment ou à un autre, leader sur un grand Tour. Il reste un peu de travail à effectuer, notamment sur le chrono, mais pour le reste, c’est un coureur constant qui n’a pas de mauvais passage et qui est résistant. Il a toutes les qualités pour réussir des classements généraux.
Le protocole Covid est de nouveau-là. Des consignes particulières ont-elles été données ?
Première chose, nous sommes dans une situation bien différente de ce que nous avions connu dans les jours qui précédaient le Tour de France de l’année dernière. Il y avait des cas dans de nombreuses équipes. On était sur le fil du rasoir pour pouvoir prendre le départ du Tour. Il y a eu un accident sur le Tour de Suisse, mais au niveau sanitaire, ça s’est bien passé. Ça s’est également bien passé sur le Dauphiné. L’alerte qu’il y a eue, c’était au début du Giro. Elle a été très médiatisée parce qu’Evenepoel était parmi les coureurs touchés. Entre nous, on reste sans le masque. A l’initiative de notre médecin, dès qu’une personne a le moindre symptôme, on teste et on isole pendant plusieurs jours, et, ainsi, on peut éventuellement éviter une propagation de l’épidémie si ça se présente. On va voir comment cela se passe dans les zones de départ, si les parcs sont réellement fermés et si tout le monde met le masque. On est quand même dans un moment un peu moins oppressant que ça ne pouvait l’être.
« Thibaut Pinot va faire le plus beau Tour de sa carrière »
Que ressentez-vous à l’aube d’accompagner Thibaut Pinot sur son dernier Tour de France ?
C’est particulier dans le sens où on connaît l’histoire contrastée de Thibaut avec le Tour. Comme Je lui ai dit, tu vas m’emmerder jusqu’au bout (rires). Plusieurs fois, ça a été la croix et la bannière, pour le faire venir et l’année où je pense qu’il va le moins avoir envie de faire le Tour, il s’est réveillé au Giro et il m’a dit : “Je veux faire le Tour”. Il m’a posé une belle équation, que j’ai étudiée et qu’on a validée ensemble après évaluation du physique et du mental, du bonhomme. A partir de là, j’ai le sentiment et j’en suis presque sûr à 100% : il va faire le plus beau Tour de sa carrière. Je suis très confiant dans ses capacités et dans son évolution sur ce Tour.
Avez-vous des regrets que Thibaut Pinot ait plus d’envie ? Ou cela vous nourrit d’espoirs ?
C’est la vie. Chacun a sa propre personnalité, son chemin et son destin. La boucle est en train de se boucler avec ce Tour de France. Non, je n’ai pas de regrets sur ce qui a pu se passer sur les années précédentes, aussi bien les bons comme les mauvais moments. Ça fait partie du haut-niveau et il faut accepter la règle du jeu qui veut que ça ne peut pas marcher à tous les coups. Comme je suis assez superstitieux, je crois que l’on n’échappe pas à son destin.
Propos recueillis par Killian Tanguy