Le premier Français drafté n°1 dans l’histoire de la NBA s’apprête à vivre une saison sous le feu des projecteurs. Consultant pour BeIN Sports, Chris Singleton nous apporte une nouvelle fois son éclairage.
Tenir physiquement le rythme d’une saison NBA à 80 matches
« Cela va être un défi majeur et peut-être le n°1 pour lui. Il n’a jamais connu cela ni dans le championnat de France ni en Coupe du monde. Le talent, il l’a. Un physique hors-norme, c’est le cas aussi avec des améliorations logiques à apporter. Mais peut-il tenir une saison à 80 matches avec le rythme de la NBA ? Apparemment, il a gagné 6 ou 7 kg. Cela ne sera pas de trop. Il va être visé, c’est certain. Il y a tellement de hype autour de lui. Et les joueurs vont vouloir se mettre à sa place aussi… Bref, il va galérer certainement un peu au départ. Nuit après nuit, il va devoir faire face aux joueurs de top niveau ».
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Montrer que ce n’est pas un joueur fragile
« Il va falloir qu’il s’impose, qu’il trouve un style de jeu aussi. Il est grand (2m21, Ndlr), mais ce n’est pas un intérieur. C’est un joueur qui joue face au cercle. Il a cette faculté à effacer les joueurs en face, il a du dribble. Une fois qu’il arrive au cercle, c’est un grand finisseur. Cependant, il faut arriver au cercle ! On va bien regarder comment il est bloqué et comment il résiste au défi physique ».
Ne pas se mettre de pression en plus avec des déclarations maladroites
« Il a un entourage qui essaie de le protéger. Tous les projecteurs vont
être braqués sur lui. Il y a eu un tel abattage autour de lui aux Etats-Unis et même avant qu’il n’y débarque. Il est un tel phénomène qu’il faut qu’il s’isole un peu. Step by step. »
Faire sortir les spurs du néant
« Il est dans la bonne équipe. On ne pouvait pas mieux espérer pour lui que d’aller aux Spurs. C’est une franchise qui est assez familiale, qui n’est pas dans un grand marché avec un coach (Gregg Popovich, Ndlr) qui sait ce que c’est que de faire progresser de jeunes talents. Mais faire sortir les Spurs du néant (15èmes la saison dernière à l’Ouest, 22 victoires pour 60 défaites, Ndlr), il ne peut pas le réussir tout seul. Les Spurs sont descendus assez bas.
On ne les a jamais vu autant largués. Ils peuvent avoir le 1er tour de la draft, mais de là à attirer les grandes stars à San Antonio, c’est presque mission impossible. Personne quasiment ne veut évoluer dans un tel marché. Cela va être compliqué pour eux. Bâtir avec les jeunes, c’est très bien. Cependant, cela prend des années. Les Spurs sont condamnés à être dans la moyenne ».
S’adapter au jeu de la NBA et à ses règles
« C’est probablement le défi qui devrait être le plus facile pour lui. C’est un joueur qui s’appuie beaucoup sur sa créativité, sur terrain ouvert, et en un contre un. En France, on l’a quand même placé dans un basket assez carré. On a vu des fulgurances de sa part. Désormais, il devrait se régaler sur terrain ouvert. Maintenant, il faudra aussi qu’il soit capable de produire. Car il aura évidemment de grands joueurs en face de lui. Aura-t-il le jeu, le mental pour réussir en étant dans une agression continuelle ? »
S’adapter face aux pivots plus lourds
« Wembanyama n’est pas un pivot. Il se dit qu’on va le mettre en poste 4 fuyant. Il devrait jouer plutôt dans les pick and roll. Ses descentes au cercle vont être de face. C’est comme cela qu’il joue le mieux. En France, ce n’était pas son truc de jouer dos au panier. Il ne me semble pas être dans la capacité aujourd’hui à gagner des duels dans la raquette, avec les meilleurs postes 5. Il va devoir rester dans son jeu, poste 3, 4, un peu à la Durant ».
« Il va être obligé de montrer deux fois plus que les autres »
Appréhender un nouvel environnement médiatique et ne pas s’éparpiller
« Il va bénéficier de son entourage. Ses agents, ses parents, ses conseils sont omniprésents. Ils sont très vigilants avec lui. Il s’est acheté une maison à San Antonio. Sa famille ne sera pas loin. Il se trouve dans un endroit où cela ne pouvait pas être mieux. New-York, Los Angeles, parfois c’est compliqué pour les jeunes, même quand ils sont encadrés. Là, il va avoir la possibilité de se concentrer exclusivement sur son basket et sa première saison ».
Accepter qu’une première saison générera forcément des frustrations et des déceptions et qu’il ne décrochera pas le titre tout de suite
« Il faut qu’on soit tous honnêtes. Sans manquer de respect, il a le bénéfice d’aller dans une équipe mal classée. Alors il va avoir du temps de jeu. Il va devoir profiter de cela tout en essayant de s’améliorer dans les points sensibles comme défensivement, collectivement, et au niveau de la passe, une faiblesse relative encore présente dans son jeu. Et même si tu es techniquement très fort, il faut aussi jouer beaucoup plus vite. C’est cela la NBA. Wembanyama va devoir travailler la rapidité de son jeu ».
Passer après Tony Parker quatre fois champion NBA avec les SPURS (2003, 2005, 2007 et 2014)
« Aux Spurs, ce n’est pas seulement Tony Parker. A San Antonio, il y a eu aussi Tim Duncan. C’est une équipe qui a gagné des titres (cinq fois championne NBA, Ndlr) et même si ce n’est pas hier (1999, 2003, 2005, 2007, 2014, Ndlr). Après Tony Parker au Hall of Fame, on a maintenant un joueur très signifiant. Mais restons quand même prudent. Les choses peuvent aller très vite dans un sens comme dans l’autre. Il faut tenir bon et avoir un mental d’acier. Il ne faut pas s’appesantir sur une mauvaise prestation et se montrer prêt dès le lendemain. Il ne faut donc pas rester sur le mauvais et continuer à progresser. »
Répondre au défi que ses adversaires vont lui lancer en le testant à chaque match, tout le monde ne voyant pas son arrivée d’un bon œil
« Il ne faut pas oublier qu’il n’est pas Américain. Là-bas, il va être obligé de montrer deux fois plus que les autres. On va l’attendre. On va le regarder et le tester. Et pas que ses adversaires, mais dans son équipe aussi. Pour l’aider, mais aussi pour voir s’il mérite tout ce qu’il a. En NBA, on va faire en sorte que cela soit le plus dur possible pour lui. Il va falloir s’y attendre. D’autres rookies vont vouloir exister également ».