jeudi 12 décembre 2024

Philippe Doucet (Canal+, sur le VAR) : « Les images peuvent mentir »

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Plus ancien journaliste de Canal+, Philippe Doucet a été le premier, il y a plus de 20 ans,  à utiliser la vidéo dans le football. Il nous donne notamment son avis sur la VAR et ses imperfections.

Vous êtes le plus ancien des journalistes de Canal+, vous n’avez pas un peu l’impression d’être le dernier des Mohicans…

(Sourire) Ça fait déjà très longtemps que je suis le plus ancien… Mais je ne me suis jamais considéré comme un « ancien »… Déjà parce que je ne fais plus partie de la structure Canal+ en elle-même (ndlr : Philippe Doucet a créé sa propre structure et collabore avec Canal+ en tant qu’intervenant extérieur), je ne suis pas en permanence dans les locaux. Je pense même que certains jeunes journalistes ne savent pas qui je suis. Il n’y a aucun statut particulier.

Vous avez vu évoluer le foot à la télé de l’intérieur, ça doit vous changer…

Pas tant que cela, si ce n’est que les chaines se sont multipliées. Comme beaucoup n’ont pas les droits, on a beaucoup d’émissions de débats sur le foot. Des émissions en studio où c’est beaucoup plus facile de travailler.

Le match est presque passé au second plan…

Avant, la chose la plus importante, c’était le match. Je me rappelle qu’avec Charles Biétry, on partait la veille, parfois même deux jours avant un match, pour le préparer. Le match devenait une émission en lui-même.

Très vite, vous vous êtes spécialisé dans la vidéo, avec la création de la fameuse « palette » , il y a plus de 20 ans… Je suppose que vous avez été ravi de voir justement la vidéo mise au service de l’arbitrage, avec le VAR. Quel est votre regard sur cette technologie qui révolutionne l’arbitrage ?

Je suis bien sûr favorable au VAR, mais à condition de bien l’utiliser.

« Lors de la mise en place du VAR, on a laissé les arbitres tout gérer et ça a été un tort »

Vous pensez que ce n’est pas le cas ?

Non. La vidéo est une technologie très différente de l’arbitrage. L’utiliser demande une maitrise particulière, avec la capacité de s’adapter aux situations. Il y a 25 images en une seconde. Si vous vous arrêtez à la 23ème ou à la 24ème, la situation peut être différente. Notamment sur les hors-jeu.

Vous n’avez pas eu envie de participer à l’élaboration du VAR ?

Je n’ai pas été consulté, mais j’ai donné mon avis. J’ai écris des courriers pour mettre en garde sur les subtilités de l’utilisation de la vidéo, mais je n’ai pas été entendu. On a laissé les arbitres tout gérer, et ça a été un tort. Aujourd’hui, on est quand même obligé de modifier les règlements pour optimiser le VAR… Il faut savoir que les arbitres doivent décider par rapport aux images qu’on leur envoie… Mais les images ne disent pas tout, elles peuvent même induire en erreur. Les images peuvent mentir.

Aujourd’hui, quelle est la solution selon vous pour améliorer l’utilisation de la vidéo ?

Il faut que les acteurs du jeu prennent la main. Il faut faire un bilan de ce qui ne fonctionne pas, au lieu d’aménager les règles, et faire évoluer le VAR. Quelqu’un comme Arsène Wenger par exemple, directeur du développement du football à la FIFA, me paraît compétent pour mener les réflexions.  

On ne peut pas parler avec vous sans évoquer le foot africain. Avec seulement 5 représentants à la Coupe du Monde, vous ne pensez pas que c’est un manque de respect ?

Si on se réfère aux résultats, ça peut se comprendre… Ce qui est d’ailleurs paradoxale, c’est que les nations africaines avaient de meilleurs résultats quand il n’y avait qu’un seul ou deux qualifiés…

Comment l’expliquer ?

Aujourd’hui, le football africain est très en retard. Il n’y a pas de grandes équipes africaines. Ces dernières années, tout a été très vite technologiquement dans le football. Si les équipes africaines ont progressé, les autres ont été encore plus vite et l’écart s’est creusé. L’Afrique n’a pas les moyens financiers pour suivre.

20 ans après, « La palette », plus que jamais d’actualité avec le VAR…

*Il y a plus de vingt ans, Philippe Doucet, introduisait l’utilisation de la vidéo dans le foot, avec « la palette ». Très vite appelée « La palette à Doudouce », celle-ci apportera une nouvelle façon, révolutionnaire, de regarder et analyser le foot. Dans un livre remplis d’anecdotes,  le journaliste de Canal+ évoque les débuts de « La palette », avec ses ratés et ses moqueries, mais raconte surtout comment l’utilisation de la vidéo a fini par convaincre tous les acteurs (consultants, entraineurs, joueurs…), en revenant sur 20 ans d’analyse vidéo dans le foot. (« La palette », collection Solar Sports)

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