Buteur mythique de la soirée inoubliable de Munich en 1993 face à Milan, Basile Boli a marqué pour l’éternité l’Olympique de Marseille. Des larmes de Bari à son coup de tête victorieux en finale de la C1, l’ancien défenseur de l’OM aura marqué bien plus qu’une ville ou une période.
Dans l’histoire du foot français, les moments d’anthologie sont bien trop rares pour les oublier. A l’image du coup-franc de Platini en 1984 face à l’Espagne, les coups de tête de Zidane face au Brésil en 1998 ou encore le but de Mbappé en finale 2018 face à la Croatie, Basile Boli restera à jamais dans l’histoire de l’Olympique de Marseille et du football français.
En inscrivant le but de la victoire (1-0) face au grand Milan AC de Fabio Capello, le défenseur international basculait à jamais dans une autre dimension, celle des grands joueurs qui auront marqué leur sport. Même si Manuel Amoros aime s’amuser des qualités techniques de son ex-coéquipier, il reconnaît que, de la tête, il n’avait pas d’équivalent. « Il était maladroit avec ses pieds mais, de la tête, c’était le meilleur au monde ! »
Pourtant, au moment de son arrivée de l’AJ Auxerre en 1990, peu aurait misé sur la réussite de Basile Boli dans la grande équipe de l’OM. Mais rapidement, il a su s’imposer comme un élément moteur d’une formation en quête de la reconnaissance suprême sur le continent européen en remplaçant notamment une autre légende, l’Allemand Karl-Heinz Förster.
Il faudra cependant attendre l’arrivée de Raymond Goethals pour enfin voir Boli s’émanciper dans la cité phocéenne. Derrière, il aura été de toutes les grandes émotions olympiennes durant quatre saisons jusqu’en 1994 et son départ vers les Glasgow Rangers. Après 163 matches sous les couleurs de l’OM, Basile Boli aura réussi le plus grand exploit de sa carrière qui lui a également permis de porter le maillot bleu de l’équipe de France à 45 reprises entre 1986 et 1993.
« Il était maladroit avec ses pieds mais, de la tête, c’était le meilleur au monde ! »
Il est évident que Basile Boli sera à jamais associé à la victoire de l’Olympique de Marseille. Et cette 43ème minute du 26 mai 1993 le suivra jusqu’au bout. Présent à Munich, ce jour-là, Jean-Paul Delhoume, ancien chef des sports du journal La Marseillaise, n’a pas oublié ce but qui restera à jamais dans l’histoire de l’OM.
« Avant l’action du but, on sentait que ça montait. L’OM avait retrouvé son jeu et sa solidarité. C’était une drôle d’équipe, peut-être moins forte que 91, mais ça le faisait. Boli vient mettre ce coup de tête. Il récidive trois jours plus tard au Vélodrome face au PSG. A partir de là, les joueurs ont eu une impression d’invincibilité. J’étais confiant après ce but. »
Il est vrai qu’il suffit d’entendre les commentaires de l’époque pour s’en convaincre. Dès que le corner venait d’être gagné par Abedi Pelé, Jean-Michel Larqué lâchait : « C’est peut-être le bon moment. » Un feeling repris par son acolyte de l’époque et commentateur vedette de TF1, Thierry Roland qui jouait la surenchère. « Ce serait même le moment exceptionnel. » Mais reste l’incertitude liée à ce corner qui ne l’était pas selon l’ancienne voix de Radio France Provence Avi Assouly.
Un corner imaginaire sur le but de Boli
« Ce n’était même pas un corner. C’est Abedi Pelé qui touche le ballon en dernier. C’est un corner imaginaire. C’est sur ce corner que l’OM a pu marquer ce but. Aux commentaires, ce but de Boli a libéré tout le monde. Je ne savais plus ce que je disais. »
Mais selon l’ancien grand reporter de La Provence, Mario Albano, l’impression était là-même. « On a eu ce petit sourire après le but, en se disant qu’il n’y avait peut-être pas corner sur l’action d’avant et que l’on avait connu de la chance sur ce coup. De la tribune, il me semblait que ce n’était pas corner. Même si on était loin du terrain, j’avais l’impression que c’était Pelé. Mais c’est difficile à déterminer. Ce but est arrivé comme une surprise. »
Chaque joueur prend alors sa place calmement. On joue les derniers instants de la première période et l’OM vient de laisser passer l’orage. Abedi Pelé au départ ne veut pas frapper ce corner, mais il retourne placer son ballon sur l’arc de cercle. Le moment était trop important et pouvait faire basculer la rencontre sur ce premier corner gagné par l’OM. Basile Boli monte et se place directement au premier poteau derrière son coéquipier Rudi Völler. Il s’en était déjà expliqué par le passé.
Pelé dit à Boli de couper au premier poteau
« Avant d’entrer sur le terrain, Abedi Pelé m’avait dit que, sur les corners, il ne pouvait pas tirer au deuxième poteau, comme d’habitude. Ils étaient trop grands à Milan. Moi, j’écoute sans trop écouter mais, finalement, je fais ce qu’il me dit, au premier poteau. Et là, c’est bonheur. » Basile Boli s’élève dans le ciel de l’Olympiastadion pour prendre le dessus sur Frank Rijkaard qui le marquait et malgré la main de l’expérimenté Franco Baresi qui tirait son maillot pour l’empêcher de s’envoler.
« On en avait parlé la veille, je l’avais dit à Base, expliquait le tireur Abedi Pelé, il y a quelques années. Vue la taille de Rijkaard, Gullit et Van Basten, on ne peut pas aller au charbon avec eux, donc quand je vais tirer le corner, il faudra être au premier poteau pour dévier. C’est comme ça qu’on a marqué. » Le ballon laisse Sebastiano Rossi, le portier milanais sans réaction avec une trajectoire qui voit le ballon mourir dans le but au deuxième poteau. « Quel coup de tête de Basile ! Extraordinaire coup de tête de mon Basilou ! » explose Thierry Roland sur TF1 devant des millions de téléspectateurs. Pour Mario Albano, ce n’était pas une surprise de voir finalement Basile Boli être l’homme qui a fait la différence ce soir-là.
« Il avait marqué beaucoup de buts de la tête au cours de ses saisons à l’OM. C’était presque un classique. On peut voir le clin d’œil du destin avec le but du joueur qui était en larmes à Bari, deux ans auparavant, mais on pensait plus au fait que c’était une arme offensive de l’OM. C’était du classique et une option qui a fait la différence ce jour-là. »
Boli s’envole vers la Ligue des Champions
Le plus dur était fait pour Marseille et le public pouvait exploser comme son numéro 4 fétiche qui a vite remis le bleu de chauffe pour aller chercher le trophée de la Ligue des Champions. « Tu as un dixième de seconde d’hystérie et puis la petite et bonne folie. Mais la mi-temps arrive une minute après pour tout casser. Là, Tapie, à la mi-temps, il arrive face à moi : « Alors, comme ça tu voulais sortir ? Non, t’es un homme, tu vas tout casser et t’y retournes ! » On ne panique pas du tout, on reste deux trois minutes chacun dans son truc dans le vestiaire. »
Le reste se passe de commentaires. Marseille tiendra jusqu’au bout et Basile Boli est héroïque. Dès la fin du match, le défenseur marseillais bascule dans le n’importe quoi pour laisser enfin la folie l’envahir. Il repousse ses coéquipiers et cherche à aller partager sa joie avec les nombreux supporteurs présents. De sa voix et du geste, il refuse de voir des larmes.
Basile Boli vient de comprendre que son coup de tête vient de faire la différence. Marseille est champion d’Europe. Il est champion d’Europe… pour l’éternité. Reste maintenant à ses successeurs de relever le défi d’un deuxième titre européen pour ce club qui reste, avec Saint-Etienne, le club préféré des Français.