Le co-président de Frontignan, Sylvain Pelegrin fait un état des lieux entre un début de saison canon inattendu et une situation financière loin d’être florissante. Entretien pour Handball magazine et Le Quotidien Du Sport.
C’est un début de saison rêvé pour Frontignan !
On ne l’a même pas rêvé. C’est un début de saison inespéré. Surtout au regard des changements opérés, des joueurs et de l’entraîneur. Sans occulter évidemment ce rebond après une crise financière compliquée. Elle a mis en danger notre présence en ProLigue. Sincèrement, on ne savait pas comment on allait rebondir. J’étais optimiste malgré tout. De là à rêver que nous pourrions être co-leaders avec huit victoires en neuf matches, c’était inimaginable.
Comment avez-vous traversé ces mois difficiles ?
Avec un sentiment de quasi panique en se disant que tout ce qu’on avait essayé de créer depuis des années pouvait s’écrouler. J’étais avec mon homologue Jean Garait à la tête d’une petite entreprise. Et du coup j’allais mettre en péril l’avenir de mes joueurs, de mes salariés administratifs et plusieurs chefs de familles. C’était quelque chose qui m’était insupportable.
Comment expliquer cette entame de championnat si réussie ?
On repartait avec les moyens du bord. J’avais néanmoins des espoirs sur les joueurs présents. Mais, objectivement, quand vous lisez la liste des noms qui composent notre équipe comparée à celles de Dijon, Saran, Cherbourg, Caen et autre Sélestat, même Nancy avec des joueurs prometteurs, je ne me voyais pas rivaliser avec Dijon en ce début de saison.
La présence de Guillaume (Crépain) constitue la plus belle réussite. C’était un vrai poids, sa première équipe en tant que n°1. Même si je connaissais son esprit club, son esprit maillot, une combativité à toute épreuve, la clairvoyance d’un demi-centre et issu d’une famille de dirigeants investis dans le handball. Ce que l’on cherchait. Il y a donc quelques éléments, mais aucun qui ne suffit à expliquer qu’on soit co-leaders.
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« Frontignan repartait avec les moyens du bord »
Pensez-vous désormais à la StarLigue ?
Si je repense surtout aux origines du club, je n’aurais jamais imaginé aborder ce sujet. Cela serait très présomptueux d’annoncer qu’on va caracoler en tête du championnat sur les deux autres tiers. La pièce est retombée du bon côté souvent cette saison. Retombera-t-elle de l’autre par la suite ? Je l’ignore. Il y a cette objectivité sportive.
Ensuite, il y a la raison financière. Nous nous battons pour trouver cette stabilité financière nous permettant de nous ancrer à ce haut niveau en LNH. Dans l’immédiat, je n’ai pas de pièces dorées enterrées que je pourrais ressortir si nous étions en capacité de monter. Cette montée, je ne l’imagine pas. On va réfléchir à plusieurs solutions.
Cela peut-il être l’arrivée d’un mécène intéressé par le classement de nos joueurs ou plusieurs partenaires désireux de nous accompagner sur un tel projet plus ambitieux ? Si on prétendait monter, il faudrait trouver le budget minimal requis. Donc ce serait une mauvaise/bonne idée (sourire). Il y a également des raisons très factuelles.
On a une capacité de salle très réduite (704 personnes, salle Henri Ferrari, Ndlr). Elle est comble à chaque fois. Les collectivités nous suivent, mais pas au niveau qui permettrait d’aller chercher 3 millions d’euros et une salle de 1500 à 2000 places. Les perspectives de développement avec un outil aussi modeste – on est ravi ,c’est notre Chaudron – mais à l’étage supérieur il n’est pas adapté. Pas mal de raisons m’obligent donc à savoir raison garder.
Sylvain Pelegrin ne dit pas non à la fusion
Quid d’un projet de fusion ?
A l’origine, on a fusionné trois clubs (Mèze, Sète et Frontignan, Ndlr). On était déjà des visionnaires. On a fondé l’intercommunalité avant qu’elle ne se mette en place partout en France. Il y a bien le grand frère à côté, le Montpellier Handball. Ils sont ravis de voir notre développement. Cela leur permet de se tester parfois, d’essayer des joueurs, qui selon eux, ne sont pas encore aguerris au très haut niveau.
Ils peuvent venir s’épanouir chez nous. Eux, comme nous, n’ont pas intérêt à avoir une fusion. Après, il y a des clubs de N1, N2, N3. A moins que nos voisins agathois nous disent par exemple on a un million à mettre sur la table, peut-on travailler ensemble ? Je ne m’interdis rien car la fusion j’ai déjà connue. Cela tendrait à mutualiser les moyens pour viser plus haut, à élargir la base de la pyramide pour que le sommet soit plus haut. Mais je verrais davantage une opportunité avec le monde du privé. Avec un budget d’1,4 million d’euros, c’est accessible à beaucoup de chefs d’entreprises.
Mohed Altrad pourrait-il être cet homme providentiel ?
Il fait partie des noms qu’on nous suggère souvent. Mais je n’ai jamais eu le plaisir d’échanger avec Monsieur Altrad sur le sujet. Parmi les noms qui reviennent et j’espère qu’ils ne s’en offusqueront pas, c’est la famille Nicollin. Des passionnés de sport.
En fin de saison, vous serez donc angoissé par les mêmes problématiques budgétaires et financières ?
Mon angoisse revient plutôt à cette question : comment boucher le trou. Car sur la saison en cours, je suis assez optimiste. Entre les succès, les salles pleines, les partenaires nous rejoignant progressivement, malgré les difficultés des collectivités, seront-elles en capacité à assurer au même niveau leurs subventions dès 2025.
Pourtant, on n’a jamais été aussi bien. Mais il n’en demeure pas moins que je ne vais pas dégager des bénéfices pour arriver à aller rembourser des dettes que j’échelonne avec des échéanciers sur une année. Il faut que des années comme celle-ci se succèdent pour que j’arrive à assainir la situation financière. A partir de là on attaquera une autre partie de la montagne. Je voudrais déjà atteindre ce plateau avant de penser au sommet (sourire).
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