Ancien coureur de Qhubeka (2013-2017, deux participations à la Vuelta en 2015 et 2017), Youcef Reguigui (33 ans), aujourd’hui chez l’équipe malaisienne Terengganu Polygon Cycling Team, fait briller les couleurs de l’Algérie. Entretien réalisé pour Cyclisme Magazine et Le Quotidien du Sport.
Quand on est Algérien, dans un pays fou de foot, comment vient-on au cyclisme ?
En Algérie, le cyclisme reste un sport prisé après le football bien sûr. Par contre, dans les années 80/90, ce sport était un peu oublié. Cela va bien mieux désormais avec le nouveau Ministère, la nouvelle Fédération. Même notre président de la République (Abdelmadjid Tebboune, Ndlr) suit ce sport de près. Cela fait plaisir.
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Comment jugez-vous le niveau global du cyclisme algérien ?
On y va étape par étape. Mais on a de jeunes talents qui arrivent. Je veux bien les encadrer et aller au bout de cette génération. A un moment, on a pu manquer de certains moyens. On mise pas mal sur des courses en Europe et des stages organisés en Belgique, en France par exemple. On fait des kermesses avec les jeunes. On recherche la progression de nos jeunes. Les sponsors devraient affluer davantage aussi. Pour l’instant, la Fédération prend en charge quasiment tout en collaboration avec le Ministère des Sports.
Yacine Hamza est notamment un coureur qui démontre de belles choses.
Effectivement. Il a 26 ans. Il a gagné déjà plus de dix courses cette année (11, Ndlr). C’est un coureur de talent. Il a un contrat maintenant à Dubai (Dubai Police Team, Ndlr). Il figure parmi les coureurs algériens les plus rapides au sprint. Il vient de gagner les Jeux panarabes. On l’a bien protégé jusqu’à la ligne d’arrivée.
Pour le cyclisme algérien, quelles sont encore les difficultés à surmonter ?
On est maintenant plus proche de l’Europe. On n’a aucun souci avec les visas ou les déplacements en Europe, comme la Belgique, la France ou l’Espagne. Ce n’est donc pas un problème de visa auquel nous sommes confrontés, comme pour des pays tels que l’Ethiopie, l’Erythrée, de centre Afrique. Je ne sais pas vraiment quelle est la nature du problème. On a beau faire quelques bons résultats en Afrique, cela n’est pas forcément très suivi derrière. Alors les équipes européennes croient-elles qu’on a peut-être un souci de déplacement ou de visa ? Si je peux adresser un message aux managers d’équipes européennes, je leur dis qu’il n’existe aucun souci de visa.
« Biniam (Girmay), c’est un grand bonheur pour l’afrique. J’espère que deux, trois autres vont suivre sa trace »
Vous enregistrez vous-même de bons résultats, mais vous ne figurez pas dans une équipe de premier plan.
Quand j’avais moins de 23 ans, j’étais en contact avec la Pomme Marseille, mais finalement j’avais choisi d’aller chez MTN-Qhubeka, une équipe africaine. Quand j’étais aussi au Centre mondial, j’étais en contact avec BMC. Cela ne s’est pas fait. Aller dans une équipe française ou européenne d’ici la fin de ma carrière ? Pourquoi pas, mais si on donne la chance à un frère plus jeune, c’est encore mieux. Cependant, à 33 ans, je sens que je peux encore donner. Pour l’instant, je suis avec une équipe malaisienne, Terengganu Polygon, je suis tranquille et à l’aise. J’ai gagné 7 courses cette année. Il y en a encore beaucoup à disputer.
Quel regard portez-vous sur votre carrière ?
Je suis très content de ce que j’ai fait. J’ai tout donné et fait beaucoup de sacrifices. Pour un Africain, ce n’est pas facile de faire 5, 6 ans en pro. J’ai participé deux fois à la Vuelta (en 2015 et 2017, Ndlr). Mais j’aimerais à l’avenir vraiment qu’un coureur algérien fasse bien mieux que moi. Cela me ferait tellement plaisir.
Quel est votre meilleur souvenir ?
Remporter le Tour de Langkawi, ce n’est pas facile (en 2015, Ndlr). Il y a eu aussi cette victoire sur les Jeux Africains en 2019 au Maroc. L’Algérie restait sur 30 ans sans titre. Il y a eu aussi les Jeux panarabes cette année. Je termine 3ème. Mais l’Algérie a gagné donc c’est comme si j’avais gagné la course.
Avez-vous encore un rêve ?
Ce serait celui de voir de plus en plus de coureurs algériens ou africains présents dans des équipes professionnelles, participer à des Giro, des Tours de France… Biniam (Girmay), c’est un grand bonheur pour l’Afrique. J’espère que deux, trois autres vont suivre sa trace. Ce serait mon plus grand rêve.
Avez-vous des amis français dans le peloton ?