A l’exception de Nicolas Anelka, qui n’aura fait que passer au début de sa carrière, de Claude Makelele et, à un degré moindre de Raphaël Varane et de Théo Hernandez, l’après Real a souvent été difficile pour tous les autres Francés.
Lorsqu’il déboule à Madrid à l’été 1999 après deux années pleines de promesses à Arsenal, à seulement 20 ans, Nicolas Anelka ne doute de rien, surtout pas de sa capacité à s’imposer immédiatement dans un vestiaire pourtant déjà bien étoffé… et qui ne regrettera pas son départ quelques mois plus tard malgré une victoire en Ligue des Champions à laquelle il prit toute sa part.
En représentant d’une filière française encore peu utilisée (il est le cinquième après Hon, Kopa, Muller et Karembeu), le Parisien n’a en effet pas toujours été exemplaire dans sa volonté de s’intégrer, de se mettre au service de l’institution Real. Ses états d’âme ont fini par lasser les cadres qu’étaient Raul, Redondo, Morientes, Casillas ou Roberto Carlos, autant que les supporteurs.
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Anelka, trop jeune à Madrid
A bien des égards, cette courte expérience a servi de référence à tous ceux qui sont passés après lui. Encore jeune, Anelka a su rebondir en étant racheté 34 M€ par le PSG, son club formateur, avant d’effectuer une carrière iconoclaste de Liverpool à la Juventus en passant par Manchester City, Fenerbahçe, Bolton ou Chelsea pour ne citer que les plus marquants.
Sans jamais pouvoir remporter une seconde Ligue des Champions. Comme si, en quittant précipitamment le Real, il avait aussi inconsciemment scié la branche qui pouvait le propulser tout en haut de l’arbre.
En pleine période Galactique, le départ de Claude Makelele a été plus regretté par les Madrilènes tellement l’ancien chouchou de Coco Suaudeau avait su se rendre indispensable.
Makelele, si indispensable au Real
Mais s’estimant trop lésé financièrement dans une équipe de stars qui accueille David Beckham, il va au bras de fer pour rejoindre, à 30 ans, Chelsea où il va connaitre cinq saisons de très haut niveau, deux titres de champion d’Angleterre, une finale de Ligue des Champions (6 ans après l’avoir gagnée avec le Real) et une finale de Coupe du Monde en 2006 perdue aux tirs au but. Vingt ans après, Zidane estime encore qu’avec Makelele dans son moteur le Real n’aurait pas été Galactique que dans les médias !
Raphaël Varane reste le troisième Merengue à avoir plutôt bien géré sa période post-Madrid. En rejoignant Manchester United à 28 ans, une équipe en plein doute, le quadruple vainqueur de la Ligue des Champions a forcément perdu au change, mais sans trop perdre en compétitivité.
En même temps que de s’adapter à la Premier League, digérer dix années madrilènes n’a pas été simple, mais il est tout de même parvenu à conserver son statut d’international pour vivre une deuxième finale de Coupe du monde d’affilée. Aujourd’hui à Côme, en Serie A, il termine à 31 ans une carrière qui restera à jamais estampillée Real.
Enfant de Madrid, mais de l’Atlético où il a été formé, le cadet des Hernandez, Théo, est resté deux ans au Real où un contrat de six ans aurait pu lui permettre de franchir les échelons. Barré par Marcelo, son prêt à la Real Sociedad, où il s’imposa, le poussa vers le Milan AC où il n’a cessé, depuis 2019, de monter en régime, au point de décrocher un titre de champion d’Italie en 2022 quelques semaines avant une finale de Coupe du monde avec d’autres anciens madrilènes dont Alphonse Areola qui avait entre-temps rebondi à Fulham et à West Ham.
Lassana Diarra ne s’en est jamais vraiment remis…
Alors qu’il avait enfin réussi à s’exprimer dans la durée à un très haut niveau, après pas mal de déceptions du côté de Chelsea, Arsenal et Portsmouth, c’est peu de dire que Lassana Diarra n’a pas profité comme il l’aurait dû de ses quatre belles saisons à Bernabeu. A 27 ans, son départ vers le club russe du FK Anji Makhatchakala, à un an de la fin de son contrat, et son rebond forcé vers le Lokomotiv Moscou, ont été catastrophiques.
Un litige financier avec le club moscovite lui a interdit un transfert vers l’Inter Milan, lui a imposé une pause d’un an sans jouer, lui a infligé une amende de 10 M€. A 30 ans, son heure était passée, son passage à l’OM et au PSG ne faisant que raviver les regrets.
Karembeu, 3 années merveilleuses à Madrid
C’est la trentaine bien atteinte que Christian Karembeu a tourné la page blanche après trois années ponctuées d’une Ligue des Champions. Plus vraiment une priorité au Real, de moins en moins utilisé en équipe de France après l’Euro 2000, il relève le défi de Middlesbrough en Premier League avec, au final, pas mal de frustration.
Avant de finir à Bastia, son envol vers l’Olympiakos lui offre une dernière grosse dose d’adrénaline et quelques soirées mémorables de Ligue des Champions, mais sans jamais retrouver le niveau qui était le sien à Madrid.
Déjà en pleine dynamique, la carrière du néo-international (1 sélection en 2006) Julien Faubert profita dans un premier temps à pleine mesure des 52 petites minutes effectuées sous la tunique blanche entre janvier et juin 2009. Prêté par West Ham, son retour à Londres se révèle d’abord payant puis plus difficile dans la lignée d’une équipe qui ne peut assurer son maintien.
A 27 ans, son apogée passée, il rentre à Bordeaux après un détour par la Turquie, pour finir en Ecosse, en Finlande et en Indonésie… comme si Bernabeu n’avait été qu’un mirage.
De tous les Français du Real, le destin de Lucien Muller est certainement celui qui a suscité le plus de rancoeur car l’ancien double champion de France rémois est passé sans transition chez l’ennemi catalan (1965-1968) où il a gagné une Coupe du Roi en 1968 aux dépens… du Real !
Et de retrouver même l’Alsacien, qui a fini sa carrière de joueur à Reims, sur le banc du Barça dix ans après le temps de se hisser en finale de la Coupe d’Europe des Vainqueurs de Coupes 1979 et d’être remplacé quinze jours avant par Rifé. Il demeure encore à ce jour l’unique entraîneur français du Barça.
Lucien Muller, successeur de Kopa
A Madrid, les supporteurs l’avaient surnommé le Petit Kopa, à qui il avait eu la lourde tâche de succéder en 1962, trois ans après le retour du vrai Kopa au Stade de Reims. Fort d’une belle Coupe du monde 1958 (3ème), le futur Ballon d’Or refusa de prolonger de plus d’un an son contrat dans un club qui lui proposait quatre ans supplémentaires. Son désir de rentrer au pays était plus fort.
A 28 ans, il avait pourtant encore de belles années devant lui qu’il mit au service du Stade de Reims pour deux nouveaux titres de champion de France (1960 et 1962) et un dernier baroud d’honneur jusqu’en quarts de finale de la Coupe d’Europe des Clubs Champions en 1963 face au Feyenoord Rotterdam, un an avant la descente du club en D2.
C’est déjà la trentaine atteinte que Jean Luciano et Louis Hon firent leurs valises, le premier pour Las Palmas, le second pour le Stade Français, dernières destinations avant la retraite. Karim Benzema avait 34 ans et la possibilité de rejoindre Lyon, ou d’autres clubs de dimension européenne, lorsqu’il préféra s’engager à Al-Ittihad, en Arabie Saoudite, comme si, après 14 ans, il lui semblait vain d’espérer poursuivre sa carrière ailleurs que dans le club qui lui permit de devenir le meilleur joueur du monde en 2022.