vendredi 31 mars 2023

Bruno Martini : « Nous allons aider les clubs à conserver leurs jeunes »

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Arnaud Bertrande
Arnaud Bertrande
Rédacteur en chef — Pole Sport Lafont presse

Le double champion du monde Bruno Martini (1995 et 2001) et ancien gardien parisien a été élu, le 29 novembre dernier, à 51 ans, à la tête de la LNH. Le successeur de David Tebib cible ses priorités. Entretien pour Le Quotidien du Sport et Handball magazine.

Pourquoi vous êtes-vous présenter à la présidence de la LNH ?

J’ai été sollicité depuis plusieurs mois. C’est déjà quelque chose que j’avais en tête. J’étais parti chez Team Vitality (équipe d’e-sport, Ndlr) à ce moment-là et cumuler les deux casquettes aurait sans doute été de trop. J’ai changé d’activité professionnelle entre temps.

Je remercie mon employeur actuel Olympact qui permet de cumuler les deux activités. J’ai été l’un des fondateurs de l’AJPH (Association des Joueurs Professionnels de Handball, Ndlr). Il n’y a pas d’homme providentiel, je crois en la collectivité.

C’est pour cela que j’ai axé une grande partie de mon programme sur la synergie de beaucoup d’éléments surtout à travers les familles et la Fédération. Pour moi, c’est primordial car je ne pense pas que le handball soit assez puissant pour continuer de s’en sortir ou de progresser de façon individuelle. Nous avons un grand intérêt à afficher la forte capacité du handball à travailler ensemble.

Vous dites que le handball n’est pas assez costaud pour progresser individuellement. Pourriez-vous développer ?

Le poids médiatique et économique du handball est ce qu’il est. Il n’est pas au même niveau que d’autres sports. Une ligue de rugby peut se développer seule, elle peut dénicher des contrats de diffusion télévisés très élevés. Dans le handball, on n’a pas la capacité de le faire. On est un sport avec de grandes et belles valeurs, mais on est un sport qui doit encore progresser sur sa médiatisation, son attractivité et sur ses audiences.

C’est un constat qui est fait à chaque présidence.

Nous allons travailler sur des canaux de diffusion et des formats qui seront différents. Nous avons la chance d’avoir verrouillé un contrat avec un diffuseur (BeIN SPORTS, Ndlr) jusqu’en 2026. La Fédération a commencé à travailler sur d’autres formats pour piocher un nouveau public. Nous devons faire un travail auprès des licenciés car le handball est un sport qui se pratique plus qu’il ne se regarde. A terme, nous souhaitons inverser cette tendance.

« J’ai toujours défendu tous les clubs même quand j’étais au PSG »

Pouvez-vous détailler des éléments de votre programme ? Et lequel est le plus important à vous yeux ?

Nous allons travailler sur la visibilité, le développement économique et surtout sur notre identité. La Ligue doit être le moteur d’une cause commune partagée par tout le monde et qui doit s’intégrer dans la société. Le handball comme tous les autres sports ou activités culturelles appartient à la société, nous devons donc nous rapprocher de cette dernière.

C’est pour cette raison que nous devons divulguer les valeurs que l’on porte. Nous ne sommes pas à l’abri de dérapages même si, pour l’instant, nous n’avons pas encore connu d’écarts. Nous devons appuyer plus fort là-dessus. Ce positionnement a des valeurs humaines premières, mais également économiques.

C’est ce qui permet à des entreprises de se reconnaitre dans le handball. C’est donc un échange qui est bénéfique pour les clubs français, pour les villes et pour la Ligue.

En quoi les résultats de l’équipe de France aux Jeux Olympiques peuventils être une locomotive pour les championnats de France masculin et féminin ?

Historiquement, les résultats de l’équipe de France aux JO ont toujours été un tremplin pour les championnats, cela a commencé en 1992 à Barcelone. La Fédération Française connait une augmentation des licenciés après l’année catastrophique de 2020.

Il y a surtout 200 000 nouveaux adhérents. Dorénavant, il faut montrer à ce public qu’il existe une Ligue de proximité, mais aussi une Ligue professionnelle. C’est ainsi que le lien entre le monde professionnel et amateur pourra se solidifier.

Bruno Martini compte sur les 200 000 nouveaux adhérents

D’un point de vue économique, qu’estce que les Jeux Olympiques apportent au handball français ?

Plus les gens regardent le handball, plus les partenaires sont intéressés. C’est à nous de deviner un sport plus populaire pour toucher un maximum les investisseurs. Aujourd’hui, il y a plus de licenciés au handball qu’au rugby, mais on ne le retrouve pas forcément en matière d’exposition.

Quel est le positionnement de la Ligue concernant l’EHF car les joueurs enchaînent de plus en plus de matches ?

J’ai été très heureux de voir que certains joueurs ont protesté. L’EHF est une institution qui n’a pas la culture de parler aux clubs. Elle a ouvert des espaces de discussion avec chaque ligue, mais comme son nom l’indique, ce ne sont pas des espaces de décision.

Je ne crois pas trop à une alliance avec une autre ligue telle que la Bundesliga. Le championnat allemand a une prédominance de par son histoire et sa langue. C’est pour cela que nous devons devenir assez forts pour devenir des marqueurs prégnants seuls.

Votre expérience en tant que manager du PSG est-elle un avantage ? Comment rassurer les autres clubs qui n’ont pas les mêmes problématiques ?

Si j’ai été élu, c’est parce que les clubs savent très bien que lorsque je siégeais à l’UCPH (Union des Clubs Professionnels de Handball, Ndlr), je défendais tous les clubs peu importe leur taille. Pendant des années, j’ai été à la rencontre des clubs quel que soit leur niveau. A chaque fois, cela s’est bien passé car j’ai essayé de faire en sorte qu’on trouve un terrain d’entente.

Bruno Martini espère soutenir les jeunes handballeurs

Comment faire pour conserver nos jeunes joueurs qui partent à l’étranger ?

Nous allons travailler pour éviter cet exode car il touche tous les clubs. C’est une concurrence avant tout économique. Nous allons aider les clubs à se développer économiquement afin qu’ils puissent garder leurs joueurs. Ce n’est pas un bon choix pour les jeunes de quitter les clubs français à deux ans des Jeux Olympiques.

Aujourd’hui, les transferts se signent parfois deux ou trois ans à l’avance. Cela ne pose-t-il pas un problème ?

C’est pénible. Evidemment, lorsque j’étais au Paris Saint-Germain, c’est quelque chose que j’ai utilisé, mais je n’avais pas mon mot à dire. Aujourd’hui, la Fédération Européenne ne veut pas réguler cela, contrairement à la FIFA en foot.

Il faut impérativement que la Fédération Européenne règle cela sinon les clubs français vont continuer de perdre leurs joueurs deux ou trois ans à l’avance. Les clubs qui forment ne sont jamais valorisés, les joueurs ne sont pas garantis d’être au niveau deux ans plus tard et surtout cela pose un problème d’éthique puisqu’un joueur peut affronter son futur club en Ligue des Champions. Je serai en accord pour créer une nouvelle mesure plus protectrice qui répartira mieux les richesses.

L’instauration de play off pourrait-elle relancer une forme d’attractivité autour du championnat de France ?

Il y a une réflexion globale à avoir sur les compétitions et j’englobe les coupes. Mais il faut manier cela avec précaution car il faut l’intégrer dans un calendrier européen. Il y a aussi la problématique des clubs qui ne participent pas aux play off, ceux éliminés tôt. Je ne suis pas fondamentalement contre, mais il faut trouver la bonne formule.

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