vendredi 19 avril 2024

François Jauffret (Roland Garros) : « Pour ma demi-finale en 1966, j’ai gagné 2500 francs »

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En 20 ans de carrière, François Jauffret a atteint deux fois (1966 et 1974) le stade des demi-finales de Roland-Garros. Tony Roche et Manuel Orantes l’ont empêché de rêver de conquêtes.

Avant votre demi-finale de 1974 vous aviez atteint ce stade de la compétition en 1966. Est-ce que cela vous a servi ?

Les époques étaient vraiment différentes, en huit ans beaucoup de choses avaient changé. En 1966, par exemple, on n’avait pas de courts en terre battue, en 1974 je m’étais préparé différemment.

J’habitais Chantilly, entre mon quart le mercredi et ma demi le vendredi je ne suis pas venu m’entraîner à Roland-Garros le jeudi alors qu’en 74 j’avais pu venir m’entraîner entre les deux tours.

En 74, le public répondait aussi de manière plus importante, en 66 il n’y avait pas grand-monde dans les tribunes, 3000 à 4000 spectateurs. Les prix étaient différents aussi. Comme prix pour ma demi-finale, en 1966, j’ai gagné un bon d’achat de 2500 francs.

En 1966, je ne me rendais pas compte ce que représentait Roland-Garros. Marcel Bernard a gagné en 49, Noah en 83 et c’est tout. Le peu de vainqueurs français montre comment c’est difficile de gagner Roland-Garros et même d’arriver en finale ou en demi-finale.

J’ai vécu les trois périodes, celle de l’amateurisme en 1966, du semi-professionnalisme à partir de 1970 et le professionnalisme après 1975.

Quelle est la demi-finale qui vous a laissé le plus de regrets ?

Celle de 1974 contre Manuel Orantes. Il m’a largement battu (6-2, 6-4, 6-4) alors que je l’avais battu à Hambourg quelques semaines avant, mais je n’ai pas réussi à retrouver le revers qui m’avait permis de le battre. Je jouais bien, mais il m’a usé tactiquement. Je n’aimais pas rencontrer les gauchers.

Mon meilleur coup était la volée, j’avais beaucoup plus de mal à retourner en revers et le gaucher arrivait toujours à trouver mon revers sur le service. J’étais déçu car j’arrivais toujours à l’accrocher. En plus, cette année-là, j’avais réussi l’exploit de battre en 8èmes de finale Jan Kodes qui a gagné deux fois le tournoi.

« Si j’avais battu Borg en 1976… »

Cet exploit contre Kodes n’était-il pas pour vous une finale avant la lettre ?
Non, pas du tout. Je suis resté concentré sur mon tournoi après ce 8ème de finale. Orantes était un des grands favoris de la compétition. Moi j’étais environ et régulièrement dans les vingt mondiaux mais, ce qui me rendait dangereux, c’est que je battais les meilleurs joueurs de terre battue :

Emerson, Newcombe, Roche, etc., mais je ne les ai jamais battus en finale de Roland-Garros, c’est ce qui m’aura manqué dans ma carrière, accéder à une finale de Roland-Garros et battre un des meilleurs mondiaux en finale.

Vous avez joué très longtemps, avec notamment deux demi-finales de Roland-Garros en huit ans. A quoi était due cette longévité?

Je jouais peu, on démarrait les carrières plus tard aussi. Il arrivait que je ne joue pas pendant trois mois et que je fasse beaucoup d’entraînements physiques. Je jouais principalement l’été et puis c’était un autre monde, je travaillais à côté, j’ai été responsable commercial pendant seize ans.

« Je n’ai pas réussi à retrouver le revers qui m’avait permis de battre Orantes »

Avec le recul, avez-vous un regret concernant votre carrière ?

Je n’ai pas de regrets ou alors peut-être celui de ne pas avoir gagné une fois Roland-Garros alors que j’ai battu tous les meilleurs à un moment donné de ma carrière.

C’est vrai aussi qu’une victoire sur Borg en 1976 aurait été quelque chose de phénoménale. J’ai perdu en 8èmes de finale contre lui avec un 10-8 au 5ème set (4-6, 2-6, 6-3, 6-4, 8-10). J’avais servi pour le match. C’était un score incroyable car tout le monde prenait 6-1, 61 contre Borg à l’époque. Au tour suivant, Adriano Panatta a battu Borg, beaucoup de gens ont dit qu’il pouvait me remercier de l’avoir fatigué.

J’étais invaincu contre Panatta, il était donc peutêtre content de ne pas me rencontrer. Les images de ce match contre Borg, je les garderai dans ma tête jusqu’à la fin de mes jours. Quand il n’y a pas la victoire au bout, il y a des remords. Quand JoWilfried Tsonga a failli battre Novak Djokovic en 2012 en quarts de finale (1-6, 7-5, 7-5, 6-7, 1-6), j’ai eu de la peine pour lui, j’ai repensé à mon propre match contre le Suédois.

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