Rencontre avec Francis Coquelin, le milieu français de Villarreal, vainqueur de la Ligue Europa. L’ancien Gunners revient sur son parcours pour Le Foot magazine et Le Quotidien du Sport.
Quand il est entré en jeu, à la 60ème minute de la finale de la Ligue Europa entre Villarreal et Manchester United, Cavani venait d’égaliser, le score allait en rester là. Francis Coquelin participerait au sans faute de l’interminable série de tirs au but pour devenir, à 30 ans, un des rares joueurs français à gagner la Ligue Europa. Tout sauf une surprise car rayon finales, l’ancien Gunners, connait. Il a gagné les six qu’il a disputées dans sa carrière. Un vrai (porte) bonheur !
Le grand public français vous connait peu, et pour cause, vous êtes parti à 17 ans en Angleterre pour ne revenir qu’un an à Lorient et repartir aussi vite en Espagne. Comment avez-vous géré votre début de carrière ?
Je viens d’un petit club près de Laval (AS Bourny Laval, Ndlr) où j’ai débuté le foot par passion, pour être avec mes potes, sans imaginer que je pourrais devenir un jour professionnel. L’idée a commencé à germer lorsque j’ai signé à Laval. En jouant très vite et très jeune en CFA, j’ai pris conscience que j’avais peut-être un potentiel à exploiter.
De là à signer à Arsenal !
Je suis passé du National avec le Stade Lavallois à la Ligue des Champions… c’était de la folie, un vrai saut dans le vide. Je ne m’y attendais vraiment pas et j’ai un temps réfléchi à la possibilité de rejoindre un club intermédiaire. Arsenal au début des années 2000 jouait la Ligue des Champions tous les ans avec des joueurs immenses, tous internationaux. Même si ça paraissait compliqué, je me suis dit qu’il ne fallait pas que je manque ce train-là. Surtout que le club accueillait beaucoup de joueurs français. Je pensais que ça faciliterait mon intégration.
Avec le recul, regrettez-vous d’être parti si tôt, si haut ?
Non, parce que rien ne dit que ma carrière aurait été meilleure sans ça. Je n’ai pas choisi la facilité, j’ai mis du temps à m’imposer, mais ce fut une grosse expérience. Mais j’ai vite compris que signer dans un tel club n’était pas une fin en soi. Quand vous arrivez à Arsenal, il ne faut surtout pas croire que c’est arrivé. Ce n’est que le début d’un long et difficile processus, fait de travail et sacrifices.
Francis Coquelin – 10 ans à Arsenal
Vous êtes resté dix ans à Arsenal entrecoupés de trois prêts à Lorient, Fribourg et Charlton…
Ces prêts ont été aussi importants dans mon parcours que les saisons pleines jouées avec Arsenal. Parce que j’ai découvert d’autres championnats, d’autres approches de la compétition et d’autres coachs, avec des visions différentes du football.
Au final, ces dix années ont été très positives, en tout cas, j’ai toujours voulu ne retenir que le positif, ce qui pouvait me faire avancer. Et quand j’ai quitté Arsenal, je savais que j’étais allé au bout de quelque chose en ayant eu la possibilité de m’exprimer, d’avoir ma chance, de montrer ce que j’étais capable de faire et de gagner des trophées (deux FA Cup, un Community Shield, Ndlr).
Après ces trois finales gagnées, qui s’ajoutaient à la finale du Championnat d’Europe U19 gagnée en 2010 avec la France, vous en avez encore gagnées deux autres avec Valence (Coupe du Roi 2019) et évidemment avec Villarreal en mai dernier…
J’aime les matches à fort enjeu, à pression. Cette atmosphère de quitte ou double peut faire déjouer certains, moi, elle me transcende encore davantage. Jusqu’à présent, j’ai eu la chance de toutes les gagner, c’est sympa.
La Premier League (Arsenal), la Ligue 1 (Lorient), la Bundesliga (Fribourg) et la Liga (Valence, Villarreal), lequel de ces quatre championnats vous correspond le mieux ?
J’ai eu une expérience plus difficile à Fribourg (2013/2014), mais sans que cela soit forcément lié aux caractéristiques du championnat allemand. Tous ont leur spécificité. Il faut croire que la Liga me correspond bien parce que je m’y épanouis depuis quatre saisons. Ou alors peut-être est-ce en raison d’une maturité supérieure… Je ne sais pas. Le fait est que désormais j’aurais du mal à revenir en Angleterre. Je me suis trop habitué au soleil.
« J’aime les matches à fort enjeu »
Et en France ? Votre nom est dernièrement sorti sur la liste de l’OM…
Déjà parce qu’ils sont nombreux à se qualifier tous les ans pour l’Europe. Avec le Barça, le Real et l’Atlético, vous retrouvez toujours le FC Séville, Valence, Villarreal, la Real Sociedad… avec énormément d’expérience. Mais l’Angleterre revient fort aussi. Cette année, si nous n’avions pas éliminé Arsenal, on aurait eu deux finales 100% anglaises.
Peut-on dire que votre club de coeur restera toujours Arsenal ?
J’ai passé dix ans de ma vie là-bas, entre 17 et 27 ans, ça marque forcément. J’y ai croisé un entraîneur qui m’a beaucoup marqué, Arsène Wenger. Il a eu une grande importance dans mon parcours… et il a fini par me donner ma chance. Lorsqu’il a quitté le club, je lui ai envoyé un message.
Il m’a aussi appelé lorsque je me suis blessé (rupture du tendon d’achille en 2018, Ndlr). Je pense avoir laissé une bonne image partout où je suis passé. A Lorient, ça fait dix ans déjà, je n’avais que 19 ans, mais j’ai encore des contacts avec des kinés ou des joueurs. Je n’oublie pas le soutien de tout le club de Valence après ma blessure. Ils m’ont encouragé et aidé à revenir. Ici, à Villarreal, j’ai reçu aussi un accueil formidable.
300 matches pro pour Coquelin
En plus de 300 matches pros, lequel avez-vous vécu le plus intensément ?
Ma plus forte émotion a peut-être été ma première, une finale de Cup que nous gagnons 4-0 face à Aston Villa en 2015. Ce fut moins pour le match en lui-même que l’histoire qu’il y a derrière parce que, six mois avant, j’étais en D2 anglaise à Charlton. La victoire en Coupe du Roi avec Valence en 2019 est intervenue aussi après une blessure de sept mois. En plus, c’était contre le Barça.
Comment voyez-vous votre avenir ?
Je n’aspire qu’à une seule chose : être à 100% de mes moyens physiques. Cette saison encore cela n’a pas pu être le cas, mais si je retrouve la totalité de mon potentiel, je sais que derrière ça suivra. Il y a encore de beaux projets devant moi, de beaux défis à relever avant que mon corps dise peut-être stop (rires) !