Pour la première fois depuis 2010, la meilleure formation française de l’année va préparer sa saison sans son duo Thibaut Pinot-Arnaud Démare. Mais pas de quoi perturber pour autant un manager qui en a vu d’autres et qui espère avoir déjà leurs successeurs en magasin.
Ça vous fait quoi d’avoir à préparer une saison sans deux de vos plus emblématiques coureurs, Pinot et Démare ?
Ça fait partie de la vie d’une équipe. Nous sommes là depuis longtemps (1997), avec de nombreux changements de générations. Quand Gilbert, Casar ou Bouhanni sont partis, il a bien fallu les remplacer pour assurer la continuité.
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Tous n’ont tout de même pas eu le même impact que ces deux-là, surtout Pinot dont la popularité est sans précédent.
Je me répète, mais en ce qui le concerne il n’y a pas d’autres choses à dire que ça s’explique par l’authenticité qu’il dégageait et qu’il n’a jamais cessé de transmettre.
Tout le monde s’accorde pour dire qu’il a réussi sa sortie.
(Il coupe) Oui, bien sûr, voir tout cet engouement au Tour de Lombardie a été formidable. Il a eu une sortie donc beaucoup peuvent rêver. La sortie qu’il méritait.
Mais a-t-il eu selon vous la carrière qu’il méritait ?
Franchement, je suis en paix pour lui et pour l’équipe. On peut toujours faire mieux. Avec des si… La vie a donné son verdict et il est très flatteur pour lui.
Les membres du CUP, le Collectif Ultras Pinot, nous ont dit que vous les aviez sollicités pour poursuivre leur engagement auprès de la Groupama-FDJ. Est-ce exact ?
Oui, bien sûr, mais nous n’en sommes qu’au stade de la discussion et il s’agit d’un souhait de ma part. On doit se revoir pour en parler, mais si déjà on peut se réunir sur quelques occasions, ce serait bien.
Marc Madiot veut faire aussi bien en 2024 qu’en 2023
Quel bilan faites-vous de la saison 2023 ?
La saison a été correcte, j’en veux pour preuve notre 7ème place au classement mondial, notre meilleur classement. Nous étions 8èmes l’an passé, la progression est là. Nous sommes largement la meilleure équipe fran-çaise en nous situant juste derrière les mastodontes du World Tour. Nous n’avons donc pas trop mal travaillé même si on peut toujours espérer davantage de victoires (19 en 2023 contre 20 en 2022 et 23 en 2021 pour un record de 33 en 2023, Ndlr).
Nous avons terminé 29 fois deuxième, 19 fois sur les épreuves du World Tour, ce qui est moins bien qu’en 2022, mais pas plus mauvais non plus en fonction du niveau d’analyse qu’on privilégie. Par exemple, nous avons eu 10 coureurs qui ont au moins gagné une fois dont pas mal qui sont issus de la Conti (Martinez, Grégoire, Penhoët, Stewart, Pithie). Donc pour eux, l’examen de passage a été plus que réussi.
De quoi vous donner plus d’ambition pour 2024 ?
Ni plus ni moins que d’habitude. On essaiera de gagner un maximum de courses et de faire un bon Tour de France. Je ne peux pas vous dire autre chose.
N’attendiez-vous pas davantage de Gaudu ?
On aurait espéré mieux sur le Tour, car il avait répondu présent sur Paris-Nice (2ème), mais sa 9ème place dans un contexte très relevé n’est pas neutre. Loin de là.
Vous sentez-vous à votre aise dans le World Tour aujourd’hui ?
Je fais avec. De toute façon, je n’ai pas le pouvoir de changer le système. Si je l’avais, je modifierais certaines choses. On est sur un modèle qui existe depuis plus de cent ans. Peut-être est-ce le moment d’envisager de le changer, même si tout le monde n’en a pas forcément envie. La situation économique n’est pas si florissante que ça. Même certaines grandes épreuves sont sur le fil du rasoir.
« Pour les jeunes issus de la conti, l’examen de passage a été plus que réussi »
Suffisamment pour remettre en cause le modèle économique actuel ?
D’une manière ou d’une autre, le cyclisme survivra toujours. La difficulté actuelle tient à la faiblesse de son réservoir, avec de moins en moins de licenciés car les coûts de fonctionnement sont en augmentation, en partie liés aux problèmes de sécurité.
D’un autre côté, la couverture télé n’a jamais été aussi bonne, mais elle ne concerne que les trois grands Tours et les Classiques belges. Les autres épreuves sont obligées de produire leurs propres images.
Que pensez-vous du tracé du prochain Tour de France ?
J’ai toujours pris ce qu’on me donnait en sachant que, comme tous les ans, il faudra s’adapter aux circonstances. Cette année, il n’y aura pas les Champs-Elysées, mais Nice, ça va faire drôle. Le rythme s’annonce intense, dès le début en Italie, et jusqu’à la fin, car il n’y aura pas beaucoup de temps morts, c’est bien pour le spectacle.
On a encore le temps d’étudier tout ça et d’entrer dans les détails. J’ai assez d’expérience pour savoir qu’entre la présentation du parcours et la réalité du terrain, il peut y avoir une grande différence. Ce sera mon 36ème Tour (9 comme coureur, 26 comme manager) et je l’aborderai avec le même enthousiasme que le premier, avec le même enthousiasme qu’au départ d’une Etoile de Bessèges ou des Boucles de la Mayenne. Le plaisir est le même.
N’est-il tout de même pas supérieur sur certaines épreuves ?
J’ai toujours eu un faible pour les Flandriennes parce que j’aime leur ambiance et leur style, rugueux et plein d’adrénaline.