Il y a ceux qui doutent et ceux qui sont certains que le recrutement de l’international polonais de Naples va permettre à l’OM d’encore rêver à une qualification européenne. Une chose est sûre, si, à 27 ans, Arkadiusz Milik a le profil d’un grand attaquant, c’est parce qu’il l’a déjà été.
Au contraire des dernières recrues qui avaient signé pour endosser le costume de « grantatakan » , Kostas Mitroglou ou Dario Benedetto, Arkadiusz Milik a l’avantage de l’avoir déjà porté, avec succès, au plus haut niveau international. 56 buts en 98 matches avec l’Ajax, 48 en 123 matches avec Naples, 15 en 56 sélections avec la Pologne…
Son bilan statistique se passe de commentaires et fait de lui, clairement, un des meilleurs buteurs européens de ces cinq dernières saisons. C’est incontestable… quand c’était encore à prouver pour ses deux prédécesseurs. En fait, le 21 janvier dernier, quand il signe son prêt de 18 mois avec une option d’achat estimée à 8 M€ hors bonus, une seule chose inquiète le staff marseillais : son manque de compétition.
Mis de côté par le président napolitain, qui lui reprochait de ne pas avoir voulu prolonger son contrat, son dernier match remontait au 8 août 2020, soit cinq mois sans match. Nonobstant une réalité qui, en même temps, a rendu possible le transfert, tous les autres voyants semblaient être au vert au moment d’attaquer ce qu’il définit lui même comme « un défi », largement à la mesure de son talent et de ses états de service en Serie A, un championnat réputé plus difficile que la Ligue 1 pour les attaquants de son calibre.
Les anciens de l’OM disent oui à l’ancien joueur de Naples
Parmi les observateurs, il y avait donc les optimistes et les plus réticents. Dans la première catégorie, la double culture franco-italienne de Fabrizio Ravanelli lui permettait de ne pas trop douter. « C’est un grand joueur, très fort dans les vingt derniers mètres. C’est le joueur parfait pour l’OM. Il a beaucoup de qualités : frappes du droit, du gauche, et il est adroit sur les coups francs et bon de la tête.
À Marseille, il va retrouver la même ambiance qu’à Naples, une ville qui vit pour le foot, et ne sera pas dépaysé. Il a en tout cas déjà prouvé qu’il pouvait s’exprimer et être bon dans ce contexte, ce qui est loin d’être le cas de tous les attaquants qui signent à Marseille. »
L’ancien attaquant olympien (1997-1999) est rejoint dans son analyse par Ludovic Obraniak, ancien coéquipier de Milik en sélection polonaise, sur le plateau de L’Equipe TV dont il est consultant :
« L’OM fait une bonne opération et se paye un attaquant de haut niveau à moindre coût. Avec l’espoir qu’il augmente sa valeur (estimée aujourd’hui à 22 M€, Ndlr) d’ici la fin de son contrat et permette de faire une plus-value. En raison du contexte sanitaire, de la situation financière de l’OM… c’est presque inespéré. Car c’est un joueur d’expérience qui ne sera pas inhibé par la pression. Il a beaucoup de caractère et d’ambition et l’OM est le club idéal pour lui aujourd’hui. C’est en tout cas un beau pari pour les deux, le joueur et le club. Mais attention, ce n’est pas Lewandowski non plus… »
Même l’éternel Papin, consultant BeInSports, semble convaincu… ou presque : « Il manquait un joueur de ce profil à l’OM qui joue en 4-3-3… Milik est un grand attaquant qui est capable de marquer beaucoup de buts, il l’a prouvé en Italie. Mais le problème n’est peut-être pas celui de l’attaquant plutôt celui de ceux qui doivent lui donner de bons ballons… »
« Il a besoin des autres pour marquer »
Le bémol qu’il introduit dans son appréciation se transforme en vrai handicap pour un autre ancien attaquant olympien, Marc Libbra : » Pour moi, l’OM n’a pas le jeu pour un joueur comme Milik. D’ailleurs, en l’absence de cadres capables de prendre le jeu à leur compte, aucun buteur ne peut s’exprimer à l’OM. Lui ou un autre, ça ne changera pas grand-chose. En plus, comme il n’a pas joué depuis longtemps, j’ai bien peur que l’OM ne serve qu’à le remettre en selle pour son prochain club. »
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Dans le même registre, les propos de Pierre Ménès ouvrent la porte à… une nouvelle erreur de casting : « Milik, c’est avant tout un finisseur. Il n’est pas forcément capable de se démerder tout seul avec la balle, pour faire des différences individuelles et ne dépendre de personne d’autre que de lui. Il a donc besoin des autres pour exister, pour marquer…
Et à ce niveau, on ne peut pas dire que l’OM possède des joueurs capables de le mettre en valeur, sinon ils l’auraient déjà fait avec un Benedetto souvent sevré de ballons. Le départ de Sanson n’arrange pas les choses… »
Et c’est vrai que du haut de son mètre quatre-vingt-six, Milik est plus souvent à la fin qu’au début des actions. En bout de chaîne, il est là pour convertir le travail collectif, pas pour l’impulser ou le transcender.
Pour qu’il puisse exprimer ses grosses qualités de finisseur, qu’il montre sa puissance de frappe, et son sens du but, de la trajectoire, il aura besoin d’un Payet et d’un Thauvin au sommet, de latéraux capables de lui délivrer des centres exploitables, et éventuellement, en fonction du système de jeu choisi par l’entraîneur, d’un autre attaquant à ses côtés.
Milik peut-il se démarquer à l’OM ?
A priori, Germain a davantage le profil que le plus statique Benedetto pour lui libérer des espaces, le solliciter en appui ou en soutien pour mieux le mettre en position de frappe. D’un attaquant de fixation, à l’autre, peut-être que le cv de Milik, supérieur à celui de Mitroglou ou Benedetto, poussera les cadres marseillais à davantage le chercher, le coach à mettre en place une organisation plus axée sur lui.
Il en va certainement de l’avenir du gaucher polonais dont l’une des principales qualités, la force mentale, lui a permis d’exister dans l’ombre de la légende de son pays, Lewandowski, et malgré de nombreuses blessures qui ont ralenti sa progression. A Naples, il a ainsi été blessé à cinq reprises, dont deux fois sérieusement à un genou, pour être éloigné des terrains pendant 300 jours. Ce point d’interrogation supplémentaire pour calmer l’ardeur de ceux qui en faisaient déjà le grantatakan tant attendu. Un attaquant qui a déjà manqué le Classico pour cause de blessure à la cuisse contre Lens…