Ecarté de Dunkerque après en avoir été joueur (2005-2008), entraîneur adjoint (2008-2011) puis entraîneur (2011-2022 avec notamment un titre de champion de France en 2014), Patrick Cazal, qui vit toujours à Dunkerque, a désormais pour mission de redonner son lustre d’antan à une équipe de Tunisie non qualifiée pour les derniers JO, 25ème des Mondiaux 2021 et seulement 4ème de la CAN. Entretien réalisé pour Handball Magazine et Le Quotidien du Sport.
Comment vous êtes-vous retrouvé sélectionneur de la Tunisie ?
Chaque métier est fait d’opportunités. Celle-ci s’est présentée, sans doute au bon moment pour moi après une pause de trois mois qui m’a permis de pas mal réfléchir et de faire le point. Et quand on vous propose de faire un Mondial, ça ne se refuse pas !
Avez-vous eu des propositions en StarLigue ?
Non et j’avais comme idée de prendre une année sabbatique. Après ma carrière de joueur, j’ai enchaîné assez rapidement comme entraîneur. Je ressentais ce besoin de souffler et d’une remise en question. Je voulais prendre du recul et les clubs le savaient. Il n’y avait pas non plus beaucoup de possibilités en StarLigue. Finalement, la pause a été plus courte que prévue.
La cicatrice de la fin de l’aventure avec Dunkerque est-elle refermée ?
Le temps fait son chemin. J’ai pris beaucoup de plaisir lors de ce premier stage avec la Tunisie. Je suis à 2000% tourné vers la Tunisie et ce championnat du monde. Ce n’est pas rien pour un entraîneur. Je ne pense qu’à ça et le reste n’a plus d’importance. Beaucoup d’entraîneurs sont aujourd’hui dans des situations compliquées. On connaît la difficulté de ce métier donc je suis ravi de n’avoir passé que trois mois loin des terrains.
« J’ai été surpris par la ferveur de ce pays pour le handball »
Vous avez signé deux ans. L’objectif, ce sont les JO en 2024 ?
L’objectif, c’est déjà de progresser par rapport aux dernières compétitions. La Tunisie reste sur un échec à la CAN. C’est la première fois où elle ne finit pas sur le podium (4ème, Ndlr). Mais l’objectif principal, c’est vrai, c’est de se qualifier pour les JO à Paris. L’Egypte domine aujourd’hui en Afrique avec des joueurs qui évoluent dans de grands clubs européens. On va essayer de combler ce retard.
J’ai déjà passé un mois en Tunisie pour m’imprégner aussi de leur championnat et de l’ambiance, suivi d’une semaine de stage avec l’équipe avec deux matches contre le Qatar (22-22 et 23-20, Ndlr). Je continue de regarder les joueurs tunisiens qui évoluent dans les différents championnats et je dois appeler Alain Portes pour discuter (sélectionneur de la Tunisie de 2009 à 2013, 2 CAN remportées en 2010 et 2012, quart de finaliste des JO en 2012 et du Mondial en 2013, Ndlr).
Peu de joueurs tunisiens évoluent en StarLigue. Est-ce symptomatique des problèmes de la sélection ?
La majorité de l’ossature de l’équipe lors du dernier stage faisait partie de l’Espérance de Tunis, un club qui a remporté la Coupe d’Afrique, la Coupe Arabe et qui était au Super Globe. D’autres joueurs évoluent en Espagne, mais c’est vrai que très peu jouent en StarLigue. C’est dommage car c’est un championnat qui permet aux joueurs de progresser et d’avoir une expérience du haut niveau.
Avez-vous été surpris, agréablement ou non, par le niveau après les deux matches contre le Qatar ?
Moi et Wissem (Hmam, son adjoint, Ndlr), on a été surpris par l’envie et l’écoute des joueurs après seulement trois jours d’entraînement avant ce premier match. L’objectif, sur cette semaine, était de laisser les joueurs sur la continuité de ce qu’ils avaient l’habitude de faire offensivement mais, par contre, de mettre les bases de notre projet en travaillant sur l’aspect défensif. On ne prend que 22 buts sur le premier et 20 sur le deuxième, on ne pouvait qu’être satisfaits.
En tout cas, j’ai été surpris par la ferveur de ce pays pour le handball. C’est assez incroyable ! J’ai également rencontré beaucoup de joueurs de qualité, qui évoluent en Tunisie et que je ne connaissais pas. C’est une équipe avec de jeunes joueurs, une nouvelle génération. Il y a un vrai potentiel. Il manque juste l’expérience et l’exigence du très haut niveau.
Patrick Cazal prêt pour son nouveau défi avec la Tunisie
Allez-vous essayer d’envoyer certains joueurs en France ?
Mon rôle n’est pas d’appauvrir les clubs tunisiens qui essaient d’avoir des moyens pour garder un championnat de qualité. Maintenant, l’exposition des grandes compétitions pourrait peut-être permettre à certains clubs de découvrir ces joueurs.
Quel est votre programme jusqu’au Mondial ?
Ce qui est intéressant, c’est que le championnat tunisien se termine très tôt, dès début décembre, à partir du 20 décembre, on récupérera ceux qui évoluent en Europe et on disputera un tournoi en Pologne du 27 au 31 décembre avec la Pologne, le Brésil et la Corée. Début janvier, il y aura aussi un stage en Tunisie où on affrontera deux fois l’Algérie. J’ai souhaité avoir ce genre d’opposition car on débutera le Mondial contre Bahreïn le 13 janvier.
Bahreïn, Belgique et Danemark, c’est une poule jouable ?
L’objectif, c’est de passer le 1er tour, d’emmagasiner de l’expérience en jouant le plus de matches possibles pour être prêt pour la CAN dans un an en essayant de se rapprocher le plus possible du niveau de l’Egypte. Si on ne sort pas vainqueur de la CAN, une qualification pour les JO est toujours possible par un TQO.
Imaginez-vous vous retrouver sur la route de la France au Mondial ?
On sait que si on passe, on se sera pas dans le groupe de la France. Il faudrait aller très loin (en demi, Ndlr) pour espérer rencontrer la France. Si c’est le cas, ce sera plutôt bon signe (sourire).