jeudi 19 septembre 2024

Alain Bouvard : « On a voulu faire avec Pons la même chose qu’avec Wembanyama »

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Arnaud Bertrande
Arnaud Bertrande
Rédacteur en chef — Pole Sport Lafont presse

Président exécutif de Boulogne-Levallois depuis mai 2020 suite au départ de Boris Diaw, Alain Bouvard (69 ans) est passé d’une saison historique avec une finale de championnat et deux joueurs draftés au 1er tour (Wembanyama et Coulibaly), à une intersaison où le club a failli, une nouvelle fois, ne pas repartir, et une saison où le club devra se battre pour ne pas descendre.

N’est-ce pas compliqué de passer d’un extrême à l’autre, d’une finale de championnat au maintien ?

La saison dernière a été exceptionnelle à tout point de vue et ça, on ne nous l’enlèvera jamais, entre les résultats sportifs avec une finale de championnat, toute la hype autour de Victor et les matches délocalisés. C’est une saison de lumière. Là, on revient à la normale. On repart avec seulement la 12ème masse salariale donc pas les mêmes ambitions. La saison qui a démarré sera forcément plus compliquée, mais il faut avancer et ne pas vivre dans le passé. La page est tournée.

Avec un peu de recul, pensez-vous avoir bien géré le phénomène Victor Wembanyama ?

Il faut se souvenir quand même que sur l’année dernière la hype a vraiment démarré au retour de Las Vegas. Avant, il y avait de la curiosité, plus de monde que d’habitude, mais ce n’était pas non plus la folie comme ça l’a été après. C’est à partir du 15 octobre, l’année dernière, qu’il a fallu s’adapter. Par rapport aux matches délocalisés, quand vous vous y prenez le 15 octobre, sur les matches aller, il n’y avait pas forcément de salle disponible.

On a parlé de 10 000 maillots vendus…

Le vrai chiffre, c’est 6000. Dans la mesure où je sais que Victor a autorisé Nanterre à refaire des maillots Wembanyama, on en vend encore cette saison, on écoule les stocks.

Pour en revenir aux délocalisations, c’est un manque à gagner car on imagine que [vous auriez pu remplir l’Accor Arena à chaque match !

Ce qui nous aurait beaucoup aidé financièrement, c’est que la finale aille en quatre matches au lieu de trois. Autant les deux Bercy ont été une opération rentable, avec une marge correcte, à Roland-Garros la marge n’était correcte qu’à partir du moment où on en faisait deux. On n’a pas perdu d’argent, mais on n’en a pas gagné.

C’était une très belle opération, mais qui a coûté cher et a dégagé très peu de bénéfices parce qu’il a fallu le faire en cinq-six jours et on n’a pas eu le temps d’optimiser les coûts. Notre seul regret, c’est de ne pas avoir été jusqu’au 4ème match. Je pense que Monaco de toute manière aurait gagné, mais c’est vrai que pour nous, même financièrement, ça aurait amélioré nettement la copie.

« Retirer le maillot de Bilal, ça pourrait avoir du sens, moins pour celui de Victor »

Songez-vous à retirer les maillots de Wembanyama et Coulibaly ?

Pour Bilal, ça pourrait avoir du sens parce qu’il a été formé ici. C’est un vrai produit du club, c’est quand même beaucoup moins le cas pour Victor. Le club a été pour lui une rampe de lancement.

Le propriétaire a aussi permis que ça soit possible financièrement parlant et finalement on a été très peu exposés sur la réussite des deux joueurs NBA, à la draft notamment. Ce sont plutôt ses clubs d’origine qui ont été mis en avant…

On a lu beaucoup de choses cet été sur l’état du club, qu’il était dans le rouge financièrement ou au contraire qui avait gagné de l’argent. Qu’en est-il réellement ?

Ce que je peux vous dire, c’est qu’on a réussi à équilibrer les comptes de la saison passée grâce au buy out de Victor une fois retirées les commissions d’agents, les primes promises dans les contrats à la structure mise autour de Victor, la partie qu’on devait à Nanterre. Au final, ça doit faire un peu plus d’un million sur les deux millions du buy out. La seule chose qu’on a pu reporter sur la saison suivante, c’est la partie hors primes du buy out de Bilal (800 000 dollars) qui n’était pas prévue.

« On a pris le risque de bâtir une équipe autour de Wembanyama »

Qui a apporté le plus : Victor à Boulogne ou Boulogne à Victor ?

On s’est tous apportés mutuellement. Victor est quand même passé d’une saison à l’ASVEL où il jouait 10 minutes par ci, 20 minutes par là et parfois pas. Nous, on a pris le risque de bâtir une équipe autour de lui. On n’était pas sûr que ça fonctionne, ça a fonctionné. C’était un pari. Il y avait aussi le pari de savoir s’il allait réussir à faire une saison sans se blesser ! Il avait quand même été blessé deux ou trois fois dans l’année avec l’ASVEL, ça pouvait être inquiétant. Ce qui a été mis en place autour de lui entre son préparateur physique, le kiné et le suivi médical, a fonctionné.

A ce titre-là, le propriétaire du club qui a pris le risque sur ce pari a une petite part de responsabilité sur la réussite de Victor et sur le fait qu’il soit arrivé à la draft en tant que premier choix. Toute la structure qu’on a été capable de mettre autour de lui a contribué beaucoup à sa réussite et à son éclosion. A Villeurbanne, il était tout le temps par monts et par vaux et il n’avait pas le temps de bosser. Il a eu l’intelligence à un an de la draft de choisir un club qui ne jouait pas de Coupe d’Europe pour travailler. Après, il est clair que sa présence a rapporté.

Je rappelle néanmoins que la saison précédente, on avait une bonne équipe et on a fait quand même 11 guichets fermés ! C’est sûr qu’on aurait eu une salle de 10 000 places l’année dernière, la saison d’avant on ne l’aurait pas remplie, la saison passée oui. Quand on ouvrait la billetterie, en quatre minutes, tout était vendu ! On a eu beaucoup de spectateurs, mais beaucoup de spectateurs sont venus par curiosité pour voir, entre guillemets le phénomène. On n’a pas vraiment fidélisé et créé des fans.

Alain Bouvard prudent pour l’avenir du club

Qu’est-ce qui vous a surpris le plus dans la Wembanyama ?

Le fait que Victor soit toujours obligé d’avoir un garde du corps, ce sont des choses qu’on n’avait jamais vues. A l’extérieur, les spectateurs étaient là dès l’échauffement, ce qui ne se produisait jamais ailleurs. Il y avait un service sécurité pour empêcher les gens d’approcher.

Aujourd’hui, c’est quoi le projet du club ?

On vit saison par saison. Le seul domaine sur lequel on a une perspective à plus d’une saison, c’est la convention qui va être validée avec la ville de Levallois pour l’utilisation de la salle et qui va être valable cinq ans.

Pas beaucoup de candidats pour le poste d’entraîneur

Si le maire de Boulogne dit stop, c’est fini !

Pas uniquement. Il y a eu des contacts avec plusieurs repreneurs la saison dernière qui n’ont pas abouti, dont le dernier américain. Ce qui les intéressait aussi, c’était de pouvoir être partie prenante dans l’exploitation du Palais des Sports de Boulogne.

Mais quand le maire a vu ce qui était arrivé à Pau avec les Américains au basket et puis à Bordeaux au foot, on a demandé au repreneur potentiel de mettre de l’argent sous séquestre pour preuve de sa bonne foi. Il a dit que c’était une bonne idée, mais il ne l’a jamais fait !

Le coach (Laurent Foirest) a été choisi tardivement, le 27 juillet. Les candidats ne se sont-ils pas bousculés ?

Il n’y avait pas beaucoup de candidats potentiels. Le fait qu’il ait travaillé avec Vincent (Collet) a aussi influé sur le choix. On a un début de saison compliqué, on ne peut pas le cacher. Il faut effectivement que tout le monde prenne ses marques, que la mayonnaise prenne.

Entre le handicap d’avoir démarré plus tard, d’avoir dû reconstituer à 90% l’équipe, un calendrier de pré-saison compliqué à mettre en place et les blessures, tout ça ne nous aide pas.

Si jamais il y avait descente, est-ce que ça serait la fin du club ?

Pour répondre à ce type de questions, je vous invite à contacter l’actionnaire, la SCIC, ou le maire de Boulogne…

Finalement, n’est-ce pas un soulagement de ne pas jouer de Coupe d’Europe ?

Le repreneur avec qui on était en contact en fin de saison dernière voulait absolument qu’on joue l’EuroCup pour avoir un contact avec l’Euroligue. On l’a fait l’année d’avant, et sportivement, c’est devenu aujourd’hui beaucoup moins intéressant, elle est même moins forte que la BCL.

En plus, elle coûte de l’argent. Paris la joue, mais a été pris sur dossier et dès qu’ils auront leur Arena, à mon avis, ils vont être en Euroligue. Je souhaitais qu’on fasse la BCL parce que ça pouvait aussi apporter de l’argent supplémentaire.

Et c’est pareil au niveau du recrutement des joueurs, c’est plus simple, c’est plus facile de recruter. Donc, au final, c’est plus un handicap de ne pas jouer la Coupe d’Europe.

« Boulogne était intéressé par Risacher »

N’avez-vous pas tenté de faire la même chose qu’avec Victor avec Zaccharie Risacher qui est passé de l’ASVEL à Bourgen-Bresse ?

On savait durant la saison qu’il ne voulait pas rester à l’ASVEL, mais à partir du moment où on n’était pas sûr de pouvoir repartir c’était compliqué. Par contre, on était en contact pendant l’intersaison avec Yves Pons qui a failli venir chez nous et qui était à Villeurbanne la saison passée.

Il a fait la même démarche que Victor. Il cherchait un projet où il allait pouvoir travailler. C’est un joueur avec du potentiel. On avait bien avancé les discussions. On lui a proposé de mettre en place une structure, toutes proportions gardées, un petit peu ce qu’on a fait avec Victor. Il était intéressé alors que financièrement parlant, ça ne l’était pas pour lui.

Entre-temps, il a eu une proposition de Gran Canaria qui était finalement bis repetita de ce qu’il avait à l’ASVEL. Quand on est à Gran Canaria, même en championnat, les déplacements ce sont des matches de Coupe d’Europe.

Il a dit non à Gran Canaria et puis, un club espagnol, Gérone, a eu la bonne idée de lui faire la même proposition que nous avec un tarif plus intéressant et du coup il a été à Gérone.

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