Prêtée cette saison à Tarbes par Lyon, à 18 ans, Dominique Malonga la pivot a pris une autre dimension. Capable de dunker à l’entraînement (pour l’instant), la Française vise très haut et notamment les Jeux avec les Bleues. Entretien pour France Basket et Le Quotidien Du Sport.
Tarbes s’est sauvé de justesse l’année dernière. Quel est l’objectif cette saison ?
On essaie toujours d’être ambitieux même si, à première vue, on n’a pas forcément l’équipe la plus compétitive. L’objectif premier, c’est de ne pas être en play-down, d’être dans les huit premiers pour faire les play-offs et jouer une Coupe d’Europe la saison prochaine. En play-offs, on n’aura rien à perdre et pourquoi pas y faire un résultat inattendu.
Votre victoire à Villeneuve d’Ascq (63-67) vous fait-elle regarder vers le haut ?
Tout à fait. Quand on arrive sur le parquet de Villeneuve, on n’est pas forcément conscient qu’on peut repartir avec une victoire. On avait en tête le match aller où on avait pris 25 points (50-74, Ndlr). Depuis, notre équipe s’est renforcée, on a un vrai effectif avec de la rotation qui nous permet de pouvoir développer notre jeu sur le long terme, ce qui était notre problème en première partie de saison.
On n’avait pas vraiment de banc et même si on développait du bon jeu en première période, on était rapidement asphyxié et on ne pouvait pas tenir ce rythme tout le match. Avoir un vrai banc nous rend vraiment compétitive. On s’en est rendu compte sur le match de Villeneuve et ça nous a fait aussi rêver et voir plus grand.
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Dominique Malonga à Tarbes pour le temps de jeu
On a été un peu surpris que vous soyez prêtée à Tarbes alors qu’à Lyon vous aviez quand même du temps de jeu. Comment avez-vous accueilli ce prêt ?
C’est une décision commune. Certes, j’avais un peu de temps de jeu à Lyon, mais il était hyper fluctuant. J’avais beaucoup de grandes joueuses devant moi, Sandrine (Gruda), Alexia (Chartereau). Sandrine a commencé la saison blessée, j’avais donc des responsabilités mais, dès que l’effectif se remplissait, mon temps de jeu baissait considérablement.
J’aspire à être une grande joueuse. Je me suis entraînée pendant deux ans auprès de très grandes joueuses. J’avais acquis l’expérience nécessaire à l’entraînement. J’avais besoin de cette expérience du terrain pour pouvoir faire mes propres erreurs en matches, avec le rythme du match. Il n’y a pas meilleur entraînement que le match !
Je sais qu’avec Lyon et les objectifs élevés de ce club qui est un grand club, qui vise des titres en Europe, il n’y a pas forcément la place et le droit à l’erreur, alors que moi, en tant que jeune joueuse qui suis en train de me former et de progresser, j’ai besoin de pouvoir faire des erreurs. Tarbes répondait totalement à ce besoin-là.
Pour ça, vous étiez prête à ne pas jouer le titre et l’Euroligue cette année…
J’ai 18 ans et j’aurai le temps de gagner des titres. Je préfère gagner un titre en me disant que j’y ai participé, que j’ai pris ma part sur le terrain, que de simplement accumuler les titres en sachant que je n’ai pas mis un pied sur le terrain. Même si pendant une année je ne joue pas de Coupe d’Europe ou le titre, au moins cette expérience-là va déjà tout changer et me permettre de devenir vraiment compétitive et d’apporter, au final, à une équipe comme Lyon.
« Je suis une vraie force de dissuasion. Dans tous les aspects de mon jeu, j’ai pu progresser »
Vos statistiques ont été multipliées par deux, mais à quel niveau avez-vous le sentiment d’avoir progressé cette saison ?
A tous les niveaux ! Je suis passée de même pas une quinzaine de minutes à Lyon à presque tous les matches à Tarbes, avec plus de 30 minutes en moyenne. Je peux tenir et rester performante sur la durée. C’est ma plus grosse progression. Ensuite, concernant mon impact sur le terrain, ça se traduit dans les stats, notamment au rebond ou même parfois dans le scoring. Je suis impactante pour mon équipe et des deux côtés du terrain, je suis ainsi la numéro 1 aux contres du championnat.
Je suis une vraie force de dissuasion. Dans tous les aspects de mon jeu, j’ai pu progresser. Je suis plus dynamique, je comprends beaucoup mieux le jeu, j’ai beaucoup plus d’automatismes. Je ne fais plus les mêmes erreurs car j’ai pu les corriger en match. C’est un tout et j’ai vraiment passé un cap.
Quels sont vos prochains axes de progression ?
J’ai encore énormément de choses à travailler. Je dois être plus dure encore. Le poste intérieur est vraiment celui où il faut régner physiquement. C’est encore un axe de progression pour être encore plus dure dans mes positions et au rebond. Je dois développer de la dureté dans mon jeu, l’efficacité près et loin du cercle, faire les bons choix, mettre les shoots faciles.
A 18 ans, suivez-vous des études parallèlement au basket ?
J’ai eu un Bac S l’année dernière mention bien. Cette année, je suis dans une école d’ingénieur à Tarbes. J’aimerais être développeuse d’applications ingénieur en informatique.
Vous avez été sélectionnée pour le TQO de février. Si l’équipe de France ne jouera rien, avez-vous personnellement le sentiment d’y jouer votre place pour les Jeux ?
J’ai l’impression de jouer gros. C’est une opportunité que le coach me donne. J’ai quand même travaillé pour être là, j’ai réalisé un bon début de saison qui me permet d’être là. Il y a eu aussi un concours de circonstances avec pas mal de blessures à ce poste.
Même si je manque d’expérience sous le maillot bleu, j’y vais pour montrer et j’arrive avec le même statut que les autres. J’ai prouvé que je pouvais être là. Une porte s’est ouverte et je vais tout faire pour qu’elle reste ouverte et que la liste pour le TQO soit la liste finale pour les Jeux.
Vue votre saison, est-ce que ce serait une déception de ne pas faire les JO ?
Oui je peux dire que ce serait une déception parce que c’est un objectif que je me suis fixé et une opportunité que je me suis offerte. Je me suis beaucoup entraînée depuis cet été où j’ai décidé de pas aller en équipe de France, de ne faire aucune campagne pour prendre soin de mon corps parce que c’était mon premier problème, un problème physique à cause de la croissance.
J’aurais pu faire une Coupe du monde U19, un Championnat d’Europe U20, même un Euro avec les pros. J’ai renoncé à tout ça pour préparer mon corps pour cette année, pour performer cette saison et pour pouvoir aspirer aux JO. La porte est ouverte et ça ne dépend plus que de moi.
« J’ai prouvé que j’avais ma place en Équipe de France »
Qu’avez-vous fait de particulier cet été ?
J’ai fait énormément de travail physique, je me suis énormément entraînée avec Claudio (Deiana, Ndlr) le préparateur physique de Lyon. Muscu, cardio, indiv basket pour développer certains aspects de mon jeu notamment mon shoot extérieur, mes départs en dribbles de loin.
Ça a été un travail acharné pendant un mois et demi. Je n’ai presque pas coupé cet été. Ça a payé et je continue un travail individuel pour entretenir tout ça et être prête physiquement à enchaîner le championnat, puis l’équipe de France.
Tony Parker, votre président à Lyon, disait que vous étiez la Wembanyama au féminin. Comment vivez-vous la comparaison ?
C’est flatteur quand on voit où est Victor aujourd’hui et le joueur qu’il est en train de devenir. Mais je préfère garder les pieds sur terre. Victor, c’est Victor et moi c’est moi. Ça peut très vite te rajouter une pression d’être comparé à un tel joueur. Je préfère avancer à mon rythme.
Le basket féminin et le basket masculin, ce sont presque deux sports différents donc je reste focus sur ma personne, sur mes objectifs et sur le chemin que je veux prendre. C’est néanmoins motivant qu’on pense que je peux aspirer à de grandes choses comme lui. J’essaie de n’en tirer que le positif et tous les aspects négatifs je les mets de côté.
Le connaissez-vous ?
On se connaît, mais on n’échange pas régulièrement. On vient d’Ile-de-France tous les deux. Il a évolué à Nanterre et moi au CTC Mont-Valérien. On était donc voisins. On a aussi fait ensemble le tournoi InterLigues avec le pôle Ile-de-France. Lors de ma première année à Lyon, il était là également.
Votre dunk à l’entraînement avec Lyon a-t-il changé votre vie ?
Il n’a pas changé ma vie, mais je suis devenue virale sur les réseaux sociaux. On a commencé à parler de moi aux Etats-Unis. Mon image a dépassé la France. Mais, à part que j’ai eu plus d’abonnés sur les réseaux, ça n’a pas changé mon statut sur le terrain. J’aime bien dunker et plusieurs de mes vidéos sont virales, mais mon but c’est de le faire en match !
C’est bien beau de le faire à l’entraînement contre personne, mais le plus incroyable c’est de dunker en match, dans le jeu. A ce moment-là, je pourrai entre guillemets m’en vanter. Plein de filles sont capables de dunker comme Kendra Chéry, mais le faire dans le rythme d’un match, c’est autre chose. J’ai envie que ça soit quelque chose que je puisse faire naturellement. Je travaille pour ça.
L’occasion ne s’est-elle pas présentée en match ?
J’ai essayé plusieurs fois, mais pour l’instant je n’ai pas réussi. J’ai besoin d’une contre-attaque où je suis toute seule. Sur le jeu placé, je ne le sens pas vraiment. Quand je le sentirai, je n’aurai aucun problème pour le passer.
La WNBA fait-elle partie de vos objectifs ?
Pour ma génération, la draft, c’est en 2025. Au-delà d’un rêve, c’est un objectif. Je sais que j’en suis capable.
Quelles joueuses ou joueurs vous inspirent ?
Je m’identifie au style de jeu de Kevin Durant ou encore d’Anthony Davies. Chez les filles, j’aime beaucoup comment jouent Breanna Stewart, A’ja Wilson ou Emma Meesseman.