Peu de monde les pensaient capables de conserver leur titre européen avec cette finale en terre ennemie au Leinster. Avec ce coup de maitre, La Rochelle a montré la force de son collectif. Un collectif qui ne s’est pas créé en un jour.
En mai 2014, lorsqu’ils fêtent sur le port de La Rochelle l’accession en Top 14 après une victoire en finale d’accession face à Agen à Bordeaux (31-22), les supporteurs rochelais ne se doutent pas qu’ils reviendront régulièrement pour fêter de plus grands succès de leur équipe favorite.
Cette année-là, les Rochelais montent en même temps que le LOU et à La Rochelle on rêve alors de maintien. Mais on sait aussi qu’avec Vincent Merling le club est entre de bonnes mains et qu’il a de bonnes chances de s’inscrire sur la durée dans l’élite. Le président est réputé pour être un bâtisseur, tout ce qu’il entreprend est réfléchi, sans coups d’éclat inutiles.
Depuis 2011, il a confié l’équipe à Patrice Collazo qui après avoir atteint le premier objectif de la montée va s’attacher à maintenir le club dans l’élite. Une mission qui collait parfaitement à la personnalité du manager selon Gérald Paris, journaliste à France Bleu La Rochelle et qui suit l’équipe depuis 2014 :
« A cette époque-là, La Rochelle a un groupe assez solide, paré pour le combat avec les Sazy, Atonio, Botia. Des caractéristiques qui correspondent parfaitement au profil de joueurs que veut Patrice Collazo. Ils ont construit avec ces joueurs importants. Ensuite, en 2016, l’arrivée de Victor Vito est un élément capital dans le développement de l’équipe et sa progression. Il n’est pas venu en pré-retraite loin de là, il avait une superbe mentalité, il a fait grandir ses coéquipiers. Enfin, l’arrivée de Tawera Kerr-Barlow en 2017 a fait passer un nouveau cap à l’équipe. Il était demi de mêlée remplaçant chez les Blacks, ce n’était pas n’importe qui. »
« Pour s’installer parmi les meilleurs, il fallait un autre discours, O’gara etait le bon choix »
En 2016/2017, La Rochelle réalise une saison historique en terminant 1er de la phase régulière, le club se qualifie directement en demifinale pour la première fois de son histoire et s’incline de justesse face à Toulon (15-18). Les saisons suivantes, les Rochelais confirmeront et remporteront leurs premiers grands titres avec le doublé européen en 2022 et 2023, la finale du Challenge Européen en 2019 et du Top 14 en 2021 :
« Ces bons résultats valident encore une fois le choix fort du président. Après le départ de Patrice Collazo à Toulon, c’est l’arrivée de Ronan O’Gara. Il n’était pas Head Coach au début mais, vu que ça ne fonctionnait pas avec Jono Gibbs, le président l’a promu. Ronan O’Gara avait une vision des choses très claire, comment y arriver. Il a dit à ses joueurs :
« Je veux mettre en place un système défensif agressif, ce sera comme ça pas autrement ». Ça demandait une grosse dépense énergétique et physique, mais les joueurs s’y sont mis. Ils n’avaient pas le choix. Collazo était un bon entraîneur, mais pour monter ou se maintenir. Pour s’installer parmi les meilleurs, il fallait un autre discours, O’Gara était le bon choix ».
Le discours du manager est bon, son recrutement aussi : « Un des premiers recrutements d’O’Gara a été Brice Dulin, il le connaissait parfaitement depuis le Racing 92. Les recrues sont arrivées par petites touches, elles répondaient à des besoins. Le staff médical est aussi performant, il n’y a pas beaucoup de blessés malgré la longue saison. Aujourd’hui, seul Matthias Haddad est blessé. Les remplaçants sont potentiellement aussi forts que les titulaires. Colombe est excellent quand il remplace Atonio, Slavi aussi avec Wardi. Le club a une économie saine, de nombreux partenaires, c’est un modèle qui a été pensé pour durer. » Et gagner !
Reus, l’exemple emblématique de La Rochelle
A La Rochelle, on ne recrute pas que des joueurs confirmés. On fait aussi confiance aux jeunes. Dans l’ombre d’Antoine Hastoy, Hugo Reus grandit tranquillement pour prendre la relève dans quelques années.
Hugo Reus a vécu une deuxième partie de saison chargée en émotion. Le jeune ouvreur rochelais est entré en jeu à l’UBB et a fêté sa première titularisation face à Bayonne, il a connu les phases finales avec La Rochelle et dispute cet été le Mondial avec l’équipe de France U20. Tout va très vite pour ce jeune garçon de 19 ans seulement, arrivé à La Rochelle en 2022 en provenance de l’UBB.
Il a choisi le Stade Rochelais car il pouvait intégrer une école de commerce et il a été séduit par la perspective de travailler avec Ronan O’Gara : « C’est une véritable chance pour Hugo d’avoir un tel entraîneur au début de sa carrière, Ronan O’Gara peut devenir son mentor » explique Philippe Lescure, son entraîneur au CA Périgueux Dordogne.
« C’est une véritable chance pour Hugo d’avoir un tel entraîneur au début de sa carrière, Ronan O’Gara peut devenir son mentor »
Avant de rejoindre l’UBB en 2018, Hugo Reus a fait ses classes à Ribérac puis à Périgueux : « Il sortait déjà du lot, il était passionné de rugby, toujours à l’écoute des autres. Il est devenu leader et j’en avais fait mon capitaine » ajoute Philippe Lescure.
« Il jouait parfois au centre, mais en 10 l’équipe profite plus de son excellent coup de pied. Il doit encore un peu évoluer techniquement, mais il aime jouer, défendre. Ce n’est pas le joueur que l’on n’attend au départ, mais il s’impose par sa régularité, sa fiabilité. Ronan O’Gara va continuer à le faire progresser. Je trouve qu’il a déjà gagné en maturité depuis qu’il est à La Rochelle. »
Comme Antoine Hastoy a de fortes chances d’être retenu pour la Coupe du monde, Hugo Reus va avoir du temps de jeu la saison prochaine malgré le retour au club de West. A lui de saisir l’occasion et de montrer qu’il peut être mieux qu’un remplaçant.