Dès qu’il s’agit d’engager des coachs non-Américains, la NBA se montre assez réticente. Alors que les Européens sont désormais en force chez les joueurs, le chantier est de taille chez les coachs pour faire changer les mentalités.
Igor Kokoskov qui entraînait Fenerbahçe cette saison a écrit l’histoire. Début mai 2018, il est nommé entraîneur principal des Suns de Phoenix. Il est alors devenu le premier entraîneur titulaire européen en NBA :
« Kokoskov est un grand coach. Il a pu exercer en NBA. Les entraîneurs qui oeuvrent là-bas sont davantage des coachs assistants. Je ne désespère pas d’en voir davantage dans le futur, européens, avec des responsabilités de head coachs. Qui aurait prédit qu’il y aurait un contingent aussi important de joueurs du Vieux Continent en NBA ? » souligne Dejan Milojevic, l’ancien coach de Mega Leks. C’est encore loin d’être le cas pour les entraîneurs en NBA.
Elliott De Wit, Français membre du staff des Pistons de Detroit, en sait quelque chose : « Les Etats-Unis restent très fermés. C’est compliqué. Beaucoup d’Européens ne s’intéressent pas forcément à la NBA non plus. La NBA rassemble les meilleurs joueurs. Cependant, ce n’est pas forcément le meilleur basket pratiqué en termes technico-tactique, à regarder ou même à entraîner. Quand on regarde la NBA, on scrute surtout les joueurs, moins le jeu ».
« La NBA reste assez corporatiste »
Pour le Français passé par la NCAA, la vérité prévaut aussi pour les coachs américains en Europe :
« C’est aussi compliqué pour eux en sens inverse car l’Europe reste également assez fermée. Ils signent très peu d’Américains si ce n’est jamais ».
On peut citer quelques exceptions comme Rick Pitino, l’ancien coach des Knicks ou des Celtics qui a fait une pige au Panathinaiïkos (entre 2018 et 2020). L’ancien très grand coach de NBA Larry Brown n’a lui pas laissé un souvenir impérissable au Fiat Turin en 2018…
« Les raisons sont probablement d’ordre culturel. La problématique de l’argent rentre en ligne de compte énormément aussi. A moins de coacher en Euroligue dans les grosses équipes, si on entraîne ailleurs en Europe l’argent ne coule pas à flot. Alors qu’aux Etats-Unis, on gagne très bien sa vie. Coacher en France revient à gagner entre 8000 et 12 000 euros par mois. C’est déjà une très belle somme, mais aux Etats-Unis les coachs touchent 2, 3, 4 millions à l’année, ce n’est pas comparable ».
Dans toute l’histoire de la Grande Ligue, les entraîneurs étrangers ayant réussi se dénombrent au compte-goutte. On pense à Kurt Rambis, Mike d’Antoni, David Blatt ou Jay Triano…
Des coachs binationaux performants
Mais ces réussites sont à prendre avec des pincettes. Car ces entraîneurs à double nationalité sont nés sur le sol américain :
« La raison culturelle est primordiale, insiste Jacques Monclar. Il y a des méthodes de fonctionnement distinctes. Les franchises NBA prennent beaucoup de coachs qui ont une expérience européenne, mais qui ne sont pas obligatoirement européens.
Beaucoup d’assistants sont des anciens joueurs, des anciens coachs européens. Parmi les head coachs, il y a eu effectivement Igor Kokoskov, mais cela ne s’est pas forcément bien passé (19 victoires pour 63 défaites, Ndlr).
Pourtant, il avait été assistant avant. Parmi les jeunes head coachs, on retrouve soit des anciens joueurs comme Steve Kerr (Warriors), Steve Nash (Nets) ou alors on va chercher en NCAA. Sans oublier l’école Popovich. Après, être coach en NBA ce n’est pas le même métier non plus. Faire 82 matches, c’est tellement énorme ! Une saison d’Euroligue c’est 34 matches.
Le vrai tremblement de terre serait de prendre un coach référencé Euroligue et de le propulser directement en NBA. La vraie révolution se situerait là. Mais Cela reste un univers assez fermé avec énormément d’entre-soi.
L’Euroligue et la NBA, pas le même calendrier
Les coachs américains sont souvent des anciens joueurs NBA. Ils ont aussi leurs assistants préférés. Le circuit reste donc assez fermé. Cela s’ouvre un peu. On a vu le travail mené par Messina avec San Antonio pendant cinq saisons (entre 2014 et 2019, Ndlr). Il était même en pourparlers avec des équipes pour devenir head coach. Il y a Scariolo qui est assistant à Toronto (désormais entraîneur du Virtus Bologne, Ndlr).
D’autres non-Américains occupent des rôles importants et pourraient grimper dans la hiérarchie. Cela ne devrait pas tarder. On assiste un peu au même processus que quand les joueurs ont migré d’Europe vers les USA. Il a fallu qu’un ou deux joueurs soient très performants comme Drazen Petrovic qui mettait 20 points par match pour finir par susciter l’intérêt d’autres équipes (Trail Blazers, Nets).
On a commencé à chercher l’oiseau rare vers l’étranger. Désormais, un quart de la NBA est non-Américaine. Au niveau des entraîneurs, cela devrait aussi se débloquer rapidement. On est encore au stade de circuit fermé » note le jour naliste de Canal George Eddy.
Avec le temps, les mentalités changent. Comme quand il y a eu cette première femme (Becky Hammon) à devenir assistante-entraîneur au sein d’une franchise NBA (Spurs). Là encore, on espère que les histoires se répètent.
Les coachs européens en NBA, pourquoi le sujet fait débat ? Élément de réponse dans France Basket.