L’ancien entraîneur La Rochelle, Colomiers, Biarritz ou Castres, Serge Milhas reconnait que le rugby n’a pas su protéger ses jeunes des excès d’une société de plus en plus violente. Entretien pour Rugby Magazine et Le Quotidien Du Sport.
Que signifient selon vous la récurrence des affaires de violence extra-sportive qui touchent le rugby depuis un certain temps ?
Bien au-delà du rugby, ils sont le symptôme d’une société qui évolue et pas forcément dans la bonne direction. On a toujours associé les 3èmes mi-temps au rugby et au savoir-vivre, sauf qu’entre temps, on a oublié le savoir-vivre pour se réfugier dans l’excès. Il faut maintenant se demander pourquoi nos jeunes agissent de manière aussi excessive.
Justement, pourquoi ?
Certainement parce que nous n’avons pas su les accompagner, les protéger. On doit forcément se remettre en cause dans la façon de transmettre nos valeurs, pas seulement celles du rugby, mais celles qui peuvent nous permettre de fabriquer de bons mecs, tout simplement. Nous, éducateurs, entraîneurs, avons un rôle éducatif capital à jouer, plus important que jamais notamment pour compenser les effets négatifs des réseaux sociaux.
Il faut mieux éduquer à la consommation de l’alcool, de la drogue. J’ai aussi fait de nombreuses troisièmes mi-temps dans ma carrière et si je n’ai pas été autant dans l’excès c’est parce qu’on ne m’a jamais appris à l’être.
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Serge Milas favorable à une éducation face à l’alcool
Faut-il remettre en cause l’importance des troisièmes mi-temps dans le processus d’apprentissage du rugby ?
Non. Je suis davantage dans la transmission éducative que dans l’interdiction ou la restriction. On n’entraîne plus des pros aujourd’hui comme il y a vingt ans, c’est une certitude. Notre discours doit changer. Nous ne devons pas avoir peur de dire les choses.
En même temps, les jeunes joueurs sont-ils capables d’assimiler tout ça ? Les écoute-t-on assez ? Tout passe par le respect, des autres et de soi-même, l’un ne pouvant pas aller sans l’autre. Peut-être a-t-on trop lâché sur le respect de certaines valeurs.
La mentalité des rugbymen a-t-elle tant évolué que ça ?
Des excès, dans les 3èmes mi-temps ou ailleurs, il y en a toujours eus, sauf que ça restait dans le milieu du rugby. Désormais, ça sort au grand jour et c’est une bonne chose, ça nous oblige à réagir, à avoir une vraie prise de conscience. Je me félicite que, sur le terrain, le rugby soit devenu moins violent, il faut maintenant qu’il le soit aussi en dehors.