mercredi 4 décembre 2024

Charles Kloboukoff (Stade Rochelais, basket) : « On n’est pas tout à fait prêt pour l’élite »

À lire

Arnaud Bertrande
Arnaud Bertrande
Rédacteur en chef — Pole Sport Lafont presse

Le Stade Rochelais s’apprête à jouer pour la première fois dans l’élite. Au pays du rugby, la greffe basket est en train de prendre. Son Président, Charles Kloboukoff fait le bilan de la montée. Entretien pour France Basket et Le Quotidien Du Sport.

Comment a été perçue cette montée historique du club de basket dans cette ville du rugby ?

Il n’y a pas de tradition foot, volley ou hand, mais il y avait quand même une tradition basket à La Rochelle. Cette montée a suscité de l’enthousiasme. Il y a eu du spectacle et une montée en puissance progressive, avec une salle qui s’est remplie dès le 2ème match et qui a été à guichets fermés toute l’année (22 de suite, Ndlr). La greffe basket a très bien pris. 

À LIRE AUSSI : toute l’actuu basket dans votre mag

Charles Kloboukoff profite de la montée pour créer une dynamique

Le club est-il prêt pour l’élite après seulement deux saisons en Pro B ? 

Clairement, c’est arrivé plus vite que prévu. On prévoyait plutôt d’apprendre la Pro B pendant trois, quatre ans et de viser la montée à la 4ème ou 5ème année. On n’est pas tout à fait prêt, surtout en termes d’infrastructures. Ça fait l’objet de grosses discussions avec la Communauté d’Agglomération.

On a entamé une discussion il y a déjà trois ans, on est rentré un peu plus dans le vif du sujet depuis l’hiver dernier et on est dans les étapes décisives sur le montant de la concession et le cahier des charges de la salle pour pouvoir avoir une salle entièrement dédiée au club avec éventuellement quelques événements sportifs périphériques.

C’est ce qui nous manque. Par ailleurs, le club bénéficie quand même de l’accès au centre de performance Apivia du rugby avec un outil de professionnalisation pour parfaire la condition. physique des joueurs, pour intégrer la culture club, ce qui est un vrai plus. Humainement et en termes de compétences, le club est à peu près outillé.

Maintenant, en termes d’infrastructures, on est encore déficitaire et il faudra attendre la saison 2026/2027 pour bénéficier de ce nouvel outil. Il va falloir faire avec pendant deux ans et demi. On a quand même le soutien du peuple rochelais et du tissu des PME locales qui vont nous aider à augmenter notre budget et avoir un effectif digne de l’élite.

« Nous attendons 2026 pour avoir une nouvelle arène »

Ne craignez-vous pas que cette montée se révèle un cadeau empoisonné ? 

L’aventure est tellement belle qu’on ne pouvait pas refuser. Je suis partenaire et actionnaire du rugby depuis 20 ans. Quand on est monté en 2010, on est redescendu, on est revenu après deux ans en Pro D2 et aujourd’hui on est installé solidement en Top 14 après avoir gravi les autres marches. On sait que le risque de descente immédiate existe, mais ça n’empêchera pas qu’on fera en sorte d’y retourner. Nous allons prendre la température du bain pour voir si c’est à notre portée de s’y installer durablement. On ne pouvait pas refuser la montée en finissant premier du championnat et en gagnant les play-offs.

Cette salle de 1600 places, ça va être quand même un sacré manque à gagner. N’avez-vous pas songé à aller jouer ailleurs ?

On regarde si c’est possible de faire un ou deux gros matches à La Roche sur Yon, mais autrement on va rester à La Rochelle pour faire plaisir à nos supporteurs. On a un petit Chaudron ! Nos joueurs sont habitués à cette salle-là, nos adversaires le seront peut-être moins, cela jouera peut-être en notre faveur.

Les Monégasques risquent d’être surpris !

(rires) On va jouer avec humilité et détermination. Si on doit prendre quelques roustes, on saura faire face. Encore une fois, on est en apprentissage pour le futur et si on doit redescendre ce ne sera pas un drame, on prévoira les budgets pour être à nouveau compétitif en Pro B et réapprendre à gagner pour revenir un jour en Betclic Elite. On est sur une stratégie de moyen terme. L’expérimentation, c’est quand même ce qu’il y a de mieux pour fabriquer une expérience et apprendre à franchir les paliers. 

« On a un petit Chaudron ! »

Le coach disait que le club avait une vision innovante. Quelle est-elle ? 

C’est de considérer que le club n’appartient à personne, mais qu’il appartient à tout le monde, que c’est avant tout une œuvre collective. Ça se construit avec une unité, une détermination, une politique de formation qui commence à se mettre en place. Il faut trouver un amalgame entre les anciens et nouveaux. C’est un club très participatif, avec des entreprises au capital, avec le Stade Rochelais. C’est un club qui est construit sur des valeurs et pas sur la recherche de la performance immédiate.

Ça a payé avec cet état d’esprit dans le rugby. Il a fallu quand même 10 ans pour installer le club au plus haut niveau. On va essayer de faire la même chose et on va trouver notre place à côté du rugby. Nous avons suscité la saison dernière un élan populaire qui est extraordinaire. On aurait pu faire 4000 places à la fin de la saison. J’espère que ça va nous aider à convaincre les collectivités que La Rochelle est une ville de basket et qu’il y a la place pour un bel outil ici pour construire quelque chose de durable. Chez les garçons et peut-être un jour chez les filles.

Charles Kloboukoff optimise le fonctionnement de son club avec l’omnisport

Ce modèle de club omnisport est unique dans le basket.

En tant qu’entrepreneur, j’ai une entreprise qui est une sorte de village de PME où les coûts sont mutualisées avec 25 sites en France et un peu à l’international. C’était l’idée de se dire que quand il y a des infrastructures et des compétences on peut les partager, soit d’avoir des ressources dédiées, opérationnelles dans la stratégie, mais on est beaucoup plus fort en partageant le marketing, le commercial, la billetterie, l’administratif, la stratégie financière, etc.

Ça nous permet de concentrer une ressource beaucoup plus importante à la masse salariale joueurs et de réduire le poids des fonctions supports pour essayer d’être compétitif. Ça permet aussi de faire rayonner l’image du club dans différents domaines vis-à-vis de différents publics. On n’a pas le même public que le rugby. On a un public plus familial, plus jeune, plus féminin. C’est très complémentaire en espérant effectivement qu’un jour on arrive à installer durablement le basket et pourquoi pas qu’une autre section de sport de haut niveau en salle puisse venir rejoindre les couleurs du Stade Rochelais.

Le Real Madrid, l’exemple pour La Rochelle

Un club de basket vous inspire-t-il ? 

On connaît les difficultés des clubs historiques. J’ai grandi avec Pau et Limoges. Mais on voit que quand un club appartient à une personne c’est compliqué. On veut rester un club collectif où il n’y a pas d’actionnaire dominant, mais où il y a vraiment un esprit participatif. Il y a des clubs omnisports qui sont très inspirants comme Barcelone, le Real Madrid, le Bayern Munich, etc. Mais c’est à nous de créer notre propre modèle. Les gens aiment bien

La Rochelle parce qu’on est petit, on n’a pas beaucoup de moyens, mais on fait pas mal de choses avec nos petits moyens. Quand on représente la France comme l’a fait le rugby au plus haut niveau et qu’on arrive à gagner dans des conditions parfois rocambolesques ou à l’extérieur, c’est fantastique. Ça prouve que l’esprit collectif qui règne est supérieur à la somme des individualités qui constituent le groupe. Il faut qu’on ait des joueurs qui créent une osmose entre eux, avec une polyvalence tactique qui permet de s’adapter à tous types de situations.

Charles Kloboukoff rêve (un peu) d’un parcours comme Saint-Quentin

Un parcours à la Saint-Quentin promu et qui a accroché l’Europe en rêvez-vous pour La Rochelle ? 

C’est peut-être utopique… (rires) On va déjà apprendre et, si on se maintient, pourquoi pas viser un petit accessit en Coupe d’Europe l’année d’après ?

Vous avez prolongé votre coach Julien Cortey jusqu’en 2029. Pourquoi aussi longtemps ?

L’avenir nous appartient, mais il appartient aussi aux audacieux. On ne veut pas rester dans cette politique éphémère de contrat à court terme. On veut construire dans la durée. Quand on a des bons hommes, on leur fait confiance dans la durée aussi. C’est le pari qu’on fait. On se projette mutuellement avec des niveaux de revalorisation salariale progressifs qui permettent aussi de donner des trajectoires ambitieuses pour les uns et pour les autres.

Vous n’avez pas réussi à garder votre MVP Tray Buchanan qui a signé au Mans. Financièrement, ce n’était pas possible ?

On ne pouvait pas s’aligner. Il est arrivé avec l’ambition de se montrer. Il a eu une super proposition, on lui souhaite bonne route et on lui a bien chanté MVP, MVP et on passe à autre chose en essayant de trouver quelqu’un qui fasse aussi bien que lui en apportant autant d’adresse et peut-être d’autres qualités. On espère que Sam Sessoms sera une bonne surprise et qu’il sera complémentaire avec les autres joueurs et qu’il aura l’état d’esprit qu’il faut dans l’équipe. 

À LIRE AUSSI : quand le stade rochelais était champion de Pro B

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Actu

spot_img
spot_img

À lire aussi