samedi 21 septembre 2024

Coupe du Monde : l’Angleterre en crise avant la compétition

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L’Angleterre, finaliste de l’édition précédente, arrive à la Coupe du Monde 2023 avec de nombreux doutes. L’alliage de jeunesse et d’expérience qui constitue l’effectif fonde autant d’espoirs qu’il ne laisse de zones d’ombre.

Affichant des résultats très mitigés depuis début 2022, le XV de la Rose a laissé partir Eddie Jones et est allé chercher Steve Borthwick, un ancien international anglais. Le nouveau sélectionneur, en place depuis moins d’un an, n’a pas eu beaucoup de temps pour se préparer. Le Tournoi des Six Nations a été compliqué et ils ont notamment été balayés par la France (53 à 10). Richard Pool-Jones, ancien international anglais et consultant pour RMC, estime que c’est une phase de transition.

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« L’Angleterre est dans une situation de crise avortée. Ils sont en train de tourner la page Eddie Jones et peuvent se remettre à espérer. » En matches de préparation, la double confrontation contre le Pays de Galles n’a pas été rassurante, montrant de réelles lacunes en termes de transmission. Faisant beaucoup de fautes de main, les Anglais ont joué un jeu stéréotypé et inscrit un seul essai.

Pour cette Coupe du monde, Steve Borthwick va devoir composer avec un groupe assez hétérogène. « C’est un pragmatique. Il sait très bien qu’il n’avait pas le temps de relancer complètement un nouveau projet avant la Coupe du monde. Il a mis en place une équipe qui s’appuie sur les bases déjà existantes sous Eddie Jones. Il y a pas mal d’expérience à des postes clés », estime Richard Pool-Jones.

« Rien à perdre et tout à gagner »

Pas convaincu par Henry Slade (30 ans) lors de la préparation, le nouveau sélectionneur a décidé de se passer de cet ancien cadre d’Eddie Jones. L’équipe de-vrait vraisemblablement s’articuler autour d’Owen Farrell, le trois-quarts centre de 31 ans qui devrait dépasser bientôt le nombre de points inscrits en sélections par Jonny Wilkinson. Véritable porte-étendard, il est la tête d’affiche de la sélection pour Richard Pool-Jones.

« Owen Farrell est la caution certitude de cette équipe, le joueur clé. Il est là parce qu’il n’y a pas une satisfaction totale de la jeune garde, notamment de Marcus Smith. » Néanmoins, selon lui, Manu Tuilagi a encore davantage de responsabilités. Ce trois-quarts centre d’origine samoane pourrait être la clé qui débloque le jeu anglais. « Tuilagi doit être leur fer de lance. C’est à lui de perforer la défense comme ça les autres pourront jouer et combiner derrière lui. »

D’autres joueurs expérimentés devront aussi répondre présent durant cette compétition. Jamie George aura la responsabilité d’être le seul talonneur avec une vraie expérience internationale. Mais il y a un homme qui représente mieux que quiconque la situation actuelle de l’Angleterre, c’est Maro Itoje.

« Itoje n’est plus que l’ombre de lui-même. C’était un des meilleurs joueurs du monde, tous postes confondus. Il y a eu la débâcle des Saracens (passés par la 2e division anglaise en 2020/2021, Ndlr) et ses difficultés avec l’Angleterre depuis 2019. On l’a un peu perdu de vue. On ne peut pas imaginer qu’il continue comme ça quand on connaît le statut qui a été le sien et on peut espérer un retour à son vrai niveau ».

L’Angleterre en pleine reconstruction

En plus de ses cadres de 2019, l’Angleterre est aussi une sélection qui fonde beaucoup d’espoirs sur sa nouvelle. L’absence de Jack van Poortvliet, demi de mêlée de 22 ans, qui s’est blessé contre le Pays de Galles est un réel contrecoup pour une charnière anglaise qui a du mal à convaincre. « C’est vraiment dommage pour lui, mais l’Angleterre ne va pas sombrer pour autant. L’expérience de Youngs et Care va être intéressante et je pense très honnêtement qu’Alex Mitchell (24 ans, Ndlr) est le meilleur demi de mêlée anglais à l’heure actuelle. »

Hormis cette mauvaise nouvelle pour le demi de mêlée de Leicester, Henry Arundell (20 ans) et Freddie Steward (22 ans) seront quant à eux présents en tant qu’arrières et ailiers. Rapides et costauds, ils cristallisent de réelles attentes de la part des supporteurs anglais.

« J’aime bien Arundell qui est un joueur avec du facteur X. Ce qui est dommage, c’est qu’il n’est pas encore intégré dans le système de l’équipe d’Angleterre. Il ne faut pas en attendre des miracles tout de suite, mais il pourrait devenir important à l’avenir. » Le tableau de cet effectif est dressé, maintenant comment peut-il performer ? Si la préparation a plus soulevé de questions qu’apporter de réponses, Richard Pool-Jones ne se veut pas défaitiste.

« L’équipe d’Angleterre va se reposer sur ses bases traditionnelles. On est bon en phase de ballon porté, en mêlée, en recherche de points au pied. C’est la Coupe du monde, il faut être pragmatique et prendre tout ce qui peut l’être. »

À la recherche d’une identité de jeu

Si les fondamentaux anglais devraient tenir la route, tout le problème pourrait être sa capacité à développer du jeu afin de se montrer dangereux face aux plus gros. « Ils savent ressortir la balle. Ce qui va manquer, ce sont des gros porteurs de ballon qui arrivent à casser la ligne d’avantage. Tuilagi va être essentiel. Vunipula pourrait aussi être important, mais cela dépend de quelle version de lui l’Angleterre aura. » Le XV de la Rose a été tiré dans la poule D. Comprenant l’Argentine, le Japon, les Samoa et le Chili, c’est une poule assez relevée.

Le Chili apparaît clairement comme le petit Poucet du groupe et ne devrait pas vraiment poser de problèmes. En revanche, même si l’Angleterre arrive avec l’étiquette de favori, sa mauvaise dynamique ainsi que l’adversité rencontrée peuvent créer le doute. L’Argentine est une nation qui compte, le Japon peut toujours surprendre et la physicalité des Samoans n’est plus à prouver. Pour Richard PoolJones, la situation actuelle est aussi un avantage qui pourrait motiver le groupe.

« Ils ont l’air soudés autour de Farrell et Borthwick. Toute l’équipe a été largement critiquée, on peut espérer qu’ils arrivent avec l’esprit revanchard. Ils n’ont rien à perdre et tout à gagner, c’est leur force dans cette Coupe du monde. » Selon ses dires, les Anglais se doivent d’assurer leur

rang et d’atteindre les demi-finales. « Si l’Angleterre a du mal contre le Chili ou le Japon dans leur état actuel, mieux vaut ne même pas aller à la Coupe du monde. Le XV de la Rose se doit d’avoir un certain standing. » Leur compétition s’ouvre le 9 septembre contre l’Argentine. Cet affrontement entre les deux favoris de la poule D pourrait être déterminant afin de définir la dynamique de chacune des deux formations.

Calendrier

  • 9 septembre, 21h : Angleterre Argentine (Orange Vélodrome, Marseille)
  • 17 septembre, 21h : Angleterre Japon (Allianz Riviera, Nice)
  • 23 septembre, 17h45 : Angleterre Chili (Stade Pierre-Mauroy, Lille)
  • 7 octobre, 17h45 : Angleterre Samoa (Stade Pierre-Mauroy, Lille)

277

Jonny Wilkinson est le meilleur marqueur de l’histoire de la Coupe du monde avec 277 points inscrits en 4 tournois. Il devance Gavin Hastings (Ecossais, 1986-1995) et ses 227 points. Son record est actuellement contesté par Handré Pollard. Le demi d’ouverture sud-africain a inscrit 162 points en 2 Coupes du monde. Néanmoins, son absence de l’édition 2023 pour cause de blessure va le tenir éloigné du record pendant quelques années.

Faut-il enterrer l’Angleterre ?

Malgré une situation précaire et une préparation compliquée, l’Angleterre reste favori de son groupe. Ce mois de septembre, durant lequel ils devraient se qualifier pour les quarts de finale, est autant de temps pour travailler et améliorer son jeu pour le XV de la Rose. Passé cette phase, les cartes seront sûrement rebattues.

Le saviez-vous ?

L’Angleterre est la seule nation de l’hémisphère Nord à avoir remporté une Coupe du monde. Cela s’est passé en 2003 en Australie, quand les Anglais ont atteint la finale en sortant coup sur coup le Pays de Galles et la France. Le XV de la Rose a ensuite renversé le pays organisateur en finale sur le score 20-17 grâce à un drop de l’inénarrable Jonny Wilkinson dans les dernières secondes de la prolongation.

Les plus de l’Angleterre

  • Malgré tout ce que l’on peut dire, l’Angleterre arrive avec des certitudes. Tuilagi, Farrell, George, Genge et consorts sont des cadres expérimentés qui sont censés apporter un plancher rassurant à l’équipe.
  • Le XV de la Rose a aussi de bonnes bases tactiques. Solides en situation de mêlée et de ballon porté, ils ont aussi un bon jeu au pied et Farrell n’hésite pas à prendre les points en pénalité, ce qui est assez adapté à un contexte de Coupe du monde où tous les points comptent.
  • La jeunesse anglaise représente un véritable facteur X. Certains d’entre eux pourraient sortir du lot et être de bonnes surprises.

Les moins de l’Angleterre

  • Les Anglais n’ont pas rassuré durant leur préparation. Ils ont joué un rugby très brouillon avec de nombreuses fautes de main et imprécisions.
  • La poule de l’Angleterre est assez serrée avec des matches pièges. L’Argentine, le Japon et les Samoa sont des adversaires qui pourraient surprendre.
  • L’Angleterre semble manquer de joueurs capables de faire des différences. Que ce soit à la course ou dans l’orientation du jeu, Tuilagi et Vunipola semblent être les deux seuls porteurs de ballon capables de débloquer le jeu.

L’avis d’Olivier Magne

« L’Angleterre m’inquiète beaucoup. La conjoncture économique est compliquée, des clubs ont mis la clé sous la porte. La période est difficile pour le rugby anglais et l’équipe nationale est laborieuse, elle ne se lâche pas. On a l’impression qu’elle repart de zéro malgré les talents qu’elle a comme Freddy Steward l’arrière ou l’ouvreur Marcus Smith par exemple. Elle propose un jeu stéréotypé, fermé, restrictif. »

François Simonin

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