A Sydney, Brahim Asloum n’était pas programmé pour gagner. Il s’est présenté en Australie sans titre mondial, mais cela n’a pas empêché le Berjallien de réussir le tournoi de sa vie et d’éliminer tous les favoris les uns après les autres. Récit d’une ruée vers l’or.
Tout le monde se souvient de sa chevelure blonde, de son petit gabarit, de sa décontraction apparente. Les spécialistes voyaient Brahim Asloum faire quelques exploits, mais sûrement pas aller au bout avec autant d’aisance. Le dernier jour des JO de Sydney se concluait de la plus belle des manières pour la délégation française avec une médaille d’or inattendue en début de compétition sauf pour son clan qui croyait fort en son boxeur :
« Je couvrais la boxe sur place pour Eurosport et je dois dire que l’on a véritablement vécu un moment de grâce. C’était la dernière journée des JO, une journée toujours particulière car c’est la fin. Cette finale de boxe le dernier jour était un grand évènement. Brahim Asloum avec sa teinture blonde détonnait et a surpris car il n’était pas du tout programmé pour ce titre. Il n’était même pas champion d’Europe ou champion du monde, mais sa grande force c’est qu’il avait eu une préparation parfaite depuis le début de l’année. Son entraîneur Dominique Nato nous avait dit : « Brahim fera une médaille, le petit homme deviendra grand » explique le journaliste Jean-Philippe Lustyk, auteur du grand livre de la boxe.
« Sa victoire a eu un énorme impact alors qu’il concourait dans la plus petite des catégories »
Tout au long de la compétition des poids mouches, Brahim Asloum a trimballé sa dégaine et battu tous ses adversaires avec une insouciance et une tranquillité d’esprit qui auront été les clés de ce titre décroché face à l’Espagnol Rafaël Lozano Munoz, médaillé de bronze à Atlanta, après des victoires fondatrices face au champion du monde américain puis en demi-finale face au Cubain Romero Esquirol Maikro, champion olympique à Atlanta. Sa boxe est spectaculaire, enthousiasmante, il ne laisse pas respirer ses adversaires et il en sera de même en finale pour l’Espagnol qui l’avait pourtant battu lors des sélections olympiques et qui était favori.
Mais à Sydney personne ne pouvait arrêter Asloum et le public australien est tombé sous le charme du Français : « Il a réussi la plus brillante série de combats de sa vie. Il était en total contrôle, il était super confiant, son tournoi s’est déroulé comme dans un rêve. Brahim avait emballé tout le monde en demi-finale en battant le Cubain Romero qui était le grand favori. Asloum était sûr d’avoir au moins le bronze après sa victoire en quarts, il était libéré et déchainé en demi. »
« Il a battu le champion olympique, un ancien médaillé olympique. Il était en mission, plein d’insouciance. Asloum n’avait pas du tout le statut de Yoka qui était champion du monde et favori aux Jeux. Sa montée en puissance tout au long du Tournoi semblait inéluctable. Personnellement, j’y ai cru après la demi-finale, je me disais : « S’il bat Romero, il sera champion »
Asloum professionnel après les JO
Au lendemain de ce titre, Brahim Asloum passe professionnel en janvier 2001. Tout le monde se l’arrache, les promoteurs veulent avoir le flamboyant champion olympique : « Brahim a réussi quelque chose de fort, en général ce sont les plus grosses catégories de poids qui sont mises en avant, sa victoire a eu un énorme impact alors qu’il concourait dans la plus petite des catégories. Sa personnalité, ses coupes de cheveux, son allure ont immédiatement plu. L’engouement était tel que Jean-Luc Delarue l’a signé dans sa boîte de prod, Réservoir Prod, Vincent Labrune est devenu son conseiller communication. Il s’est engagé avec Acariès et Canal +. Il a parfaitement géré son après titre. »
Sportivement, il gère bien aussi son nouveau statut. Il suscite quelques jalousies, mais il continue son chemin. Champion de Fran-ce en 2002, il est champion d’Europe des mouches en 2003. En 2007, il devient champion du monde WBA et devient ainsi le premier champion olympique français à décrocher la ceinture mondiale.
En 2009, il met un terme à sa carrière car il ne trouve pas de diffuseur. A Paris, il sera aux premières loges pour encourager les boxeurs français. La boxe ne battra pas son fabuleux record de Rio 2016 avec 6 médailles sur 10 représentants, mais elle a quelques belles chances de médailles selon Jean-Philippe Lustyk :
« La boxe peut faire entre trois et six médailles. Billal Bennama en 51 kg et Sofiane Oumiha en 63,5 kg peuvent viser l’or. Estelle Mossely va tenter le doublé douze ans après. » Estelle Mossely a l’occasion, à Paris, d’écrire l’histoire. Comme un certain Brahim Asloum un soir d’été à Sydney.
Le saviez-vous ?
Brahim Asloum est entré dans l’histoire de la boxe française en 2000. Il est devenu le premier champion olympique de boxe depuis Roger Michelot en mi-lourds et Jean Despeaux en poids moyens, deux titres décrochés à Berlin en 1936.