Les JO de Tokyo ont eu leur lot de surprises. Un Français s’est glissé parmi elles : Romain Cannone. Champion olympique après avoir mené sa compétition de main de maître, l’épéiste sera de nouveau présent à Paris.
Personne n’attendait Romain Cannone à un tel niveau à Tokyo. 47ème mondial, le Français avait intégré l’équipe de France en 2020 soit un an avant les Jeux. Il faisait alors de belles performances, mais plutôt dans les compétitions par équipes, en individuel il avait beaucoup plus de mal à briller, à se libérer.
L’étiquette de l’équipier parfait commençait à lui coller à la peau. Un an après son arrivée dans l’équipe, il s’est retrouvé à faire les JO suite à un concours de circonstances. Sélectionné dans un premier temps comme remplaçant, il n’a dû sa place de titulaire en individuel qu’à la mise à l’écart de Daniel Jérent sur lequel pesaient des suspicions de dopage.
À LIRE AUSSI : toute l’actualité du sport dans vos mags nationaux
Cannone promu par la sélection
Les responsables de la sélection n’ont voulu prendre aucun risque et ils ont promu Romain Cannone : « Personne ne l’avait vu venir sauf Brice Guyart qui nous a dit avant la compétition qu’il fallait se méfier de Romain, qu’il pouvait surprendre car il était jeune, que personne ne le connaissait sur le circuit et ses adversaires auraient donc peut-être du mal à le prendre en défaut. C’est exactement ce qu’il s’est passé » explique Nathanaël de Rincquesin, commentateur de l’escrime sur France Télévisions.
Au-delà de remporter le titre olympique et aussi la première médaille d’or de la délégation française sur ces JO, Romain Cannone se différencie des épéistes que l’on voit d’habitude sur la piste dans sa façon de combattre, son style est beau à voir et apprécié du public : « Romain a une escrime pétillante. D’habitude, dans cette arme qu’est l’épée, le style des tireurs est plutôt défensif. C’est différent du sabre ou du fleuret, c’est moins spectaculaire, mais Romain a un style qui a déstabilisé tous ses adversaires. »
« Romain a un style qui a déstabilisé tous ses adversaires »
Au début de la compétition, la France misait plutôt sur Yannick Borel ou Alexandre Bardenet qui possédaient plus d’expérience que lui. Son parcours n’a pas été facile, il a battu cinq escrimeurs appartenant au Top 10 mondial. Il a successivement éliminé un ancien champion olympique Ruben Limardo, Bas Verwijlen, Sergey Bida. En demi-finale, il s’est défait du 3ème mondial Ihor Reizlin et il a fini en beauté en battant en finale le numéro 1 mondial, le Hongrois Gergely Siklosi.
Ce sacre lui a permis de succéder au fleurettiste Brice Guyart, le dernier champion olympique d’escrime en individuel en 2004 à Athènes et à Eric Srecki, le dernier épéiste sacré à Barcelone en 1992. Après les JO, Romain Cannone intègre le Top 10 en devenant 7ème mondial, il continue sur sa lancée avec en ligne de mire les JO de Paris.
Sérieux, concentré et désormais attendu, il continue de proposer son escrime offensive et il montre qu’il possède une belle technique. Pas rassasié, en 2022 il va chercher un titre de champion du monde, il fera même le doublé avec le titre par équipes également. Il est devenu, à cette occasion, le quatrième épéiste à avoir été consécutivement sacré en individuel aux JO et aux championnats du monde après Edoardo Mangiarotti, Alexander Pusch et Philippe Boisse.
Confirmer la performance de Tokyo
En 2023, il perd son titre en prenant la 3ème place des Mondiaux de Milan. Il arrive à Paris avec un statut complètement différent de celui qu’il avait à Tokyo. A 27 ans, il arrive à maturité et, cet été, tout peut arriver : « Il sera attendu au tournant. Il a évolué en quatre ans, il a beaucoup travaillé son escrime, il a plus d’expérience et a un palmarès plus fourni avec un titre mondial. Il faudra voir aussi quel sera l’impact des problèmes qu’il y a eus ces dernières semaines. »
Des problèmes qui ont perturbé la préparation pour les JO. Après les championnats du monde 2023, les meilleurs épéistes français Romain Cannone, Yannick Borel, le champion du monde 2018 et Alexandre Bardenet (5ème mondial) ont, remis en cause le management du manager général de l’épée Hugues Obry.
Le conflit a duré plusieurs mois, les tireurs ont quitté partiellement le collectif de l’INSEP et sont repartis s’entraîner dans leurs clubs, avant qu’Obry quitte son poste en février. Aujourd’hui, le climat est apaisé, mais il est difficile de quantifier l’impact que ce différent aura eu sur la préparation des JO, mais maintenant que l’affaire est réglée Romain Cannone va pouvoir terminer sa préparation de manière plus sereine dans la dernière ligne droite avant les Jeux. Si l’été prochain il est sacré roi du Grand Palais tout cela sera oublié très rapidement.
Le saviez-vous ?
Bien qu’il soit né dans les Hauts de Seine, c’est aux Etats-Unis que Romain Cannone a découvert l’escrime à l’âge de 9 ans après avoir vécu ses premières années au Brésil avec ses parents. Des parents qui ont, ensuite, ouvert des magasins de macarons aux Etats-Unis, à New York. Romain Cannone a choisi de rentrer en France pour s’entraîner.