Président historique de l’Elan Béarnais pendant 41 ans (de 1967 à 2008), Pierre Seillant (81 ans) a été honoré à l’occasion du Classico contre Limoges. Le parquet palois porte désormais son nom !
Le club palois vous a rendu hommage avant le Classique contre Limoges. Comment avez-vous vécu ce moment ?
J’ai été surpris quand on me l’a annoncé. Tout le monde autour de moi, y compris ma famille, était au courant. C’était très bien organisé. Il y avait d’anciens collaborateurs, joueurs, entraîneurs, cadres… tout le public. Des milliers de personnes étaient présentes. Le public était enthousiaste. J’ai été très ému. J’ai arrêté la direction du club il y a 14 ans. Je n’imaginais pas qu’on me ferait un tel hommage si longtemps après. C’est la nouvelle direction avec les Américains. Ils veulent absolument conserver un lien fort entre le passé et le présent. Ils ont considéré que je faisais partie de ce lien.
Justement, comment avez-vous vécu le passage du club sous pavillon américain ?
Ils sont majoritaires au capital à hauteur de 75%. On a mis fin à un modèle pour en mettre en place un nouveau. Pour le reste, le personnel est resté le même à part la direction. Les Américains sont forcément dans la continuité. Ils font avec ce qu’il y avait déjà.
« Depuis l’arrêt Bosman, nous avons perdu tous nos grands joueurs »
C’est quand même une coupure radicale avec le passé. Cette potentielle perte identitaire voire d’âme ne vous dérange donc pas ?
Le plus important, à mes yeux, reste que le club continue à vivre, qu’il y ait du basket à Pau, que le Palais des sports magnifique plus de trente ans après un des plus beaux de France si ce n’est encore le plus beau attire le public. Mon seul souhait véritable est que tout cela dure. Je ne vais quand même pas vous dire que j’espère que le club et ce projet se c… la gueule. Je suis content qu’il y ait eu des repreneurs. Dans l’état actuel des choses, cela ne se passe pas trop mal.
Ils ont un projet à quatre ans. A côté du basket, ils ont un projet immobilier annexe du Palais des sports, un projet de centre de formation international, un hôtel cinq étoiles, une Arena couverte de 3000 places… Tout cela s’est fait avec la Mairie de Pau. J’ai surtout servi de caution morale. Cela s’arrête là. Je ne suis en rien dans le fonctionnement actuel du club. En plus, je ne suis dans le conseil d’administration depuis juin.
Je suis simple petit actionnaire au même titre que d’autres. J’habite à 50 km et je viens voir quelques matches. Le basket, je sais ce que c’est. Après, c’est partout pareil ! Demandez à Cholet, Villeurbanne, Limoges… A Limoges, il n’y a pas beaucoup de joueurs formés là-bas non plus. Les temps ont changé. Depuis l’arrêt Bosman, nous avons perdu tous nos grands joueurs :
Diaw, Piétrus, Foirest, Risacher, Rigaudeau, Thierry Gadou qui était parti en Espagne et en Italie, et tant d’autres encore. D’une année sur l’autre, on n’a pas affaire aux mêmes joueurs à 80%. Ils signent tous des contrats d’un an. En fonction de leurs performances, ils restent ou pas. S’ils ne sont pas bons, on ne les garde pas. S’ils sont très bons, ils veulent partir…
« Nanterre, ce n’est pas Pau »
Le parquet du Palais des sports porte aussi désormais votre nom !
Cela m’a touché. J’avais déjà une salle des sports à Orthez, ma ville natale où je réside. Mais à Pau je n’aurais jamais accepté que cela porte mon nom. Là encore je n’en savais rien. Mais je reste dans le Palais des sports par mon nom et par l’histoire (sourire).
Pendant 41 ans (de 1967 à 2008), vous avez été président de ce club. Quel est le secret pour durer aussi longtemps ?
Par passion car j’aimais cela. Je voulais montrer que surtout sur une terre de rugby et de football on pouvait monter autre chose. Le basket étant le 3ème sport collectif des Pyrénées-Atlantiques à côté des Landes, là où justement le basket est le premier sport collectif.
On a réussi et je voulais voir jusqu’où on pouvait aller. Je suis parti de troisième division. J’étais content de ce que je faisais. Les gens me suivaient. Le maire m’a suivi pour faire un Palais des sports de 8000 places il y a 30 ans ! On ne savait pourtant pas ce que cela allait donner. Il n’y avait vraiment pas de basket à Pau.
Sur la fin, en 2008, on a même battu le CSKA Moscou champion d’Europe en titre à Pau avec Messina et toute la clique. Mais j’avais moins de goût. Quand on gagnait, j’étais à peine soulagé. Quand on perdait, je ne dormais pas pendant 48 heures. A la fin, la fatigue me gagnait. Maintenant, l’avenir dira ce qu’il en adviendra…
Pierre Seillant se souvient des grandes rencontres des années 80
Peut-on établir un parallèle entre ce que vous avez fait et Jean Donnadieu à Nanterre ?
Ce n’est pas pareil. Avec tout le respect que je leur témoigne, ils n’ont pas connu le même parcours. Ce n’est pas être insultant que de dire cela. On a duré au plus haut niveau pendant 30 ans. On a remporté neuf titres de champion de France, 3 Coupes de France, plusieurs Tournois des As (et une Coupe Korac en 1984, Ndlr). En 1986/1987, on a fait une Coupe d’Europe des Clubs Champions à Orthez.
On devait faire face à des Real, Zagreb, on avait battu le Kaunas de Sabonis. On a fait tomber de très grandes équipes à Orthez. Je souhaite à Nanterre que cela soit leur cas aussi. Il existe quelques similitudes entre eux et nous. C’est un club très sympa qui nous ressemble finalement. On a eu un peu la même dynamique.
« Le pire moment de ma vie c’est quand David Russell a été tué »
Quel a été le meilleur et le pire moment de votre présidence ?
Le moment le plus triste est quand on m’a réveillé à 4 heures du matin en 1978 pour m’annoncer quelques jours avant Noël qu’un de nos joueurs s’était tué ; Dave Russell. Son frère était colonel dans l’armée américaine. Cela m’avait secoué. Au point que j’avais failli tout arrêter. Après, sportivement, il y a eu des joies et des peines.
Mais ma plus grande réussite est sans doute la construction du Palais des sports à Pau il y a plus de 30 ans. Il avait fallu être convaincant dans une ville où il n’y avait pas de basket. Aujourd’hui, ce serait impossible. On l’a fait au bon moment. Il y avait les élections en 1989. On ne pouvait plus jouer à Orthez. La sécurité civile nous l’interdisait. La salle était devenue obsolète. La FIBA ne voulait plus qu’on joue là.
C’était soit arrêter et repartir en 3ème division localement soit partir ailleurs. Le maire de Pau (André Labarrère, Ndlr) avait accepté de nous tendre la main. Il s’en est bien servi (sic). Il est mort en 2006 et il n’a vécu que de grands moments. Le Maire était comblé.
Que vous inspirent les résultats actuels de Pau-Orthez ?
Le but cette année est de jouer les play off. Et si possible de se qualifier pour une Coupe d’Europe l’an prochain.
Le club peut-il à nouveau être champion de France ?
Je ne peux que l’espérer. Mais Monaco et Villeurbanne sont en avance. Ils ont beaucoup plus d’argent que nous.