samedi 18 janvier 2025

Paris 2024 : Estelle Nze Minko (Handball) ne se fait pas d’illusions

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Frédéric Denat
Frédéric Denat
Journaliste

Championne d’Europe en 2018, championne du monde en 2017 et 2023, championne olympique en 2020, la capitaine de l’équipe de France, Estelle Nze Minko prépare depuis Györi, le club hongrois où elle vient de prolonger jusqu’en 2028, ses troisièmes Jeux (en argent à Rio, en or à Tokyo) avec autant d’ambition que de sérénité.

Existe-t-il une synergie entre les succès de l’équipe de France masculine et la vôtre ?

Une chose est certaine, c’est un travail d’équipe qui s’exprime à travers la Fédération. Si on n’a pas forcément les mêmes projets de jeu, pas les mêmes entraîneurs, on partage les mêmes calendriers, le même rythme des compétitions et, surtout, la même culture à la française. Notre identité est la même : on défend dur et on court beaucoup.

C’est ce qui fait notre force, nous rend si performants sur la scène internationale. Nous sommes peut-être moins structurés que les équipes scandinaves, chez les filles comme chez les garçons, mais notre réussite est basée sur une défense aussi atypique qu’agressive.

A l’opposé de ce qu’on a pu appeler le french flair au rugby ou le jeu à la française très offensif au foot !

Chaque sport a ses particularités, mais le fait de nous appuyer sur notre défense ne nous empêche pas d’avoir des attaquants ou des attaquantes d’exception, et d’être capables de produire un jeu très complet.

Votre dernier titre mondial est-il un avantage ou un inconvénient pour aborder les Jeux ?

Ce n’est ni un inconvénient, ni un avantage, il est juste rassurant d’avoir été performantes six mois avant les Jeux. On sait très bien qu’il s’agira d’une autre compétition, que chaque match a sa vérité, mais au moins nous avons le luxe d’être alignées avec nos ambitions, d’être dans le vrai par rapport à ce qu’on propose, d’être en confiance. Après, nous avons assez d’expérience pour savoir que ça ne suffit pas pour être champion olympique, mais que c’est un plus car, en six mois, une équipe ne peut pas se réinventer totalement et s’inviter en si peu de temps parmi les candidates à la médaille d’or.

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« Pour gagner, on sait qu’il nous faudra être meilleures que lors du Mondial »

Ce statut de favori ne vous fait donc pas peur ?

Depuis longtemps, nous avons cet objectif en tête : gagner les JO à Paris. On n’a pas attendu d’être championnes du monde. Même lorsque nous perdions pour la 3ème place des championnats d’Europe 2022, on avait cette ambition-là bien chevillée au corps. Le titre mondial n’a rien changé pour nous. Il a juste confirmé que nous étions sur le bon chemin, mais que la route était encore longue avant de monter sur la plus haute marche du podium.

A titre personnel, à quel niveau cette perspective olympique à domicile a-t-elle impacté votre carrière ?

J’ai essayé d’amener plus de transversalité entre le club et la sélection alors qu’habituellement j’essayais de séparer les deux. J’essaye de développer plus de compétences communes à mon club et à la sélection. J’essaie de voir où en sont mes coéquipières, à travers des vidéos, des matches de Ligue des Champions que je regarde, pour maximaliser le temps qu’il nous reste avant l’échéance olympique, voir ce qui peut encore être fait pour améliorer les choses. C’est mon rôle de capitaine et, bien au-delà, ça correspond à ma façon de me préparer, de rester concentrée sur l’objectif, d’arriver au top de ma forme au bon moment.

A quel style d’ambiance vous attendez-vous au mois d’août ?

Nous en avons eu un avant-goût à Orléans pour notre qualification pour le prochain championnat d’Europe. Après avoir vécu un Euro à domicile en 2018 plein de ferveur, et en ayant réussi à remplir Bercy à deux reprises, on savait que tout serait mis en place pour vivre ces JO avec encore plus d’intensité. D’habitude, les matches de l’équipe de France remplissaient des salles de 4 ou 5000 spectateurs. Cette fois, face à la Slovénie, ils étaient 9000 ! Ça annonce la couleur. Les gens sont présents, ils se mobilisent énormément. Ça commence à ressembler aux atmosphères qu’on découvrait avec admiration en allant jouer en Norvège ou au Danemark. Ça donne beaucoup de force.

Estelle Nze Minko vit ses derniers JO

Face à la Slovénie, vous avez enchaîné une 19ème victoire d’affilée, qu’est-ce que ça représente pour vous ?

Notre dernière défaite remonte à l’Euro pour le match de la 3ème place face au Monténégro. Depuis, on est sur un nuage et on tient à y rester donc à poursuivre la série le plus longtemps possible.

Vous vous préparez à vivre vos troisièmes JO, est-ce aussi les derniers ?

Oui, ce seront mes derniers JO. Mais je suis tellement concentrée sur le présent et cet objectif que je ne me projette pas au-delà, ce serait rajouter de l’émotion où il y en a déjà beaucoup. Il est clair que je suis sur la fin de ma carrière mais, en prolongeant mon contrat à Györi de trois ans plus un supplémentaire, je sais que ça ne va pas s’arrêter encore. Je n’ai pas envie de me mettre la pression avec ça, je veux profiter pleinement de l’évènement comme j’ai pu en profiter à Tokyo.

Alors que tous les voyants sont au vert, quels pièges devez-vous éviter pour éviter qu’ils passent au rouge ?

Il n’y a pas de piège à éviter, il faut juste bien se préparer et se méfier de la concurrence. On sait que toutes les équipes que nous avons battues depuis les championnats du monde ne rêvent que d’une chose : prendre leur revanche ! Il faut donc s’attendre à ce qu’elles changent d’approche, qu’elles progressent dans certains secteurs. A nous de nous adapter, de profiter de la ferveur qui va nous accompagner et de rester focus sur notre ambition, l’objectif qui nous accompagne depuis plusieurs années : être championnes olympique à Paris ! Les JO, c’est une autre histoire à écrire. Pour gagner, on sait qu’il nous faudra être meilleures que lors du Mondial. C’est une certitude.

Le saviez-vous ?

En marge de sa carrière professionnelle, Estelle Nze Minko a lancé en 2020 sa société, The V Box, pour commercialiser des coffrets destinés et conçus par des femmes avec des produits (beauté, hygiène, aliments bio, livres…) fabriqués en France et qu’elle sélectionne en fonction de leur impact environnemental et de leur intérêt sociétal. Elle reverse notamment 1 euro par box vendue à l’association Règles Elémentaires pour lever le tabou des conséquences des menstruations sur les performances des sportives de haut niveau.

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