Avec quatre médailles olympiques, Angelo Parisi est devenu le premier Français à remporter le titre suprême aux JO dans la catégorie poids lourds. Surnommé le Magnifique pour sa volonté de toujours réussir la technique parfaite lors de ses combats, le natif d’Arpino, en Italie, a su gagner les cœurs français pour en devenir l’un de ses porte-drapeaux en 1984 et son meilleur ambassadeur sur les tatamis. A 71 ans, Angelo Parisi n’a rien oublié.
Que gardez-vous des Jeux Olympiques après toutes ces années ?
Une médaille d’or ! C’est le but de chaque athlète. On veut tous la gagner. C’est un souvenir extraordinaire.
Pourtant, votre aventure commence à Munich, en 1972, avec une première médaille de bronze en toutes catégories… avec le Royaume-Uni !
Ce sont mes premiers Jeux Olympiques. C’est un souvenir triste, mais tout de même extraordinaire. J’avais 19 ans. Cela faisait seulement quelques années que je pratiquais le judo. C’était fabuleux avec ma première médaille, mais c’était triste à cause de l’attentat de Munich. C’était la première fois que ça arrivait aux JO. Je combats en toutes catégories. J’y ai battu des gens plus lourds que moi.
Comment avez-vous pu participer aux JO en tant que citoyen britannique ?
J’étais arrivé en Angleterre à l’âge de 6 mois. Puis on est revenu en Italie dans mon village d’Arpino jusqu’à l’âge de 4-5 ans. J’ai vécu avec mes grands-parents avant de repartir en Angleterre. J’ai fait toute ma scolarité là-bas. On pratiquait beaucoup d’activités. A partir de 8-9 ans, au collège, on fait plus de sport. J’en faisais entre 10 et 15 heures par semaine. On faisait de tout comme du foot, du rugby, du tennis et même du cricket.
J’étais fort en sport. J’étais même champion scolaire d’Angleterre en rugby et en lancer de poids. J’ai commencé le judo à 15 ans. J’ai alors fait une sélection pour représenter une école de Londres ; J’ai gagné six combats par ippon et on m’a envoyé au Budokwai, le plus ancien club de judo en Europe, hors Japon.
C’était un club fort qui m’a appris le judo. Je l’ai fait par instinct ; je suis né pour pratiquer le judo. Je l’ai compris tout de suite. J’ai eu une progression expresse. 8 à 9 mois plus tard, j’ai passé ma ceinture noire.
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Angelo Parisi s’est formé à Budokwai
Aviez-vous déjà les Jeux Olympiques à l’esprit en arrivant à Munich ?
J’aurais pu être champion olympique déjà en 1972… mais dans ma catégorie. Seulement, il y a eu les Championnats d’Europe à Voorburg, aux Pays-Bas. Je deviens champion d’Europe. C’est mon premier titre sénior. J’y bats tout le monde. Le sélectionneur anglais pensait que c’était un coup de chance… A l’époque, il y avait deux athlètes de chaque pays.
J’ai pratiquement gagné seulement par ippon. Mais ils ont choisi David Starbrook qui avait plus d’expérience. Il a fait 2ème aux Jeux contre le Russe que j’avais battu aux Championnats d’Europe (Shota Chochoshvili, Ndlr). Je vais dans toutes les catégories et je termine 3ème. Quelques mois plus tard, on fait un Master en Angleterre et je prends ma revanche en battant Starbrook en finale.
Comment avez-vous fait pour retrouver les JO sous le drapeau français ?
Je suis arrivé en France, en 1973. Jacques Noris, un ancien champion d’Europe français, m’avait invité pour faire un stage de judo à Avignon. J’ai rencontré ma première épouse. On s’est marié un an plus tard. J’étais amoureux, mais elle n’allait pas bien en Angleterre. J’ai décidé de venir en France, en 1974. La compétition me manquait. J’ai décidé de prendre la nationalité française et je suis rentré en équipe de France en 1975.
Avec l’ambition de participer aux JO de 1976…
(Il coupe) Je n’avais pas le droit. Les Anglais avaient mis un véto sur ma participation officielle pendant deux ans. Il a fallu que je manque les Jeux. Ensuite, j’ai repris en 1977 en Allemagne où je gagne les Championnats d’Europe. J’ai fait le tournoi de Paris aussi. Puis 1980, je retrouve les JO à Moscou. J’avais tout pour faire une médaille en 1976.
Mais la France m’a apporté tout ce qui me manquait en Angleterre. C’était vraiment amateur là-bas. En France, je m’entraînais tous les jours. Comme j’étais professeur de judo en Angleterre, on m’a permis de faire l’équivalence en France. Ça a facilité ma carrière en judo. J’ai pu concrétiser ce rêve de titre olympique par la suite.
« À Moscou, j’ai battu tout le monde par ippon »
Que représente l’or que vous avez remporté à Moscou en 1980 ?
J’ai été le premier champion olympique français de judo. C’était fabuleux. Le plus important pour moi était aussi la manière avec laquelle je cherchais à gagner. Je voulais trouver la perfection au niveau de la technique pour faire tomber. A Moscou, j’ai battu tout le monde par ippon. C’est rare. Je cherche à mériter la victoire.
Après l’or, vous remportez encore deux autres médailles olympiques en argent, en toutes catégories, en 1980 et une autre en plus de 95 kg à Los Angeles, en 1984…
(Il coupe) J’ai eu une très longue carrière. Ma première médaille, je l’ai gagnée à 15 ans, en Allemagne. Je fais 3ème. Après, j’ai toujours fait un podium. Sauf quand j’étais blessé. Il n’y a que Teddy Riner qui a fait aussi long que moi (18 ans de carrière contre 19 ans pour Riner, Ndlr). Avant Teddy (5 médailles), j’étais le seul judoka au monde à avoir 4 médailles olympiques et j’aurais pu en avoir plus.
Que vous arrive-t-il contre Saito en finale des plus de 95 kg aux JO de 1984 ?
Hitoshi Saito faisait 155 kg. Il était plus bas que moi (1m80 contre 1m85, Ndlr). Je fais une technique mais, au dernier moment, il tombe à quatre pattes. C’était la seule technique forte du combat. Je n’avais jamais mis un bras au sol. Sur le podium, il n’était pas content car il savait que j’étais le plus fort. Mais, à l’époque, les arbitres avantageaient toujours les Japonais.
Le Angelo Parisi de 1980 pourrait-il battre le Teddy Riner d’aujourd’hui ?
On ne peut pas comparer. Je ne peux pas le dire. C’est un vrai poids lourd. Il est fort. Il est grand. J’en ai battu des plus lourds que lui. Le Russe que j’ai battu faisait 175 kg et 2m04 !
Quelle image gardez-vous des Jeux Olympiques ?
J’en ai deux. La finale que je gagne et un combat face à Serguei Novikov en 1980 et qui était champion olympique à Montréal, quatre ans auparavant. Il avait battu tout le monde et même le Japonais Endo. Je lui avais fait la technique parfaite en demi-finale. En finale, j’ai forcé un peu contre mon adversaire (Dimitar Zapryanov, Ndlr). Le judo était la technique. Il fallait qu’elle soit parfaite. Ça comptait plus pour moi.
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Angelo Parisi est le premier judoka à participer à deux finales olympiques en deux Olympiades dans la catégorie des poids lourds. En 1980, à Moscou, il rajoute une autre finale en toutes catégories, remportée par l’Allemand de l’Est, Dietmar Lorenz.