Notre expert, Noël Tosi*, revient sur les premiers résultats de cette Coupe du Monde, et plus particulièrement sur les surprises. Enfin, « surprises », par pour tout le monde…
Ce mondiale est surprenant ! Mais je vous signale que nous l’avions pressenti puisque quelques mois en arrière, nous l’avions écrit (Lire : Qatar : le mondial des surprises). Je vous rassure nous n’avions consulté aucune voyante, ni même un « marabout ». Non, tout simplement, le football a changé.
Il y a de moins en moins de petites nations. Les équipes africaines ont progressé, elles se sont organisées non seulement techniquement et tactiquement mais surtout, elles ont compris l’importance de l’organisation de l’équipe autour de l’équipe.
Le Japon mieux préparé que l’Allemagne ?
J’ai le souvenir, lorsque j’étais sélectionneur du Congo, d’un déplacement pour un match contre l’Afrique du Sud à Johannesburg. Avec Christian Bassila, nous avions payé les chambres d’hôtel avec nos cartes bleues.
Certains joueurs avaient même dormi à 6 dans une chambre par terre pour certain, dans un lit pour d’autres, car la fédération avait oublié de réserver l’hôtel… Et je vous passe les détails sur l’intendance. Les maillots perdus, un docteur sans matériel, etc…
Aujourd’hui le football a bien changé, les nations sont devenues très professionnelles. Elles se sont dotées de préparateur physique de haut niveau et les petites équipes peuvent enfin rivaliser avec les grosses cylindrées à ce niveau.
Regardez le Japon quand l’Allemagne a été un peu moins bien physiquement, eux ils courraient encore. Je me suis même laissé dire que leur entraineur pour finir ce match d’entrainement, les a fait rentrer en footing à leur hôtel qui était à 6 kilomètres du stade (c’est une plaisanterie, bien sur….C’est surtout pour dire qu’ils étaient mieux préparés physiquement que l’Allemagne.)
Dorénavant Les techniciens, de ces équipes, sont de plus en plus compétents et novateurs. Ils n’ont plus rien à envier à personne. Il reste les détails. C’est encore dans ce domaine que les grandes nations de football peuvent faire la différence.
Erreur tactique du Canada face à la Belgique
Prenons par exemple l’équipe du Canada. Quand on voit la débauche d’énergie déployée en première mi temps et les 14 occasions de but que cette équipe s’est créées, on se demande comment ils ont pu perdre ce match contre la Belgique.
Vous allez me dire « Il y avait un grand Courtois. » Oui bien sûr ! Mais il y aussi des données physiologiques.
Aucune équipe au monde ne peut presser pendant 90 minutes, voire plus, avec les nouvelles données concernant les arrêts de jeu qui rallongent chaque partie de minimum 12 minutes.
L’entraineur du Canada aurait dû, au lieu de continuer à presser, constater que son équipe devait reculer et arrêter de presser, sous peine de se faire prendre en contre, ce qui a fini par être le cas.
Résultat plus de carburant en deuxième mi-temps. Plus un geste technique réussi parfaitement. Plus un centre précis, bref, une équipe à plat.
La gestion physique d’un match fait partie du rôle de l’entraineur. Quand on presse une vingtaine de minutes et qu’on se crée autant d’occasion sans marquer, on doit changer son fusil d’épaule. On doit garder de l’énergie pour son groupe et revoir le plan de jeu.
Les 45 minutes de pressing tout terrain du Canada en première mi-temps leur ont été rédhibitoires.
Toutefois, cette équipe nous a régalés par son envie, sa détermination.
Tout n’est pas fini pour eux, il faut apprendre à gérer un match et parfois changer de stratégie en cours de jeu.
Pour le moment le Canada n’est qu’une demi surprise. En attendant mieux ?
*Premier technicien français à avoir entraîné aux États-Unis, Noël Tosi a commencé sa carrière sur le banc à l’âge de 27 ans. Passé par Grenoble, Nîmes, Gueugnon, Arles-Avignon, Angers ou encore Cherbourg en France, il a aussi été sélectionneur du Congo et de la Mauritanie.