Sélectionneur, consultant, Thomas Voeckler est sur tous les terrains. L’ancien maillot jaune du Tour nous parle de ses différentes casquettes, du cas Sivakov. Et il n’exclut pas de devenir un jour directeur sportif…
Que fait le sélectionneur en dehors des courses ?
Je suis souvent à la maison, j’ai trois enfants de 13, 10 et 4 ans, ça occupe pas mal. Je fais du sport car j’ai toujours besoin de bouger, je fais des trails notamment. Je fais également des conférences avec les partenaires qui me soutiennent et je regarde beaucoup de cyclisme à la télé, je suis mes coureurs, je bouffe du cyclisme !
Etes-vous satisfait d’eux sur cette première partie de saison ?
Oui, même si j’aurais aimé que Benoît (Cosnefroy) lance plus son vélo sur la ligne (rires) sur l’Amstel Gold Race. J’ai adoré Mathieu Burgaudeau sur Paris-Nice. Les victoires de Romain (Bardet) et de Thibaut (Pinot) sur le Tour des Alpes m’ont fait plaisir également. La France est le pays qui possède le plus d’équipes professionnelles. C’est important de le souligner.
Que vous apporte ce métier de sélectionneur ? Vous a-t-il changé ?
Je ne pense pas avoir changé, j’ai toujours eu un certain franc-parler. Il m’apporte beaucoup, c’est un rôle très large, il faut observer, décider. Diriger une équipe, c’est très intéressant et surtout travailler en équipe car je ne suis pas seul et j’aime beaucoup mettre en avant les notions de groupe, de partage. Il y a beaucoup d’analyses à faire, des debriefings. Tout est intéressant dans ce métier même la construction d’un groupe même si cela implique de laisser des garçons de côté.
« La France est le pays qui possède le plus d’équipes professionnelles »
Un an après avoir été nommé sélectionneur, Julian Alaphilippe devient champion du monde. Avez-vous réalisé immédiatement que vous aviez remporté ce titre qui échappait à la France depuis 1997 ?
Pour suivre la fin de course, je me suis mis contre une barrière, je me suis dit que c’était gagné, j’étais tout seul, je regardais la fin de la course sur l’écran géant. Un mécanicien est venu me voir, l’émotion était très intense, j’ai essayé de laisser les garçons profiter entre eux. J’ai réalisé rapidement l’exploit qu’il avait fait. Lors de la 2ème journée de repos du Tour quand je suis allé discuter avec Julian, j’ai compris qu’il avait le Mondial en tête, qu’il voulait le gagner.
Sélectionneur et consultant, sont-ils deux métiers complémentaires ?
Pas forcément, mais c’est une chance d’être sur la moto, de pouvoir discuter avec les directeurs sportifs. Je peux voir les coureurs de près, discuter avec eux, sans pour autant les déranger car ils sont dans leur course. Etre consultant m’apporte beaucoup d’éléments pour mon boulot de sélectionneur, c’est indéniable.
Thomas Voeckler s’inspire de Jacky Durand
Vous étiez un bon client quand vous étiez coureur. Est-ce indispensable pour être consultant ?
Je ne sais pas, mais personnellement c’est un domaine qui m’intéressait. Daniel Bilalian me l’avait proposé quand j’étais coureur. J’étais peut-être un bon client, mais j’avais aussi mon caractère, je n’étais pas toujours agréable avec les journalistes (sic). Quand j’ai commencé, je me suis dit : « Restes naturel, fais comme tu as envie de faire ».
Je reste persuadé que dans le vélo des choses compliquées peuvent être expliquées simplement. C’est mon objectif. Il faut être franc, s’adapter au public. Celui qui regarde les courses tout au long de l’année n’est pas le même que celui qui est là sur le Tour de France où 4 millions regardent l’étape pour les paysages et 500 000 pour le sportif.
Avez-vous un modèle en matière de consultant ?
J’aime beaucoup ce que fait Jacky Durand.
Comment avez-vous accueilli la naturalisation de Pavel Sivakov ?
C’était dans les tuyaux, les évènements ont précipité sa décision. J’en avais déjà parlé à Pavel, il m’avait confirmé sa volonté de courir pour la France. Il a un fort potentiel, j’ai immédiatement cerné son caractère, c’est un garçon adorable. Après, la sélection ne se fait pas sur les noms, il sera pris s’il le mérite sportivement. Je suis OK pour avoir des garçons de talent.
Pourriez-vous un jour devenir directeur sportif ?
Un jour peut-être oui. Je veux être crédible. Je ne veux pas me présenter auprès d’un sponsor et lui dire de me confier une équipe sur mon nom ou car j’ai été coureur. J’ai passé mes diplômes au CDES Limoges, ce n’est pas pour rien. Je construis ma carrière étape par étape.