Dans un groupe constitué de l’Angleterre, de la République tchèque et de l’Ecosse, la Croatie devra assumer son statut. Un statut de vice-champion du monde. Or, même si, sur le papier, l’équipe dirigée par Gareth Southgate semble légèrement au-dessus, les coéquipiers de Luka Modric auront de vrais arguments pour viser la 1ère place de ce groupe D.
Dans une poule avec deux plus vieilles sélections de l’histoire du football, la Croatie et son premier match officiel en septembre 1994 fait figure de nouvel arrivé dans le paysage du ballon rond.
Mais quelle arrivée en fanfare, quarts de finaliste de leur premier Euro, demi-finalistes de leur première Coupe du monde, ils se sont de suite affirmés comme une équipe plus que sérieuse.
Malheureusement, la suite n’a pas été aussi évidente, cette sélection a connu un petit creux de génération mais, grâce à son extraordinaire force de formation, ils ont su rebondir ces dernières années. Ce modèle de formation a marqué Wilfried Etienne, l’attaquant français du RNK Split :
« En France, il y a une tendance à retarder les choses, ils ne font pas assez confiance aux jeunes. De ce fait, il y a énormément de talents français qui, arrivés à un certain âge, ne sont pas conservés et finissent par partir à l’étranger. La différence, en Croatie, est que les clubs misent tout sur la jeunesse, sur la progression des jeunes talents, ils n’ont pas peur de leur donner leur chance. Aujourd’hui, il y a beaucoup de possibilités dans ce pays. Si un joueur n’est pas conservé là où il est, un club de D3 croate va le récupérer, il va jouer et, en une demi-saison, ce même joueur peut se retrouver en D1. La visibilité est telle qu’il y a énormément de chances pour rebondir. »
La Croatie fait confiance à sa jeunesse
Une terre parfaite pour rebondir pour les jeunes joueurs venant de l’étranger, mais aussi pour qu’un jeune espoir de la sélection croate s’épanouisse et se développe. Cette visibilité et cet attrait pour la formation est permise par l’amour et la culture du football dans ce pays, chose qui a également frappé Wilfried Etienne depuis son arrivée à Split :
« Le football en Croatie a une place très importante pour les locaux. Un jour, j’ai discuté avec des Croates qui m’ont expliqué qu’ici le sport, et particulièrement le football, était un des éléments les plus importants de leur culture. Ils ont cette fibre pour le ballon rond dans leurs cœurs, du plus jeune au plus âgé ».
Et tous ces éléments ont permis à une nouvelle génération d’éclore et même d’exploser depuis quelques années. La préparation pour l’Euro 2016 a été un déclic pour cette sélection, les éliminatoires pour ce Championnat d’Europe se sont très bien passés et l’équipe est arrivée en pleine confiance en France.
Le début de la compétition est resté dans cette lignée puisque la Croatie a sans doute été la formation la plus impressionnante en phase de poules en dominant la Turquie et l’Espagne.
Malheureusement, elle est tombée sur le pire tirage possible en huitièmes, le Portugal qui avait fini 3ème de sa poule l’attendait et s’est imposé 1 à 0 grâce à un but de Ricardo Quaresma à la 117ème. Un drame pour les hommes d’Ante Cacic qui avaient pourtant largement dominé la future championne d’Europe : 60% de possession et 17 tirs à 6. Une grosse désillusion donc, mais une super base pour construire la suite.
La Croatie en difficulté
La suite, c’est une superbe campagne de Coupe du Monde 2018 avec une finale en ayant dominé des équipes comme le Nigeria, l’Argentine et sa future adversaire du groupe D, l’Angleterre en demi-finale.
Les hommes de Zlatko Dalic n’ont pas résisté à la France en finale, mais ils ont réussi le meilleur parcours de leur histoire et cette superbe campagne permettra à Luka Modric de s’adjuger le Ballon d’Or.
Malgré une campagne de qualifications pour cet Euro 2020 reporté en 2021 qui s’est très bien passée dans l’ensemble grâce à 5 victoires et 2 nuls en 8 rencontres dans un groupe à sa portée, la Croatie ne semble pas aussi en confiance qu’il y a trois ans en Russie.
Des résultats plus fragiles
En Ligue des Nations par exemple, elle n’a pris que 3 points en 6 rencontres grâce à une victoire face à la Suède, un bilan très faible. Dans d’autres rencontres, on peut relever des défaites face à la Tunisie ou la Slovénie et des nuls face à la Turquie ou l’Azerbaïdjan, des résultats peu encourageants.
Cette baisse de résultats, on la doit à une fuite des cadres depuis la Coupe du monde. Des éléments absolument clés de la réussite de la sélection ont pris leur retraite internationale après ce super résultat, c’est le cas de Danijel Subasic, de Mario Mandzukic, de Verdun Corluka ou encore d’Ivan Rakitic.
Des joueurs essentiels à des postes essentiels qui n’ont pas forcément encore été remplacés. Quand on parle des manques laissés par les anciens cadres de l’effectif, on peut penser dans un premier temps aux deux extrémités du onze. Dominik Livakovic est un bon gardien, il réalise une belle saison au Dynamo Zagreb, il y a même des rumeurs qui l’envoient au Milan A.C.
Malheureusement, lorsqu’on le compare avec la magnifique carrière de Subasic et son importance lors de la dernière Coupe du monde, notamment grâce à des parades décisives aux tirs au but contre le Danemark et la Russie, il semble ne pas encore faire le poids. De l’autre côté du terrain, on ne trouve personne ou presque pour remplacer Mario Mandzukic.
Andrej Kramaric est un vrai 9, mais il n’a pas le haut niveau international, ce qui fait que cette équipe croate joue régulièrement sans numéro 9 de métier, un vrai gros manque. Mais cette sélection dispose tout de même encore de nombreux atouts à faire valoir.
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Le milieu de terrain croate, un atout pour l’Euro
La charnière centrale s’est renforcée tout d’abord, Dejan Lovren et Domagoj Vida sont toujours là et Duje Caleta-Car a explosé ces deux dernières années. Ils sont trois à pouvoir évoluer à ce poste avec qualité et pourront combler les brèches laissées par des défenseurs latéraux peu convaincants sur le papier.
Et puis, bien sûr, le point fort historique de cette équipe croate qui ne déroge pas à la règle cette année, un énorme milieu de terrain, un des meilleurs de la compétition sans aucun doute.
Luka Modric, Marcelo Brozovic, Mateo Kovacic, Mario Pasalic et Milan Badelj, ces cinq joueurs pourraient être titulaires dans la plupart des équipes participant à cette compétition. Zlatko Dalic n’a donc que l’embarras du choix.
Le milieu de terrain de l’Angleterre restant son point faible, les Croates auront l’avantage dans cette partie du terrain face à leurs trois adversaires du groupe D. Un avantage très important, mais qui ne pourra être décisif sans le reste de l’effectif à son meilleur niveau.
Or, s’il manque un finisseur à cette équipe, les ailiers Ivan Perisic, Nikola Vlasic ou encore Ante Rebic pourront secouer les défenses grâce à leurs grandes qualités. Ils pourront disposer des caviars que risquent de leur envoyer les immenses passeurs du milieu de terrain et dans des matches fermés, ça peut faire la différence.
Une bonne charnière, des milliers virevoltants et un milieu exceptionnel, c’est une bonne recette pour performer, surtout quand tous ces joueurs ou presque ont connu la belle campagne d’il y a trois saisons. Néanmoins, il y a aussi des lacunes dans cet effectif, une confiance qui n’est pas au beau fixe alors c’est très compliqué de pronostiquer quelque chose pour cette équipe. Une chose est sûre, elle sera passionnante à suivre cet été.
Robin Wolff