Aucune victoire sur les deux dernières participations de l’Autriche à l’Euro. Cela reflète bien le niveau et le parcours de cette équipe qui vise à retrouver petit à petit son lustre d’antan. Accéder au tour suivant est le but des coéquipiers de David Alaba. A défaut d’être brillante, l’Autriche de Franco Foda est solide.
Entre les grandes nations qui visent le dernier carré et les outsiders qui veulent bousculer la hiérarchie se trouvent les néophytes qui découvrent l’Euro.
Il y a aussi d’autres nations qui, si elles ne découvrent pas l’Euro, ne sont clairement pas favorites tout en affichant l’ambition d’aller bousculer les grandes nations.
L’Autriche en fait partie. Les Autrichiens ont accroché le bon wagon pour l’Euro après avoir déjà réussi à se qualifier en 2016. Cet Euro en France a vu les Autrichiens se faire éliminer en phase de poules avec 1 point pris en 3 matches.
Ils ont pourtant tenu le futur champion d’Europe en respect (0-0), mais s’inclinèrent contre la surprise islandaise et les voisins/rivaux de la Hongrie.
L’Autriche a une revanche à prendre sur l’Euro 2016
« L’Euro 2016 a été une profonde déception. L’Autriche a été vue comme un outsider dangereux, mais elle n’a pas répondu présente dans les grands rendez-vous et n’a pas saisi les opportunités. L’équipe avait l’air d’être tétanisée par la pression et l’attente. Ils ne se sont jamais remis de la défaite du premier match face à la Hongrie » analyse Tom Middler, journaliste spécialiste de l’Autriche et reporter pour la FIFA.
Avant de souligner que l’Autriche a quand même progressé. « Le niveau des joueurs autrichien s’est beaucoup amélioré ces dernières années. On peut trouver des joueurs de qualité dans toutes les équipes, même si on peut dire qu’un seul nom sort (David Alaba, Ndlr) vraiment du lot et a le niveau international ».
Ces progrès se reflètent aussi sur la qualification acquise lors des éliminatoires. Placée dans le groupe G, l’Autriche a terminé 2ème et validé son ticket direct pour l’Euro. Ces éliminatoires réussis portent le sceau du sélectionneur Franco Foda. L’ancien joueur allemand, devenu entraîneur, instaure un style conservateur à l’équipe. Les résultats suivent, mais la forme laisse quelques observateurs sur leur faim.
« Une Ferrari conduite comme un tracteur… »
« La qualification n’a pas été si bien perçue par l’opinion publique à cause de la manière dont elle s’est faite. On reproche à l’Autriche d’avoir joué d’une manière très prudente, trop structurée et sans aucune performance qui ne sorte vraiment du lot » ajoute Tom Middler.
« Foda opte pour une approche conservatrice, défensive. Cela crée de la frustration pour l’opinion qui ne comprend pas que l’équipe joue de cette manière avec les bons joueurs offensifs à sa disposition. Un commentateur a récemment affirmé que Foda a une Ferrari, mais la conduit comme un tracteur ».
Les deux premiers matches des éliminatoires, ponctués par deux défaites auraient néanmoins pu faire sombrer l’Autriche. Mais, contrairement à l’Euro 2016, elle a su repartir de l’avant. Même si l’opposition n’était pas forcément de grandes nations du foot.
« Ils ont réussi à revenir après les deux premières défaites. Mais le groupe des éliminatoires n’était pas non plus insurmontable. Ils ont profité du fait que les autres équipes n’arrivaient pas à avoir une dynamique de victoires. Finalement, le niveau du groupe n’était pas si élevé. Le meilleur résultat de l’Autriche est la victoire difficile acquise face à la Slovénie à l’extérieur. »
Mais le poste de Foda n’est pas en danger et le bilan global reste positif. L’Allemand a été choisi par la fédération en octobre 2017 pour devenir sélectionneur de par ses réussites avec un des clubs majeurs en Autriche.
Foda, l’Autriche et le football conservateur
« La fédération a choisi Foda grâce à son passé avec le SK Sturm Graz. Il a remporté le trophée de meilleur coach dans le championnat autrichien et maîtrise vraiment l’environnement du football national en général ».
Les difficultés de l’équipe nationale ces dernières années contrastent avec sa réussite d’antan avec la Wunderteam. Cette Wundertam (l’équipe de rêve) qui, dans les années 30, remporta la coupe internationale européenne en 1932 (l’ancêtre de l’Euro) et atteint les demi-finales de la Coupe du Monde en 1934.
Menée par l’entraîneur Hugo Meisl et par des joueurs talentueux tels Rudi Hiden et Matthias Sindelar, l’Autriche réalise alors une série de 14 matches sans défaite entre mai 1931 et décembre 1932. L’équipe autrichienne de cette époque marque l’histoire du foot et reste perçue comme une référence.
Dans le même groupe que les Pays-Bas, la Macédoine du Nord et l’Ukraine, l’Autriche aborde cet Euro avec retenue. Elle aura comme premier objectif de déjà remporter un match dans un Championnat d’Europe ! Ce qu’ils n’ont pas réussi depuis le début du 21ème siècle.
Le but sera ensuite de sortir des poules dans ce groupe où la hiérarchie sur le papier semble claire. Les Pays-Bas comme favoris, l’Ukraine et l’Autriche au même niveau pour la 2ème place et la Macédoine du Nord en dernière position.
« Il n’est pas impossible que l’Autriche pose des problèmes aux Pays-Bas sur un match. Mais ils joueront probablement avec un plan de jeu tourné vers la défense et le match nul serait leur meilleur résultat réaliste sur le papier » juge Tom Middler.
« En tenant compte du niveau actuel de l’Autriche, la 1ère place semble vraiment improbable. L’Autriche pourra s’estimer vraiment heureuse si elle arrive à avoir la 2ème place dans ce groupe ».
La Sélection ne suscite pas un réel engouement
Celui qui commente les matches du championnat autrichien met en garde par rapport au néophyte macédonien et pointe le dernier match de poule comme un éventuel match décisif.
« Vue la bonne forme de la Macédoine du Nord, l’Ukraine et l’Autriche auront intérêt à suivre cette équipe de près. Le premier match sera déterminant. S’ils prennent les 3 points, le match face à l’Ukraine lors de la dernière journée des phases de poules sera un match couperet pour la 2ème place ».
Pour avancer, les « Rot-Weiss-Rotten » (les Rouge-Blanc-Rouge) pourront compter sur quelques individualités avec la star David Alaba à leur tête, mais pas que. Marcel Sabitzer est le maître à jouer du RB Leipzig.
Stefan Lainer joue régulièrement avec le Borussia Monchengladbach et Julian Baumgartlinger s’impose petit à petit avec Hoffenheim.
« David Alaba a tout gagné avec le Bayern et fait partie des meilleurs arrières latéraux au monde. Martin Hinteregger est aussi un défenseur de très bonne qualité. Si Julian Baumgartlinger peut être en forme pour l’Euro, il sera un leader clé du jeu » insiste Tom Middler.
« Sasa Kalajdzic est lui dans une forme impressionnante avec le VFB Stuttgart. Ses récentes sorties avec l’équipe nationale sont dans la continuité de ce qu’il fait en club. Il est probablement le meilleur attaquant en devenir de l’Autriche et peut faire la différence dans une équipe qui peine offensivement. »
Les qualifications réussies de l’Autriche rappellent qu’ils ne sont pas défaits d’avance dans cet Euro. Leurs chances existent, bien que minimes. Foda construit un collectif à son image. Solide et sans magie. Le premier match du groupe conditionnera le parcours autrichien.
Une victoire la placerait dans une position idéale qui ne serait pas forcément compromise si elle perd face aux Pays-Bas. Permettant aussi une éventuelle confrontation face à l’Ukraine, directement qualificative pour les huitièmes lors de la dernière journée des poules.
Anthony Rabemanisa