vendredi 26 avril 2024

Richard Dacoury : « Limoges a montré la voie au sport français »

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Jean-Marc Azzola
Jean-Marc Azzola
Journaliste

Le 15 avril 1993, le CSP Limoges décrochait la première Coupe d’Europe des Clubs Champions du sport français. 30 ans après, le capitaine du CSP, Richard Dacoury, qui sort un livre (Dacoury aux éditions Ouest France), revient sur ce sacre historique. Entretien réalisé pour France Basket et Le Quotidien du Sport.

Quels souvenirs gardez-vous de la campagne européenne victorieuse de 1993 ?

Ce moment est tellement extraordinaire, inouï, important, que ce souvenir est marqué à vie dans ma mémoire. Je me souviens de quasiment tout. C’est quelque chose qui nous appartient à tous : joueurs, équipe, club, ville, région, France. Les gens doivent être heureux de ce que Limoges a réussi car cela n’a pas été réalisé depuis dans le basket.

Quelle place occupe ce titre dans votre carrière ?

Je ne veux pas hiérarchiser mes différents titres. Chacun a correspondu à quelque chose de tellement intense. Cela suffisait à mon bonheur quand on le décrochait en équipe. Chaque titre était mon Everest du moment. Bien entendu, ce titre de 1993 est unique car cela n’a pas été refait.

Ce sacre occupe naturellement une place particulière par sa dimension extraordinaire. Mais je retiens surtout cette aventure extraordinaire avec ces joueurs qui l’étaient aussi. C’était génial de voir comment on a déjoué les probabilités, comment on a monté cette équipe, comment elle a vécu avec une immense dose de plaisir à vivre ensemble pendant ces longs mois.

Et finalement comment elle a récolté ce titre invraisemblable à la fin. Et aussi comment elle continue à vivre avec certaines absences notamment celle de Fred (Forte décédé le 31 décembre 2017, Ndlr) c’est quelque chose qui reste très présent. On a marqué l’imaginaire. Les gens qui ont suivi cela s’en souviennent encore.

« Maljkovic nous a transmis son rêve »

Personnellement, vous arriviez plutôt en fin de carrière. Comment aviez-vous gardé la flamme ?

La flamme, je l’ai toujours eue. Au-delà de cela, il y avait l’envie de progresser, d’apprendre, de repousser les limites, d’être toujours meilleur. Après, cette envie avait été un peu malmenée avec des années un peu moins fastes, mais cette envie restait toujours dans un coin de mon cerveau. Il n’a donc pas fallu grand-chose pour raviver cette flamme.

Cette flamme, c’était aussi Maljkovic. Au fur et à mesure de la compétition, on sentait qu’on était une équipe assez redoutable. De là à dire qu’on serait champions d’Europe, ce serait mentir, mais on était prêts à laisser notre cœur sur le plancher. C’est ce qu’on a fait. On a décroché le gros lot. Je retiens tout ce chemin, tout ce travail, tous ces sacrifices.

On savait que ce genre de résultat ne passait que par ce genre d’investissement total. Il n’y a pas de titre sans travail. C’est ce qui donne toute la valeur à ce titre. On a dû tout mettre sur le tapis pour se donner une infime chance de l’emporter. Après, cela se joue à pas grandchose. Le jour J, on a su mettre tous les ingrédients.

Un déclic s’était-il produit en quarts contre l’Olympiakos ?

L’ADN de cette équipe était sa défense. On a construit nos victoires sur ce socle permettant d’affronter pratiquement toutes les tempêtes. Mais rappelons aussi que ce qui faisait la qualité première de cette équipe, c’était son humilité et son intelligence. Ses joueurs de talent ont su partager le même rêve en mettant leur ego de côté pour atteindre un objectif commun.

Cela a constitué la clé du succès. Il fallait aussi faire preuve d’intelligence pour comprendre qu’il était nécessaire de sacrifier une partie de son jeu pour le bien collectif. Cette équipe était donc intelligente dans son jeu, dans l’approche de ses matches, dans sa capacité à mettre en place ce qu’il fallait pour l’emporter. Avoir une telle cohésion et synchronisation dans les mouvements, pour y parvenir il fallait forcément être intelligents. Ensuite, on a sans doute plus travaillé que les autres aussi.

Richard Dacoury pas surpris du niveau français

Quelle part a joué Maljkovic dans ce sacre ?

Il est le grand artisan. Ce n’est pas nous enlever quoi que ce soit. Au contraire. Il a été notre leader, la personne qui a su nous transmettre son rêve. Je l’en remercie. Avant lui, on ne rêvait pas d’un titre. Mais il a su nous expliquer qu’avec du travail, de l’intelligence et de la discipline, on y arriverait. Je lui attribue donc une très grande partie de ce titre. Il a réussi à créer cette équipe de toutes pièces en utilisant les joueurs complémentaires. Il a su aussi mettre en place un style de jeu.

Etes-vous surpris qu’aucun club français n’ait depuis succédé à Limoges ?

Oui et non. 30 ans, c’est long, mais avant Limoges cela faisait encore plus longtemps (sourire). On a ouvert la voie. Et pas que dans le basket. Dans d’autres sports, on a compris que, nous-aussi, Français, on pouvait décrocher des grands titres. Jusqu’en 1998 et après. On a rendu une partie des lettres de noblesse au sport français. C’est une grande fierté. Plus ce titre perdure, plus cela signifie que cette équipe de Limoges de 1993 était immense. Je veux croire aussi qu’une autre équipe française pourra décrocher quelque chose dans un avenir proche. On voit le parcours de Monaco. Des moyens, des structures se mettent en place qui pourraient leur permettre de décrocher le Graal. Mais on aura à jamais été les premiers !

Et que vous inspire le Limoges actuel ?

L’équipe avait laissé augurer de beaux espoirs de bien figurer dans les playoffs. Il y a eu ensuite un immense creux qui a poussé au questionnement. En battant récemment l’ogre Monaco (83-76, Ndlr), ils ont fait un exploit, un match référence.

Il faut que cette victoire soit suivie pour déterminer de nouvelles ambitions. Ce succès doit servir de base de renouveau pour décrocher les playoffs et y être compétitifs. Le plus dur est toujours de confirmer. La grande force de Limoges en 1993, c’était sa capacité à enchaîner les performances. La régularité fait les grandes équipes. Je leur souhaite actuellement d’avoir un niveau moyen suffisamment élevé pour être compétitifs le plus longtemps possible.

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