Rugby et football cohabitent avec efficacité à Clermont-Ferrand. Grâce à une offre spéciale, les supporters peuvent même assister à un match de rugby et un match de foot dans le même week-end.
Créé en 1911, l’ASM Clermont Auvergne est la figure de proue du sport clermontois. Le club évolue dans l’élite du rugby depuis 1925 et a remporté deux Boucliers de Brennus (2010, 2017), le graal de l’ovalie. Poussé par ses supporteurs, qui composent la célèbre Yellow Army, l’ASM est redoutable dans sa forteresse de Michelin et est craint dans l’Europe entière.
Les Jaunards, comme les appellent leurs fans, ont également atteint trois fois la finale de la Coupe d’Europe (1999, 2007, 2019) et bénéficient depuis leur fondation, en 1911 d’une cote d’amour sans équivalent dans toute la région.
Difficile à priori pour le Clermont Foot 63 de résister à côté de cet ogre. Fondé en 1984, le club naît d’une fusion entre le Stade Clermontois et l’Association Sportive Montferrandaise, deux écuries qui alternaient entre Division 3 et Division 4 durant plusieurs saisons. Cette mise en commun de leurs forces permet au Clermont Foot 63 de trouver la stabilité. En 2007, il accède pour la première fois à la Ligue 2, avant de rejoindre l’élite du football français en 2021.
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Depuis trois saisons maintenant, les courbes des deux clubs semblent s’inverser et les cartes sont rebattues. L’ASM n’est plus le rouleau compresseur du Top 14. La saison dernière, l’équipe a même lutté pour le maintien. A contrario, le Clermont Foot 63 fait son trou en Ligue 1, terminant même l’exercice précédent à une aussi inattendue que prometteuse 8ème place.
Même si, cette saison, les débuts sont plus compliqués, la Ligue 1, avec ses stars, sa visibilité et ses retombées financières attire le public et les investisseurs locaux. Hervé Mathoux, journaliste vedette de Canal + et auvergnat de cœur, renchérit : « Bien sûr que l’ancrage rugby est très fort, mais pas autant qu’à Toulouse ou au Pays Basque. Les deux clubs s’entendent bien, mais la force du football est telle qu’il faudra voir. Le foot, c’est puissant. » Preuve ultime de l’engagement du public pour le Clermont Foot 63, il y avait lors de leur première saison en Ligue 1 plus de 9000 abonnés à Gabriel Montpied, le stade des Rouge et Bleu, soit plus que pour l’ASM ! Pour cette saison 2023/2024, les deux clubs peuvent revendiquer chacun environ 6000 abonnés.
Un centre de formation partagé
Conscientes que les lignes bougent, les autorités locales travaillent à ce que les deux clubs grandissent en bonne intelligence, sans faire de l’ombre à leur voisin. L’exemple parfait de cette volonté d’union est la construction d’un centre de formation partagé. Ce dispositif est unique dans le paysage sportif français et mondial, ce dont se félicitent les deux clubs : « La volonté des deux présidents est claire : que cette innovation, ayant pour but de décloisonner le sport, devienne un modèle et donne envie à d’autres présidents de clubs, quelles que soient les disciplines, de travailler ensemble et de faire naître d’autres projets partagés. »
Christine Dulac-Rougerie, adjointe aux sports à la mairie et en charge de la politique sportive et des grands événements à la Métropole, a été partie prenante dans ce projet. Mère de l’illustre ailier Aurélien Rougerie (76 sélections avec le XV de France, ancien capitaine de l’ASM) et elle-même ancienne internationale de basket (107 sélections), elle a encadré au- dessus de son bureau les deux maillots, du Clermont Foot et de l’ASM : « C’est une chance formidable d’avoir deux locomotives au lieu d’une seule. Le Puy de Dôme est une terre de rugby, mais également de football. Il y a d’ailleurs quatre fois plus de licenciés au foot qu’au rugby. » Inaugurée en 2017, cette infrastructure est financée par les deux clubs, par la Métropole de Clermont et par la Région Auvergne- Rhône-Alpes. Elle se veut comme un pôle d’excellence mis à la disposition des jeunes sportifs.
L’entraînement, la performance, la diététique, le suivi médical, l’accompagnement scolaire, tout y est prévu pour que les pensionnaires s’épanouissent. L’accent est également mis sur les échanges entre résidents, de nombreux lieux de vie communs permettent aux jeunes apprentis rugbymen ou footballeurs de se côtoyer et de tisser des liens. Dans l’esprit de ce centre de formation partagé, la ville et la Métropole travaillent sur la création d’un centre de formation pour les sports collectifs féminins à la Maison des sports. Cette fois, le partage s’e effectuera sur le football féminin, le volley, le handball et le rugby.
Entre le Clermont Foot et l’ASM Clermont Auvergne, plu- tôt que de se tirer dans les pattes, on essaie de surfer sur cette émulation. En novembre 2022, les dirigeants des deux clubs avaient même proposé les week- ends 100% foot et rugby. Une offre tarifaire exceptionnelle permettait d’assister aux rencontres le samedi de l’ASM contre Bayonne au stade Michelin et le lendemain du Clermont Foot contre Montpellier à Gabriel Montpied. Jean-Michel Guillon, le président de l’ASM de l’époque, s’en félicitait : « Nos deux clubs, qui partagent notamment le centre de formation depuis plusieurs années, ont la volonté de multiplier les initiatives a n de participer au rayonnement du territoire ». Il y a donc de la place pour les deux disciplines au pied des volcans d’Au- vergne. Le rugby bénéficie d’une délité ancestrale dans le cœur des auvergnats et les investisseurs historiques tels que le Groupe Michelin sont très attachés à l’ASM et restent fidèles aux Jaunards. Les partenaires publics sont eux aussi sensibles à la montée en puissance du football dans la métropole auvergnate. L’extension du stade Gabriel Montpied en est le parfait exemple.
Une offre billetterie couplée
L’objectif est de doter le territoire d’un grand stade pour accompagner le développement du football et d’accueillir des évènements sportifs internationaux. La phase 1, qui prendra n en 2024, prévoit la construction de la tribune Est de 6000 places assises intégrant des vestiaires joueurs et officiels, une salle de presse, des buvettes et un gymnase. Durant deux saisons, le Clermont Foot 63 devra faire avec une capacité d’accueil restreinte à 12 000 places. Le coût initial de la phase 1 est de 41 millions d’euros. Une somme qui sera ajustée une fois les derniers marchés attribués. Le projet comprend également une phase 2 (8000 places) et une phase 3 (6000 places) avec en point de mire l’été 2025 et une enceinte flambant neuve de 30 000 places. Cela ne fait donc aucun doute, la cohabitation entre foot et rugby à Clermont-Ferrand est un modèle du genre. Des dirigeants en- gagés, des pouvoirs publics investis, un projet unique en Europe et des supporteurs qui tirent dans le même sens, tous les voyants sont au vert. Malgré tout, cette belle alchimie dépend d’une condition essentielle : la réussite sportive des deux clubs.
